Enfin c’est presque officiel, l’élection présidentielle aura bien lieu à la fin de cette année. L’ISIE l’a confirmé, reste que seul le président de la République est maître du jeu, puisque la Constitution exige qu’il appelle lui même les électeurs à aller aux urnes tout en fixant la date. Mais tout laisse à penser qu’il le fera en temps voulu.
Jusqu’à maintenant, le président, durant tous les scrutins passés, a respecté scrupuleusement la lettre de la loi, tout juriste qu’il est. Alors pourquoi certains, parmi ses détracteurs, tentent-ils de nous faire croire que l’élection présidentielle n’aura pas lieu, du moins à la date prévue? Probablement, parce qu’ils le souhaitent du fond de leur cœur, pour crier à son illégitimité! Car nous l’avons dit, depuis son accession au pouvoir, ,le chef de l’État reste légitime parce qu’il a été élu au suffrage universel, par une large majorité de voix. Et ceci, quelle que soit l’opinion qu’on a de sa politique dans les différents domaines, de la Constitution qu’il a imposée par un vote régulier et de son projet dit de “la construction basique“, que nous avons critiqué continuellement et sévèrement, sans relâche. Mais, malgré notre insistance sur le taux extrêmement bas de participation aux différents scrutins, les instances parlementaires qui en sont issues sont légitimes et légales.
Jeux
Dire et répéter cette évidence correspond à notre conception de la politique, et il nous paraît suspect de confondre la question de la légitimité et la nécessité de la respecter, avec les manœuvres politiciennes de certains leaders de l’opposition qui croient être en droit de « délivrer » la légitimité à leur guise comme s’ils en étaient les seuls dépositaires.
A en croire par exemple le leader du Front de Salut, un autre cache-sexe de la nébuleuse nahdhaoui, pour octroyer la légitimité au prochain scrutin présidentiel, il faut annuler tout le processus constitutionnel, politique et légal initié par KS et « ressusciter » la défunte Assemblée avec son président à sa tête … Sachant que lorsque cette Assemblée régnait, ce même leader avait appelé à constituer un gouvernement parallèle au gouvernement légal dont il se proposait d’en être le président (sic)!
C’est un jeu extrêmement dangereux qui consiste à tout effacer, tout démolir et tout refaire comme si on était encore devant une page blanche de l’Histoire. C’est ce même état d’esprit qui a régné après Janvier 2011, qu’on a appelé « révolution » et qui a pour seul objectif de porter les islamistes au pouvoir, même sur les cadavres du pays et des citoyens tunisiens.
C’est le même jeu dangereux mené par des aventuriers sans vergogne qui avait fait que notre pays a effectué un bond en arrière de quelques décennies.
L’autre accusation qui vise à saboter l’élection présidentielle est que le climat général n’est pas démocratique, car des opposants sont en prison pour essentiellement des affaires liées à la sûreté de l’État. Certes, la lenteur observée dans le traitement de ces affaires alourdit sérieusement le climat général, sachant qu’une partie des détenus étaient au pouvoir lorsque les hommes de régime d’avant 2011 moisissaient dans leurs geôles et ont passé plus de deux ans et demi sans aller devant un tribunal. Alors que la loi exigeait de les libérer, étant détenus provisoirement, juste après quatorze mois de détention arbitraire. Et que, par la suite, ils avaient passé plus de dix ans avant d’êtres jugés et pour certains pour plus de 50 affaires fabriquées de toute pièce.
Mais l’intérêt du pays, qui ne peut plus supporter cette situation, exige que les détenus actuels comparaissent devant les tribunaux le plus rapidement possible. Et ce, pour que l’opinion publique soit éclairée et que justice soit faite.
Il est tout à fois bon de rappeler que certains parmi les détenus ont été jugés en première instance, pour d’autres affaires. Le procès en cours des assassins de Chokri Belaïd ayant déjà accusé certains, dont le chef suprême du Front de Salut, Rached Ghannouchi, et ses ministres nahdhaouis de l’Intérieur et de la Justice de l’époque.
Dire qu’il faut annuler toute opération électorale et surtout la présidentielle dans l’attente de la libération de ces accusés, c’est non seulement absurde, mais c’est surtout un jeu dangereux pour faire capoter les futures élections.
L’autre jeu dangereux est mené par certains partisans de KS, qu’ils soient des partis politiques (même s’ils sont invisibles) ou des personnes et surtout des pseudo-chroniqueurs que l’opinion publique a fini par prendre pour ses porte-paroles.
Il consiste à faire feu de tout bois et accuser de trahison tous ceux qui sont contre le processus politique en cours! Faut-il leurs rappeler que même la Constitution qu’ils revendiquent assurent aux citoyens le droit de s’opposer dans les règles des lois et que seulement 11 % parmi eux ont adhéré au processus actuel en allant voter. Les 89 % seraient-ils des traîtres?
Il serait aussi possible que le prochain scrutin ne voie pas les foules se constituer devant les bureaux de vote, et les thuriféraires du président de la République constituent une des causes principales de ce rejet.
D’ailleurs, c’est dans son intérêt politique de changer de mode de communication, qui est, rappelons-le, un métier et aussi parfois un art que ne peuvent posséder que les seuls spécialistes et qui ne peut être mis entre les mains d’amateurs occasionnels.
Les islamistes avaient déjà fait les frais de cette politique aventuriste. Surtout pour ceux qui sont au pouvoir ou qu’ils représentent, il convient de ne pas laisser ces « chroniqueurs » jouer avec les allumettes!
Le jeu le plus dangereux non pas pour KS et ses partisans, mais pour le pays, c’est surtout ceux qui appellent à une politique abstentionniste. Ils visent tout simplement à faire baisser au maximum le taux de participation pour crier ensuite à l’illégitimité du futur président quel qu’il soit.
L’argument qu’ils mettent en avant en général est que « les conditions d’une élection démocratique ne sont pas réunies ».
Or, nous savons que des pays en guerre civile ont réussi des élections, d’autres en guerre tout simplement, et parfois en l’absence totale de sécurité. Et de toute façon s’abstenir est un mot d’ordre qui nous vient de l’ancienne extrême gauche française qui a toujours, pendant la cinquième République, appelé à l’abstention. Extrême gauche qui a enfanté son homologue tunisien et qui est devenue ce que Lénine appelait « la maladie infantile du communisme ». Sauf que chez nous cette maladie est devenue chronique et éternelle, car l’extrême gauche française a fini soit par disparaître, soit par se réformer. Bien sûr, les islamistes de chez nous, plus rusés, appelleront au boycott, mais enverront leurs « sous-marins » participer et jurons qu’il y aura un candidat pro-islamiste qui, sans porter leurs couleurs, participera comme « Indépendant ».
Enjeux
Les enjeux de la prochaine élection présidentielle sont multiples et dépassent la simple question : qui va gagner? Tout d’abord, la vraie question est qui va participer et se porter candidat? Certains pensent que, parce que les leaders de certains partis traditionnels sont en prison, il n’y aura pas foule pour déposer leur candidature aux bureaux de l’ISIE. Ils ont tort, car c’est méconnaître les Tunisiens. Certes, les anciennes figures usées trouveront le prétexte de ne pas se présenter, mais l’on verra de nouvelles figures, en nombre important. Surtout que pour gagner l’élection présidentielle, on n’a pas besoin de parti politique, comme ce fut le cas pour KS, rappelez-vous! Tellement les partis politiques ont fait l’objet de rejet de la population que n’importe quel « indépendant » peut vaincre des ténors des partis. Et pour s’en convaincre, il suffit de revenir aux résultats du premier tour de la présidentielle de 2019.
De toute façon, le pays a un besoin vital de réussir cette élection, non pas pour faire plaisir aux ONG droit de l’hommistes, mais pour redynamiser la vie politique nationale et peut être animer des débats utiles qui pourront éclairer la voie de l’avenir.
L’enjeu est aussi de rassurer nos partenaires étrangers, car la stabilité politique dépend de la tenue de l’élection présidentielle. En effet, la Tunisie a désormais un régime présidentiel et en plus un président qui a tous les pouvoirs. Et en cette période d’instabilité politique mondiale et aussi régionale, les différentes forces qui agissent dans le monde et qui luttent pour son partage, veulent toujours savoir qui est leur partenaire dans tel ou tel pays, et s’ils peuvent compter sur lui. S’il assure une stabilité sociale et politique, c’est en général le bon partenaire. Le reste c’est une affaire intérieure au pays.
Pour notre cas, la situation très instable de notre voisin du sud et surtout en Afrique subsaharienne redonne de l’importance stratégique à la Tunisie et rend l’élection présidentielle plus importante qu’avant. Car notre politique étrangère dépendra du seul président de la République.
Les enjeux intérieurs sont encore plus importants, car le pays souffre d’un affaiblissement de l’Etat, provoqué par une décennie de pouvoir islamiste. Pour redorer son blason, il a besoin d’un chef fraîchement élu ou réélu, qui aura la légitimité d’entamer des réformes profondes surtout au niveau économique. Dans cette année électorale, toute réforme économique qui a un coût social ne peut être envisagée. Ce qui est sûr : les vraies grandes réformes attendront et avec elles le FMI.
Et un dernier enjeu qui touche directement le citoyen, c’est le changement du personnel politique et administratif qui se fera dans tous les cas de figure, et qui devrait être suivi d’un changement palpable et concret au niveau de la vie de tous les jours et particulièrement du couffin de la ménagère et le coût de la vie. Mais c’est d’autres choix qu’il faut faire!