Treize ans de stagnation et treize ans durant lesquels les débats font rage sur la nature des stimuli qu’il convient d’adopter pour renflouer une économie léthargique. Car les mesures macroéconomiques prennent une toute autre coloration, dès lors que les taux d’intérêt sont à des niveaux élevés pour juguler une inflation structurelle.
En d’autres termes, ce qui peut être efficient quand les taux sont à 3 % ou 4 % ne l’est certainement plus dans un contexte de taux à 8 % ou plus. En réalité, la situation actuelle est encore plus délicate que cela car les ralentissements économiques sont nettement plus à combattre s’ils surviennent peu de temps après une stagflation (stagnation de l’activité économique, taux de croissance proche du zéro et en plus forte inflation, bien au-delà des 3 %). A ne pas confondre, comme le font certains avec la déflation qui est l’inverse de l’inflation.
C’est ainsi que les gesticulations ayant pour objectif d’évaluer la manière dont l’économie tunisienne serait en mesure de gérer la crise à la lumière des données historiques, n’ont abouti à rien. Ce résultat doit cependant aujourd’hui être analysé eu égard à la conjoncture actuelle, car les temps ont effectivement bien changé.
Des ralentissements économiques
La situation actuelle induit une asymétrie violente dans le fonctionnement d’une économie. En effet, s’il est facile de lutter contre l’inflation en remontant les taux, la marge de manœuvre devient inexistante lorsque le plancher du taux est atteint; et ce, que ce soit pour lutter contre la récession, ou simplement pour stimuler une forte croissance. Préparons-nous donc, en conséquence, à un avenir jalonné de ralentissements économiques plus marqués que la moyenne historique, à des croissances nettement plus mièvres et à des taux de chômage endémiques et persistants. Parce que les réajustements macroéconomiques seront d’autant plus lents et poussifs à se matérialiser que les taux d’intérêt réels (taux nominal moins taux d’inflation) seront proches du zéro.
Pour autant, rien n’est complètement perdu, ni totalement désespéré, puisqu’une bouée de sauvetage dépassant le cadre de la BCT et de ses taux d’intérêt directeur existe; à condition bien-sûr qu’elle soit exploitée. Il s’agit, en l’occurrence, de la politique fiscale et budgétaire qui– à travers les leviers de l’augmentation de la dépense publique d’investissements et de la baisse des impôts- fait office de stimuli bien plus efficients que ne le sera jamais la politique monétaire d’une BCT enchainée au carcan d’une orthodoxie monétaire obsolète.
Désormais, les multiplicateurs/stabilisateurs économiques, via les mécanismes budgétaires et/ou fiscaux, relancent opportunément l’économie et la demande en période de tourmentes et d’incertitudes…
A condition d’en avoir le cran politique.
* Dr. Tahar EL ALMI, Economiste-Economètre.
Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,
Psd-Fondateur de l’Institut Africain D’Economie Financière (IAEF-ONG)