La présente tribune de l’ambassadrice de France en Tunisie, Anne Guéguen, a été transmise à la rédaction de l’Economiste Maghrébin, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes.
« Le 8 mars marque, en Tunisie, en France, et partout dans le monde, la Journée internationale des droits des femmes. C’est une date qu’il me tient à cœur d’honorer en tant que première femme ambassadrice de France en Tunisie.
En effet, la Tunisie et la France ont en commun d’avoir beaucoup fait pour la promotion des droits des femmes et de s’être mises, à plusieurs reprises dans l’histoire, à la pointe des avancées. Les deux pays ont aussi en commun la grande Gisèle Halimi, qui porta si haut la cause des femmes et de l’émancipation.
La Tunisie est un pays qui résonne du nom de femmes remarquables – Carthage ne fut-elle pas fondée par l’illustre Elyssa ? Sophonisbe, Lalla Manoubia, Tawhida ben Cheikh, Bechira Ben M’rad, Habiba Menchari, Radhia Haddad, l’énumération pourrait se prolonger. Plus près de nous les sportives, telles Habiba Ghribi, Ons Jabeur ou encore Raoua Tlili, incarnent la force d’un pays pionnier pour l’émancipation des femmes dans le monde arabe. Je pense naturellement au Code du statut personnel du 13 août 1956 ainsi qu’à la loi 58 de 2017 sur l’élimination des violences à l’égard des femmes, texte novateur et exemplaire, bien au-delà des frontières de la Tunisie. Je pense surtout aux nombreuses femmes valeureuses de différentes générations que j’ai rencontrées depuis mon arrivée à Tunis l’été dernier et qui m’inspirent toutes une grande admiration : dans le monde de l’entreprenariat, de la culture, des sciences, de l’administration, du journalisme, des universités, des associations mais aussi de l’agriculture et de la technologie. Elles sont une force positive et une immense source d’espoir pour nous tous, et nous toutes.
La France a pour sa part fait de l’égalité entre les femmes et les hommes une grande cause nationale. Celle-ci se décline dans de multiples dimensions, complémentaires et qui se renforcent les unes les autres : lutte contre toutes les violences faites aux femmes, défense de la liberté de la femme à disposer librement de son corps et des droits sexuels et reproductifs, promotion de l’égalité professionnelle et de la parité, lutte contre les stéréotypes. De nouvelles avancées juridiques ont été réalisées tout récemment. Une nouvelle loi visant à renforcer l’accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique a été adoptée en juillet dernier. La France vient d’intégrer dans sa Constitution la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse.
Au niveau international, la France s’est dotée depuis 2019 d’une diplomatie féministe volontariste. Cette stratégie pour l’égalité s’est notamment traduite par l’organisation du Forum Génération égalité en 2021, par une forte augmentation de ses contributions financières en faveur des droits des femmes et des filles et par un doublement des financements accordés à ONU Femmes. L’effort de la France en faveur du Fonds de soutien aux organisations féministes a atteint 134 millions d’euros sur trois ans.
En Tunisie, l’Ambassade de France soutient les initiatives locales mises en place par les autorités tunisiennes ainsi que la société civile du pays. La France met en œuvre le projet EFOR au bénéfice des femmes rurales, entre autres initiatives que nous portons aux côtés de nos partenaires tunisiens. Elle participe également au projet AJYAL Égalité visant à renforcer la culture de l’égalité entre les femmes et les hommes en Algérie, en Libye, en Maroc et Tunisie. Nous soutenons aussi les organisations féministes, dans la continuité de notre engagement visant à ce que 75% des projets financés par l’aide publique française au développement favorisent l’égalité de genre. Hier se tenait à l’Institut français de Tunisie une journée d’échange et de travail, dédiée aux acquis et aux défis des droits des femmes en Tunisie, et aux luttes féministes portées en particulier par les femmes militantes de Tunisie. Celles-ci étaient nombreuses à y participer.
Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les filles et les femmes d’ici 2030 est le cinquième des 17 objectifs du développement durable adoptés par tous les membres des Nations unies en 2015. L’égalité des femmes avec les hommes est un élément essentiel et central du développement inclusif et durable. En réalité tous les ODD dépendent de la réalisation de l’ODD-5.
C’est pourquoi, dans un parcours professionnel où j’ai toujours souhaité porter haut le sujet de la liberté des femmes, de leur autonomisation et de leur égalité avec les hommes, en d’autres termes de leur « empouvoirement », je souhaite, avec toute mon équipe, porter une ambition forte en la matière, avec tous nos partenaires tunisiens ».
Anne Guéguen
Ambassadrice de France en Tunisie.