16 134. C’est notre chiffre du jour, et c’est le nombre de Tunisiens qui auraient été naturalisés français au cours des six dernières années (2018, 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023), rapportent nos confrères d’espacemanager.com
L’ennui, c’est qu’il ne s’agit pas de simples éboueurs, de gardiens d’immeubles, de chauffeurs et autres femmes de ménage, mais souvent de « cerveaux », c’est-à-dire des ingénieurs, médecins, informaticiens, etc. Cela n’est pas sans rappeler des propos du doyen des ingénieurs tunisiens, Kamel Sahnoun, selon qui la Tunisie perd annuellement 6 500 ingénieurs, ce qui équivaut également à une perte de 650 millions de dinars (MDT). Car « la formation d’un ingénieur tunisien coûte 100 mille dinars aux contribuables ».
« Depuis 2011, ce ne sont pas seulement les pauvres hères entassés dans des embarcations de fortune, chavirant au large, devenues tristement légion, qui ont décidé de fuir le pays. Le mal est encore plus profond et il devient ancré dans notre pays au cours des dernières années. La tendance se trouve même inversée, puisque ce sont les jeunes diplômés dans diverses spécialités qui profitent de la moindre opportunité pour faire leur vie ailleurs », ajoute-t-il.
Et le plus souvent, « ces jeunes diplômés ont tendance à s’installer dans le pays d’accueil et obtenir sa nationalité », ce qu’offrent du reste certains pays européens, la France et l’Allemagne en particulier, qui « ont fait de l’immigration choisie un choix pour combler le manque de cadres dans différentes spécialités comme la médecine et l’ingénierie ».
En France par exemple, il y a deux principales manières d’obtenir la nationalité, la déclaration de nationalité et la naturalisation.
Pour ce qui est de la déclaration, elle « concerne ceux qui sont mariés ou qui ont un lien de parenté avec une personne française (descendant(e): enfant, petit-enfant, arrière-petit-enfant, frère ou sœur…) », rappelle-t-on.
Par contre, « … la naturalisation est soumise à plusieurs conditions, en particulier la durée de résidence en France qui doit être de cinq ans au moins ou être un réfugié politique ». Mais une chose est sûre, « un dossier de demande de nationalité est complexe à monter, chaque document a son importance et une simple erreur aboutira à un refus ou à un ajournement ». Et avec la nouvelle loi sur l’immigration, votée par le parlement français il y a quelques semaines, la nationalité française sera désormais de plus en plus difficile à obtenir.
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Cependant, nécessité faisant loi, l’Hexagone a besoin de cerveaux plus ou moins bien formés. C’est dans ce cadre que « … des milliers de jeunes Maghrébins (Marocains, Algériens et Tunisiens) postulent pour tenter d’obtenir ce fameux sésame ».
C’est ainsi que selon « les statistiques des services du ministère français de l’Intérieur, 85 176 personnes nées dans les trois pays du Maghreb ont été naturalisées entre 2018 et 2023 sur un total de 323 952 immigrés répartis sur plus de 150 pays ». Il s’agit de 36 972 Marocains naturalisés, 32 050 Algériens en deuxième position et 16 134 Tunisiens en troisième lieu.
Mais par rapport à la population totale, la Tunisie, avec ses 12 millions d’habitants (contre 45 millions pour l’Algérie et 36 millions pour le Maroc), est le pays qui a connu le plus grand nombre de personnes naturalisées françaises.
Les années 2021 et 2022 ont connu une évolution notable des naturalisations parmi les ressortissants des trois pays.
Tableau des naturalisations des Maghrébins en France, entre 2018 et 2023 :
2018 2019 2020 2021 2022 2023
Marocains 5 864 5 463 4 915 8 841 7 066 4 823
Algériens 6 422 5 282 4 257 6 928 5 690 3 471
Tunisiens 2 608 2 273 2 024 3 962 3 144 2 144
Rien qu’au cours des mois de janvier et février 2024, 132 Tunisiens ont obtenu la nationalité française, contre 449 Algériens et 680 Marocains, d’après les chiffres du département français de l’Intérieur cités par espacemanager.com