En dépit de la concurrence asiatique, Ennakl a pu maintenir sa position de leader grâce à une variété de marques et à l’introduction de nouveaux modèles. C’est ce que nous confirme M. Ibrahim Debache, président du Conseil d’administration d’Ennakl Automobiles, lors de cette interview. Un entretien qui a été l’occasion de revenir sur les performances de l’entreprise, mais surtout sur ses objectifs, notamment en ce qui concerne l’avenir des voitures électriques.
Commençons, si vous le voulez bien, par l’actualité du groupe Ennakl Automobiles : quelques chiffres sur les immatriculations en 2023, et la tendance pour l’année 2024.
D’abord, je tiens à vous remercier pour cette sollicitation, et c’est toujours un plaisir de recevoir L’Economiste Maghrébin qui s’intéresse au secteur de l’automobile, qui constitue un domaine très important pour la Tunisie. 2022 a été, on va dire, une année « correcte » après la pandémie de Covid-19 qui avait sanctionné le marché de l’automobile de 2019 à fin 2021. On avait retrouvé un niveau de 55 454 immatriculations pour l’ensemble de l’année.
Ensuite, on a connu, en 2023, à peu près le même volume de marché, avec 55 813 immatriculations, ce qui correspond à une progression d’environ 1%. C’est pratiquement un marché stagnant. Sauf que, entre-temps, nous avons appris, disons le, une mauvaise nouvelle : la réduction de 20% du quota pour les importateurs officiels, ce qui, évidemment, ne nous a pas permis de retrouver les bonnes années, notamment celles de 2016, 2017 et 2018. Sachant que cette baisse s’ajoute à celle de 2018 déjà à hauteur de 20% et qui n’a jamais été récupérée.
Ce cumul de baisses des quotas nous a pénalisés, d’autant plus que nous sommes 40 concessionnaires (avec l’entrée sur le marché de nouveaux concessionnaires potentiels, compte tenu de la levée du blocage de l’octroi de nouveaux agréments). Gérer autant de marques (plus de 60 sur le marché), avec un volume qui se réduit en termes de licences d’importation, devenait donc de plus en plus difficile. A préciser également que quand on parle de 55 000 voitures, il faut inclure entre 8 à 10 000 voitures populaires qui font donc partie de ce volume global.
Maintenant, en ce qui concerne 2024, l’année commence timidement. Nous avons pu avoir, suite à nos rencontres avec nos vis-à-vis au ministère du Commerce, la confirmation que, malheureusement, le quota de 2023 sera maintenu pour cette nouvelle année 2024. Autrement dit, on ne retrouvera pas le quota de 2022.
Et pour le volume des voitures populaires, il sera de l’ordre de 10 000 voitures. Il y aura donc environ 46-47 000 voitures pour les licences d’importation pour les autres segments. Fin janvier 2024 (nous n’avons pas encore les statistiques de février), nous sommes en baisse d’environ 39%, puisque nous avons immatriculé, toutes marques confondues, 2 700 voitures, comparativement à janvier 2023 lors duquel nous avons immatriculé au total 4 400 voitures.
Ceci étant, janvier n’est pas un mois révélateur parce que c’est le début de l’année, et compte tenu de la baisse du quota, au début de l’année dernière, la plupart des concessionnaires avaient beaucoup moins de stock qu’habituellement.
Mais on attendra les réalisations de février et probablement de mars aussi pour voir un peu plus clair. Ce qui est certain, c’est que nous constatons un manque de voitures pour ce qui concerne le marché officiel. Nous espérons, compte tenu de nos bonnes relations avec le ministère du Commerce, pouvoir retrouver un niveau que nous considérons nécessaire pour le renouvellement du parc, parce que nous constatons un vieillissement du parc.
Ainsi, plus de 50% des voitures ont plus de 10 ans et je dirais même qu’une bonne partie a plus de 15 ans. Cela, d’une part. D’autre part, nous constatons une très forte pression au niveau de la demande. Les citoyens sont demandeurs de voitures, mais malheureusement pour eux, les délais d’attente s’allongent.
Nous avons exprimé cette pression au niveau du ministère du Commerce pour voir – bien entendu en fonction de l’évolution de la situation économique du pays qui s’est, il faut le reconnaître, nettement améliorée par rapport à l’année dernière – comment pouvoir réviser à la hausse nos quotas d’importation en vue de répondre aux attentes du marché et ainsi pouvoir l’approvisionner d’une manière plus régulière.
Les Européens se donnent pour objectif de ne plus produire de véhicules à moteur thermique à partir de 2030. Où en sommes-nous face à cette échéance en termes d’infrastructure, de logistique, de production de bornes de recharge ? La Tunisie a-t-elle engagé des pour[1]parlers avec les entreprises avancées en matière d’équipements de voitures électriques ? Où se situent aujourd’hui les marques commercialisées par Ennakl Automobiles ?
Avant de répondre directement à votre question sur la mobilité électrique, je voudrais tout d’abord parler des per[1]formances d’Ennakl Automobiles en matière de voitures électriques en 2023. En effet, en 2023, nous avons été leader du marché en termes de voitures importées, avec près de 7 000 immatriculations, ce qui nous a permis d’accaparer pratiquement 13% de part de marché.
C’est un élément important, parce que cela signifie que les marques européennes tiennent bien malgré une concurrence de plus en plus ardue des marques asiatiques, particulièrement coréennes et japonaises. Ennakl a donc pu maintenir sa position de leader grâce à une variété de marques et à l’introduction de nouveaux modèles. Et cela me permet de faire le lien avec les véhicules électriques.
Dans ce secteur, Ennakl est également leader du marché, même si les quantités restent relativement réduites (quelques centaines d’unités). Ce leadership, nous le tenons notamment grâce aux marques Porsche et Audi. Et c’est logique parce que la mobilité électrique a commencé avec les marques Premium, en attendant, dans les prochaines années, de pouvoir être généralisée à d’autres marques, notamment Volkswagen, Seat, Cupra et Skoda.
Par ailleurs, nous avons constaté que le marché de l’hybride est lui aussi très porteur, notamment pour certaines marques asiatiques. Je pense que cela évolue positivement, parce que quelques incentives ont été mises en place dans les lois de finances 2022 et 2023. Par conséquent, ces baisses des droits et taxes ont eu un impact direct sur le prix et donc sur la compétitivité de ces voitures. Même si ces voitures restent relativement chères dans le monde entier.
En effet, les voitures électriques et hybrides qui, pour la plupart, font appel à de nouvelles technologies, restent plus chères que les véhicules à moteur 100% thermique. Mais je pense que cet écart de prix va se réduire dans les années à venir.
Extrait de l’interview qui est disponible dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 891 du 27 mars au 10 avril