Le monde subit aujourd’hui de plein fouet les effets du changement climatique. Les vagues de chaleur avec des températures élevées en sont l’une des conséquences. D’ici l’année 2040, une grande partie des pays ne disposeront pas de suffisamment de ressources en eau pour répondre aux besoins de leur population, précise le World Resources Institute.
La Tunisie n’y échappe pas, la sécheresse de ces 4 dernières années et les canicules sont venues aggraver la situation de stress hydrique élevé qu’elle connait depuis plusieurs années. Avec moins de 500 m3 par an et par habitant, la disponibilité de l’eau est compromise et la situation est alarmante.
L’action publique n’a pas été à la hauteur des défis. Résultat : des opérations de rationnement de l’eau potable sont devenues le pain quotidien des Tunisiens. Des coupures d’eau ont frappé l’ensemble du pays, une vraie menace pour la paix sociale.
Au-delà des facteurs liés aux changements climatiques, la gouvernance du secteur et les défaillances des politiques publiques y sont pour beaucoup. D’une part, la culture de la mauvaise gouvernance s’est installée au sein de la Sonede depuis des décennies et les infrastructures de son réseau de distribution ont payé le prix fort : dégradation de la qualité de l’eau et fuites à répétition dans une économie qui peine à boucler ses exercices budgétaires. Bref, un stress hydrique dopé par un stress financier. D’autre part, il n’y a aucune réflexion sérieuse pour repenser le modèle qui gouverne le secteur agricole. Un secteur fort consommateur d’eau potable (près de 80% du total), où la soif de devises a ouvert la porte à des choix de politiques agricoles suicidaires pour la sécurité alimentaire.
Une bonne gouvernance dans la gestion de cette ressource, l’amélioration de la maintenance des réseaux de distribution, ainsi que l’investissement dans de nouvelles technologies sont incontournables pour éviter l’abîme. Il en va de la sécurité alimentaire du pays.
Le dessalement de l’eau de mer par l’énergie solaire, l’investissement dans une agriculture faiblement consommatrice d’eau, la modernisation des techniques de traitement des eaux usées pour éliminer les craintes en matière de santé… sont autant de mesures qui ont montré leur efficacité dans d’autres pays.
L’eau ne peut retrouver son statut de bien public sans des mesures de politiques publiques sérieuses et une vision stratégique globale qui permettraient d’améliorer la gestion de l’offre et de la demande.
Par Noura Harboub-Labidi
Cet article est disponible dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 892 du 10 au 24 avril 2024