Tunis, 19 avr. (TAP – Chayma Zneidi) – « Les enfants sont les premières victimes de la surexposition aux écrans, ce qui pourrait avoir des conséquences délétères sur leur santé mentale et psychique », a indiqué Radhouane Fersi, sociologue et président de l’Association Awledna, qui a également souligné l’importance de la prévention en milieu familial et de l’encadrement des enfants face aux différents dangers numériques.
Suite à la récente affaire de leurre d’enfants dans laquelle serait impliqué un adulte qui aurait attiré des mineurs sur la toile pour les piéger et les menacer, dont trois victimes qui ont été identifiées et prises en charge sur le plan psychologique par le ministère de la famille, quelques experts ont expliqué à l’agence TAP les raisons de la prolifération du phénomène de la cyberviolence et du cyberharcèlement des enfants et leurs lourdes conséquences sur les victimes.
« Quel que soit sa forme : morale, sexuelle, physique, ou virtuelle, le harcèlement est une forme de violence basée sur des rapports de domination ayant des conséquences graves sur les victimes », ont-ils précisé.
Le Cyber-harcèlement : définition et conséquences :
Le cyberharcèlement est le harcèlement par le biais d’Internet (courriers électroniques, réseaux sociaux, etc.) et du téléphone portable. Il s’agit d’une forme de violence pénalement sanctionnée qui touche particulièrement les enfants et les adolescents utilisant les différents supports de communication électronique, a indiqué Imene Zouaoui, psychologue et psychothérapeute à l’Agence TAP.
Elle a ajouté que le cyberharcèlement, qui est « un acte agressif, intentionnel perpétré par un individu ou un groupe d’individus au moyen de formes de communication électroniques, de façon répétée, peut prendre des formes variées : intimidations, humiliations, propagation de rumeurs, insultes, menaces, propos diffamatoires, chantages, etc.
« Ces formes de harcèlement virtuel ont des effets néfastes sur la santé mentale des jeunes victimes », a-t-elle dit, signalant que les états de peur, d’anxiété, de dépression et les risques d’idées suicidaires sont fréquents chez les enfants harcelés en ligne.
L’absence de contrôle parental, l’une des principales raisons :
« Le cyberespace, qui est anonyme et sans frontières, s’insère dans nos vies sans autorisation aucune et offre un nombre illimité de contenus et de possibilités d’interaction et de communication accessibles à tous », a relevé le sociologue Radhouane Fersi, soulignant que les enfants sont les plus exposés aux risques et aux dangers de la toile et aux cybermenaces.
« En raison de leurs engagements professionnels ou du manque de culture numérique observé chez certains d’entre eux, les parents n’assument plus leur rôle éducatif, d’encadrement, d’orientation et surtout d’écoute », a-t-il expliqué.
La famille, premier noyau social, ne doit en aucun cas perdre son rôle primordial dans l’éducation et l’encadrement de l’enfant, a-t-il dit, insistant sur l’importance de la communication avec l’enfant afin qu’il ne sombre pas dans l’isolement et ne devienne pas une proie facile pour les cyberprédateurs.
Par ailleurs, Fersi a relevé que l’absence de clubs culturels et éducatifs figure aussi parmi les raisons sociales les plus importantes, expliquant le recours et l’usage excessif par les enfants des réseaux sociaux, d’Internet et des smartphones.
L’éducation sexuelle et la santé mentale sont également importantes dans l’encadrement et l’accompagnement de l’enfant, mais elles sont encore loin d’être valorisées en Tunisie alors que leur rôle préventif et de sensibilisation est fondamental dans la prévention des cyberviolences, a-t-il insisté.
L’éducation sexuelle, primordiale dans la prévention :
Selon les preuves scientifiques permettant de diagnostiquer les maladies psychologiques et mentales, l’adulte accusé dans l’affaire de cyberagressions contre des mineurs souffre de troubles du comportement (comportement pédophile) qui sont incriminés par la loi, a indiqué la psychologue clinicienne à l’application électronique tunisienne « Ahkili », Lilia Tlili, dans une déclaration à l’Agence TAP.
« L’éducation sexuelle est nécessaire pour protéger les enfants contre l’exploitation sexuelle et le harcèlement électronique », a-t-elle expliqué, soulignant l’impératif de ne pas culpabiliser les enfants victimes de harcèlement et de les encadrer et les accompagner psychologiquement rapidement après l’incident.
Elle a évoqué certains comportements pathologiques d’harcèlement sexuel ou de cyberagressions sexuelles commis en milieu familial, où l’enfant peut être attiré de manière plus facile et de façon progressive.
L’État et la société civile : Impératif de renforcer la lutte contre ce phénomène :
De son côté, le président de l’Association des parents et élèves, Ridha Zahrouni, a souligné dans une déclaration à l’agence Tap, l’importance d’élaborer une véritable stratégie nationale et des campagnes de sensibilisation par les ministères intervenants, tels que les ministères de la famille, de la femme, de l’enfance et des personnes âgées et de l’éducation, en s’appuyant sur les aspects préventifs, de contrôle et thérapeutiques pour protéger les enfants contre l’exploitation sexuelle.
Il a également souligné la nécessité d’inclure l’éducation sexuelle dans les programmes éducatifs et de former le cadre éducatif dans ce domaine pour protéger les enfants de tels phénomènes et défendre l’intérêt supérieur de l’enfance.
L’expert a mis l’accent sur l’importance de l’utilisation d’une terminologie appropriée (expressions, mots, etc.) dans les programmes éducatifs, adaptée aux différentes tranches d’âge des enfants et de sensibiliser à la manière de protéger l’enfant.
Il a appelé les parents à surveiller l’utilisation d’Internet par leurs enfants afin d’assurer la sécurité numérique et d’intervenir rapidement en cas d’incidents.