Le nombre de pays qui retirent leurs réserves d’or des États-Unis a augmenté régulièrement ces derniers temps. Un vote silencieux de défiance à l’égard du système financier américain, selon l’influent magazine Forbes.
Les pays qui ont pris de telles mesures ces derniers mois sont le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Ghana, le Sénégal, le Cameroun, l’Algérie, l’Égypte et l’Arabie saoudite. Chacun représentant des zones critiques en Afrique et au Moyen-Orient, selon un article des analystes de Forbes paru samedi 4 mai 2024.
Il ne s’agit pas simplement d’une question symbolique : la tendance au rapatriement des réserves d’or reflète un changement majeur dans la dynamique économique mondiale et souligne le scepticisme croissant des États quant au statut de valeur refuge qui est traditionnellement associé aux États-Unis.
L’inflation persistante, l’augmentation des niveaux d’endettement et les inquiétudes quant à la capacité de la Banque centrale américaine (FED) à maintenir une politique monétaire stable ont érodé la confiance dans le dollar. En outre, les tensions géopolitiques et les incertitudes entourant les relations commerciales ont encore alimenté les inquiétudes des gouvernements étrangers.
Pour les États d’Afrique et du Moyen-Orient, sauvegarder leurs réserves d’or n’est pas seulement une question de prudence économique, mais aussi un impératif stratégique, souligne Forbes. L’or a toujours été considéré comme une « réserve de valeur » en période de crise économique, offrant une protection contre la dévaluation de la monnaie et l’instabilité géopolitique : « En rapatriant leurs réserves d’or, ces pays visent à se protéger de la contagion potentielle des chocs économiques et à sécuriser leur richesse à l’intérieur de leurs frontières ».
Forbes cite par exemple, la décision de l’Arabie saoudite de retirer ses réserves d’or des États-Unis qui a provoqué une onde de choc sur les marchés. « En tant que l’un des plus grands exportateurs de pétrole au monde et pilier de l’économie mondiale, les décisions de l’Arabie saoudite soulignent un désenchantement croissant à l’égard du système financier américain. La décision du royaume est considérée comme une manœuvre stratégique visant à sécuriser ses actifs dans un contexte de tensions géopolitiques et d’incertitudes accrues dans la région ».
Rappelons par ailleurs que l’Égypte et l’Afrique du Sud, deux autres grandes économies, ont également pris des mesures pour rapatrier leurs réserves d’or, témoignant d’un effort concerté des pays d’Afrique et du Moyen-Orient pour réduire leur exposition aux risques économiques américains.
Plus tôt cette année, le Nigeria, l’une des plus grandes économies d’Afrique, a décidé de rapatrier les réserves d’or détenues aux États-Unis. Cette décision a trouvé un soutien national, les responsables nigérians citant des inquiétudes concernant la stabilité à long terme de l’économie américaine et la nécessité de diversifier l’exposition aux risques.
Des sentiments similaires sont repris par d’autres pays de la région, comme le Ghana, soulignant une tendance plus large à réévaluer les dépendances économiques traditionnelles.
Le retrait des réserves d’or des États-Unis représente un tournant. Cela reflète une perte de confiance dans les garants traditionnels de l’ordre économique mondial et souligne la nécessité de stratégies de diversification et de gestion des risques.
C’est aussi une démarche visant à affirmer une plus grande souveraineté économique et une relative autosuffisance des pays du Sud, pressés de réorienter leur modèle de développement. L’équilibre des pouvoirs dans l’économie mondiale est sur le point d’être réorganisé, avec des implications considérables pour l’avenir de la finance internationale.