Le président iranien Ebrahim Raïssi est décédé dans le crash d’un hélicoptère, le 19 mai. Il a été aussitôt remplacé par le vice-président Mohammad Mokhber. Mais supposons un instant que l’ayatollah Ali Khamenei, Guide suprême de la Révolution d’Iran, ait été parmi les personnalités ayant succombé à cet accident?
L’Iran, un acteur majeur au Moyen-Orient, est sous le choc après le décès de son président Ebrahim Raïssi, 63 ans, dans le crash de son hélicoptère dont l’épave était découverte lundi à l’aube. Ces funérailles devront débuter ce mardi à Tabriz, dans le nord-ouest du pays.
Cinq jours de deuil national ont été décrétés et dans la foulée le Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, a désigné le vice-président Mohammad Mokhber, un homme de l’ombre, comme président par intérim du pays.
Khamenei a d’autre part, nommé, à titre provisoire, le négociateur en chef du dossier du nucléaire, Ali Bagheri, 56 ans, à la tête de la diplomatie iranienne en remplacement du ministre des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdolahian qui a succombé alors qu’il était également à bord de l’appareil.
Pour rappel, l’hélicoptère en question avait disparu des radars dimanche en début d’après-midi dans des conditions météorologiques difficiles avec de la pluie et un épais brouillard. Et ce, alors qu’il survolait une région escarpée et boisée à la frontière avec l’Azerbaïdjan. L’épave était finalement découverte à l’aube.
L’assistance du Grand Satan
A noter à ce propos que les Etats-Unis ont indiqué, hier lundi, que Téhéran avait demandé leur assistance après l’accident d’hélicoptère qui a coûté la vie au président iranien Ebrahim Raïssi. De même qu’ils ont présenté leurs condoléances, tout en jugeant qu’il avait « du sang sur les mains ».
« Le gouvernement iranien nous a demandé de l’aide », a déclaré à la presse Matthew Miller, porte-parole du département d’Etat; alors que les Etats-Unis et l’Iran n’entretiennent plus de relations diplomatiques depuis la révolution de 1979.
« Nous avons dit que nous serions prêts à apporter notre aide. Ce que nous ferions pour tout gouvernement dans cette situation », a ajouté le porte-parole. « En fin de compte, pour des raisons essentiellement logistiques, nous n’avons pas été en mesure de fournir cette assistance », a-t-il assuré. Se refusant ainsi à donner des détails sur la teneur de la demande, ni par quel canal de communication elle a été faite.
Un système bicéphale
Reste à savoir si la disparition d’Ebrahim Raïssi, allait changer la donne dans les institutions de la République islamique?
L’article 131 de la Constitution dispose qu’ « en cas de décès, de révocation, de démission, d’absence ou de maladie de plus de deux mois du président de la République, le premier vice-président de la République, sous réserve de l’accord du Guide, prend en charge les pouvoirs et les responsabilités du président ».
En attendant la tenue de l’élection présidentielle qui aura lieu, comme l’exige la Constitution, dans un délai maximum de 50 jours et pendant cette période de transition, « un conseil composé du président de l’Assemblée, du chef du pouvoir judiciaire et du premier vice-président de la République est tenu de prendre les dispositions afin que le nouveau président de la République soit élu au plus tard dans un délai de cinquante jours ».
Traduction : le conseil provisoire présidentiel sera chargé de gérer les affaires courantes d’ici à la tenue d’une nouvelle élection présidentielle, mais en coulisse, une seule figure dirige de facto le pays, le Guide suprême iranien, le timonier et le maître des horloges. En effet, en Iran, le régime théocratique « à deux têtes » est incarné par Ali Khamenei, considéré comme le réel détenteur du pouvoir et puis par le président de la République, faisant office d’ « administrateur en chef ». Ce dernier a une fonction très symbolique qui consiste à appliquer la politique décidée par le Guide suprême, sous l’œil vigilant des Gardiens de la Révolution.
Incertitudes politiques
Et si le Guide suprême, 85 ans, était venu à disparaitre dans le même crash d’hélicoptère ou en d’autre circonstances eu égard son âge avancé? Ali Khamenei, au pouvoir depuis 1989, a la main haute sur les institutions politiques, militaires et religieuses de l’Iran. Sa disparition créerait un vide de pouvoir qui pourrait déclencher des luttes internes pour sa succession.
En interne, sa disparition pourrait également intensifier les aspirations de la population iranienne pour plus de libertés et de droits civiques. En effet, depuis des années, des mouvements de protestation témoignent d’un mécontentement croissant face aux restrictions politiques et économiques. Un nouveau leadership pourrait, soit réprimer ces mouvements de manière plus sévère, soit engager des réformes pour répondre aux demandes de la jeunesse iranienne.
Sur le plan international, un successeur modéré pourrait modifier la dynamique des négociations nucléaires et les relations avec l’Occident. En revanche, un guide suprême plus radical pourrait durcir les positions iraniennes, aggravant les tensions régionales notamment avec le nouveau Petit Satan : l’Etat hébreu.