France, Allemagne, Italie, Espagne, Hollande, Autriche, Belgique, l’extrême droite a notablement progressé dans presque tous les pays européens. Ce ne sont plus les sondages d’opinion qui le disent, mais ce sont les résultats des élections européennes qui se sont déroulées du 7 au 9 juin.
Ces résultats sonnent comme un désaveu clair et net des élites gouvernantes européennes qui, tournant le dos aux intérêts de leurs pays respectifs, se sont fait les serviteurs et les exécutants des ordres venus de Washington.
Les droites nationalistes et souverainistes européennes occuperaient le quart des sièges du parlement européen, jetant ainsi une lumière crue sur l’impopularité des dirigeants européens actuels, en particulier Emmanuel Macron en France et Olaf Scholz en Allemagne. La ‘’Renaissance’’ du premier et le SPD du second ont été respectivement battus par le ‘’Rassemblent National’’ et ‘’l’Alternative pour l’Allemagne’’.
Mais c’est en France que les élections européennes ont provoqué le plus de remous et de commentaires. Et c’est normal quand on sait que le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen est arrivé en tête avec un score historique de 31,5 %, soit une délégation d’une trentaine d’eurodéputés à Strasbourg. Alors que la ‘’Renaissance’’ d’Emmanuel Macron se contentera de moins de la moitié du score du RN de Marine Le Pen, soit 14,6 % et 13 eurodéputés…
Face à un tel désastre électoral, le président Macron n’a rien pu faire d’autre que de dissoudre l’Assemblée nationale et d’appeler à des élections législatives anticipées les 30 juin et 7 juillet. Provoquant ainsi la consternation dans les rangs de son propre parti et la joie dans ceux des fans de Marine Le Pen…
Pourquoi M. Macron a-t-il pris un tel risque qui pourrait accroître ses difficultés en l’obligeant de cohabiter avec Marine Le Pen? En prenant une telle décision, le président français ne peut pas ne pas avoir en tête la grande erreur commise par son prédécesseur, Jacques Chirac, au milieu des années 1990, quand il prit la même décision et se trouva avec une majorité de gauche à l’Assemblée, ce qui le força à nommer un Premier ministre socialiste.
Visiblement, la détermination d’Emmanuel Macron de reprendre l’initiative et le désir de prouver que Marine Le Pen ne peut pas gagner au niveau national l’ont emportés sur sa peur de rééditer l’erreur de l’ancien président Jacques Chirac. On sera plus édifié le 7 juillet prochain.
Dans une tentative d’apaiser les inquiétudes de ses partisans nées de sa décision de dissoudre l’Assemblée, le président Macron leur a déclaré : « La France a besoin d’une majorité claire dans la sérénité et l’harmonie. Être Français, dans l’âme, c’est choisir d’écrire l’histoire, sans se laisser guider par elle ».
S’adressant à ses partisans euphoriques, Marine Le Pen a mis en avant sa propre conception de l’histoire, entièrement différente de celle de M. Macron : « Le message de ce soir, dont celui de la dissolution, s’adresse également aux dirigeants bruxellois. Cette grande victoire des mouvements patriotiques s’inscrit dans le sens de l’histoire qui voit partout dans le monde le retour des nations ».
Nul doute que les extrêmes droites européennes sont xénophobes et ne ratent pas une occasion pour pointer du doigt « le trop plein d’étrangers », des attitudes exprimées aussi bien dans les discours du ‘’Rassemblement National’ que dans ceux de l’Alternative pour l’Allemagne ou encore de ‘’Fratelli d’Italia’’.
Mais ce n’est pas cela qui inquiète les élites au pouvoir en Europe qui sont loin d’être les grandes protectrices des droits des étrangers qui contribuent au développement économique des pays hôtes. Ce qui donne des insomnies à ces élites, c’est l’hostilité manifeste que témoignent tous les partis d’extrême droite à l’Union européenne et l’OTAN. Une remise en cause des deux principaux piliers sur lesquels repose la politique des élites gouvernantes européennes, et en particulier à Paris et Berlin.
Les progrès du Rassemblement National en France et de l’Alternative pour l’Allemagne outre Rhin sont les signes clairs d’un ras-le-bol massif d’une bonne partie des Français et des Allemands à l’égard de l’engagement obstiné de leurs gouvernements dans la désastreuse guerre d’Ukraine aux dépens des problèmes économiques et sociaux et que cette guerre a gravement approfondis dans leurs pays.
Le candidat socialiste (tête de liste) Raphaël Glucksmann a réagi au triomphe de l’extrême droite en déclarant : « Partout en Europe, nous assistons à une vague qui ébranle notre démocratie ». Ce n’est pas tout à fait exact. L’ébranlement de la démocratie en Europe est à l’œuvre depuis des années par ceux-là même qui prétendent la défendre et la protéger. Les guerres d’Ukraine et de Gaza ont montré et montrent encore de manière éclatante le fossé vertigineux qui sépare les élites européennes de leurs gouvernés. Celles-là se soucient comme d’une guigne de ce que pensent ceux-ci.