La Tunisie qui, depuis le 19ème siècle, grâce à une de ces ruses de l’Histoire, avait le destin scellé avec cet ex-empire colonial qu’était la France, doit se préparer à un énorme cataclysme. Puisque plus du dixième des Tunisiens, dont une grande partie de binationaux, vivent sur le sol de l’Hexagone.
La meilleure façon de décrire ce qui vient de se passer en France après la dissolution de l’Assemblée nationale est la phrase prononcée par un homme politique français, Patrick Devedjian, lors de la dissolution de la même assemblée en 1997, par Jacques Chirac : « On était dans un appartement avec une fuite de gaz, Chirac a craqué une allumette pour y voir clair »! Bien sûr c’est la démocratie, crieront les éternels fanatiques du constitutionnalisme, même chez nous, sans envisager un seul instant que la France, celle de 1789, de l’Empire, de la Restauration, et avec ses cinq Républiques, risque de s’embraser et de disparaître, si par malheur les enfants de Jeanne d’Arc arrivent à Matignon.
La Tunisie qui, depuis le 19ème siècle, grâce à une de ces ruses de l’Histoire, avait le destin scellé avec cet ex-empire colonial, doit se préparer à un énorme cataclysme. Puisque plus du dixième des Tunisiens, dont une grande partie de binationaux, vivent sur le sol de l’Hexagone.
Et justement le dit Rassemblement National compte en expulser une partie et mener la vie dure à une autre, bien que française de nationalité. Car, derrière les figures politiques de ce mouvement, raciste, xénophobe, islamophobe et anti-arabe, se cache une idéologie, antisémite (bien dissimulée), une longue histoire de massacres coloniaux, un chauvinisme d’un autre âge et maintenant un pro-sionisme génocidaire farouche.
Nos immigrés dans la tourmente électorale
Plus qu’un million et deux cent mille Tunisiens, dont une majorité de jeunes, vivent sur le sol français. Ces Tunisiennes et Tunisiens voient désormais leur sort à la merci d’un vote; et ils ont certainement peur! Peur pour leur avenir, leurs enfants, petits-enfants et surtout pour leurs droits sociaux et civiques.
Déjà le chef de fil du RN, dont le nom ne sonne pas français et encore moins gaulois, et qui signifie en arabe tunisien « foutre la merde » (berdell(h)a », a lancé sa principale promesse électorale. Laquelle consiste à changer le code de la nationalité, du principe du « droit du sol » au principe du « droit du sang ». Comme si appartenir à une nation supposait d’en porter les gênes. L’exemple des USA, de l’Australie ont prouvé à travers l’histoire que le mélange des « sangs » est un facteur de rajeunissement des nations et de renforcement de l’intelligence collective.
La France même, qui a accueilli sur son sol, lors de sa période coloniale, des millions de personnes venant d’autres races et cultures, peut être considérée comme un exemple réussi. En général, pendant les années fastes et économiquement prospères, on « importe » à tour de bras, justement des bras et des cerveaux. Dès que la crise économique pointe du nez, on crie à « l’étranger qui vient manger notre pain » ! Et c’est la grave crise économique que vit la France depuis des années, et qui a fait que sa dette avoisine les 3 000 milliards d’euros et que soutient la Banque européenne, qui est derrière la montée de l’extrême droite française.
Selon l’économiste Marc Touati, « jamais la France n’a été dans une situation si préoccupante, depuis le début de la Cinquième République, avec 110 % de dette publique et un PIB négatif ». Diagnostic confirmé par tous les experts, dont Paolo Philippe, citant Mathieu Planes, sur France TV: » La dissolution et la possibilité de voir le RN à Matignon créent un climat d’incertitude. Elles ont eu plus d’impact sur les marchés que la dégradation de la note de la France par Standard and Poor’s. Les immigrés et donc nos concitoyens en France n’ont aucune responsabilité dans cette faillite économique, et même ils sont les principales victimes. »
Pour Jacques Attali, la France est au bord de la faillite, et la décision de Macron de dissoudre l’AN n’est ni plus ni moins qu’un acte suicidaire!
Les conséquences politiques de cet acte ne peuvent être connues qu’après le scrutin législatif prochain. Mais quel que soit le vainqueur, et qui sera au gouvernement, la montée en puissance de l’extrême droite est un fait certain comme l’ont suffisamment démontré les élections européennes.
Son poids politique sera grand et les principales victimes seront les immigrés en France. Nos concitoyens résidant sur le sol français, faisant partie de cette population « bouc émissaire », seront la cible de ce nouveau pouvoir et les mesures et lois qui seront décidées leur porteront préjudice!
Personne, hormis une gauche divisée et affaiblie par une décennie de luttes fratricides et qui ne pourra pas faire barrage à ce nouveau fléau, ne leur portera secours : surtout pas les différents gouvernements maghrébins et africains, qui se contenteront de subir le revers, se cachant derrière une soi-disant neutralité vis- à-vis de la politique intérieure française.
Pourtant, nous savons que beaucoup de lobbys sont à l’œuvre dont le lobby sioniste, qui soutient maintenant Marine Le Pen et son parti, comme l’a déclaré Karl Klarsfeld, prétendant que l’extrême droite française n’est plus antisémite, car elle soutient Israël dans son génocide des Palestiniens de Gaza.
En effet, il y a bien longtemps que cette formation est sous la coupe des sionistes. Ce qui fait d’elle non seulement un ennemi des Maghrébins, mais aussi des musulmans de France.
Cette dissolution en pleine guerre d’Ukraine et au moment même où le génocide se perpétue en Palestine a le mérite de clarifier les choses et de montrer qui est avec qui!
La Gauche unie dans son second nouveau programme commun a définitivement tranché en optant pour un État palestinien, point présenté comme un programme électoral. Merci Jean-Luc Mélenchon, infatigable militant de la cause palestinienne et contre l’extrême droite. Il vient de redorer le blason de cette gauche longtemps terni par un parti socialiste français trop compromis avec l’Etat d’Israël.
Dans cette tourmente électorale française, les immigrés en général et les Tunisiens en particulier sont livrés politiquement à eux-mêmes, et il ne faut surtout pas qu’ils comptent sur leurs pays respectifs pour les aider à voir clair et choisir. N’oublions pas à l’occasion de rappeler que les apports en devise de nos citoyens à l’étranger ont triplé en quelques années, dont plus de 45 % proviennent de la France.
Rappelons aussi que chaque année environ un million de Français passent leurs vacances sur nos plages, ceci pour mettre en exergue que nous Tunisiens de Tunisie nous dépendons des élections françaises, sans oublier les 1 300 entreprises françaises qui opèrent sur notre territoire.
La question est : quelle attitude va avoir notre MAE qui est aussi notre porte-parole? On se drapera sûrement derrière la sempiternelle « souveraineté nationale ». Laquelle n’a jamais été respectée par les pays de l’autre rive de la Méditerranée, on avait même convoqué leur ambassadeur pour s’expliquer. Pourtant, il s’agit de l’intérêt de notre pays et de nos compatriotes. L’État tunisien doit faire face à ses responsabilités! Comment? C’est un autre débat!
La France, quel spectacle politique!
Nous avouons que le spectacle qu’offrent les élections françaises n’a pas d’égal. Rien à voir avec ce qui se passe aux USA, maintenant par exemple où il n’est question que de scandales sexuels, de malversations réunissant pères et fils, et parfois les gendres, et rien ou peu d’idées politiques avant-gardistes ou solides. La France a hérité du Siècle des Lumières, de la Révolution et des partis politiques, surtout de gauche, une vraie tradition de débat d’idées et un pluralisme politique et idéologique qu’on trouve rarement ailleurs.
Les élites tunisiennes aussi bien du Mouvement national que de l’Indépendance, ont non seulement puisé dans ces idées mais elles les ont enrichies. Habib Bourguiba, comme exemple, mais aussi tous les leaders culturels, artistiques et de la pensée. Ils ont toujours su faire une synthèse avec les idées venues d’Orient, du monde arabe et musulman, grâce à leur ouverture d’esprit.
L’époque actuelle ne déroge pas à la règle, car elle intervient à un moment crucial de multi-polarisation où l’Est et l’Ouest se confrontent, se font la guerre, par peuples interposés, comme en Ukraine et en Palestine. Tout cela on en ressent les échos dans les débats électoraux français. Même si la parole reste sous contrôle et les anathèmes fusent dès qu’on parle de la Palestine ou de l’Iran. C’est aussi cela faire de la politique.
C’est donc un beau spectacle politique d’autant plus que nous savons que cette fois-ci, il va durer après les élections, car on va vers une bipolarisation certaine. Gauche-Droite, le centre, généralement mou et équivoque, va partir avec l’épisode Macron. Les choses seront désormais plus claires, mêmes si elles vont mettre le feu à la France. Pas forcément au sens propre mais certainement au sens figuré.
L’Europe, elle aussi connaît la même situation, surtout que l’on sait que la montée de l’extrême droite chauvine et hyper nationaliste va finir par faire craquer l’Europe de Bruxelles, celle des grands bureaucrates. Si Marine Le Pen l’emporte, elle sera le nouvel vis-à-vis de G. Meloni qui n’aimait pas à l’évidence Emmanuel Macron, à qui elle a fait endosser (ses prédécesseurs français) la responsabilité de la ruée des Subsahariens sur son pays en passant par la Tunisie. Parions que Le Pen aura la même politique que Meloni en matière d’immigration.
En cette fin de juin et début juillet où la température réelle va battre des records chez nous, la température politique en France risque d’enflammer les passions. Mais nous au moins, nous avons nos plages et nos côtes pour se rafraîchir.
Que feront les Français?