Les alertes économiques mondiales de marché actuelles ont des implications variées pour l’économie tunisienne.
L’économie tunisienne est sensible aux fluctuations de l’économie mondiale et doit gérer divers facteurs externes pour préserver sa stabilité financière et sa compétitivité sur la scène internationale.
Des prévisions concordantes pour le marché pétrolier
Les principales agences de l’énergie ont récemment révisé leurs prévisions pour le marché pétrolier de cette année et de l’année prochaine. Malgré ces révisions, elles continuent de prévoir un resserrement du marché du brut au second semestre 2024.
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a revu à la baisse ses prévisions en raison d’une croissance plus faible de la demande. En revanche, l’Energy Information Administration (EIA) a relevé ses prévisions de demande, tandis que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a maintenu ses prévisions inchangées.
Les analystes d’UBS ont indiqué dans une note datée du 18 juin que, malgré des prévisions mixtes sur la croissance de la demande, le marché devrait rester tendu pour le reste de l’année, à condition que la production de l’OPEP+ n’augmente que marginalement.
L’AIE a réduit ses prévisions de croissance de la demande en raison de l’affaiblissement de l’OCDE et des effets de base, tandis que l’EIA, malgré la faiblesse de la demande de l’OCDE, a augmenté ses prévisions en raison de l’augmentation de la demande de combustibles de soute causée par les perturbations de la mer Rouge.
Les analystes d’UBS ont légèrement réduit leurs estimations de croissance de la demande à 1,1 Mb/j en 2024 et à 1,0 Mb/j en 2025.
Concernant l’offre, les agences ont maintenu leurs prévisions d’offre hors OPEP+ globalement inchangées, sauf pour l’EIA, qui a augmenté ses estimations de croissance de 0,1 Mb/j en raison d’une offre américaine supérieure aux prévisions pour le premier semestre de l’année 2024.
Malgré l’annonce par l’OPEP+ de supprimer progressivement ses réductions volontaires dès octobre 2024, UBS continue de modéliser le retour des barils OPEP+ pour le deuxième trimestre 2025, lorsque les équilibres du marché devraient permettre une montée en puissance progressive.
À court terme, UBS s’attend à ce que le Brent rebondisse vers le milieu ou le haut des 80 dollars, soutenu par l’extension des réductions de l’OPEP+ et le rebond saisonnier de la demande. Le Brent devrait atteindre 80 dollars le baril l’année prochaine, lorsque l’OPEP+ commencera à réduire progressivement sa production à partir du deuxième trimestre.
Les analystes d’UBS anticipent un impact négatif sur la demande de pétrole en raison du ralentissement de la croissance du PIB et de la hausse des prix, mais prévoit tout de même une croissance de la demande jusqu’à la fin des années 2020.
L’augmentation de l’efficacité et l’impact croissant des véhicules électriques devraient toutefois entraîner un ralentissement de la croissance de la demande, atteignant environ 0,5 Mb/j d’ici 3 à 4 ans, avec un pic pétrolier prévu d’ici 2029.
Malgré ce ralentissement, la capacité de réserve mondiale devrait rester stable à un niveau moyen par rapport aux normes historiques, car la croissance de l’offre ralentit également.
À court terme, les principaux risques de hausse proviennent d’une offre plus restreinte. Les analystes d’UBS estiment que la prolongation des réductions de l’OPEP+ et une baisse potentiellement plus importante de la production russe, combinées à une demande robuste, pourraient porter le Brent au-dessus de 90 dollars le baril.
Une nouvelle escalade au Moyen-Orient et une perturbation de l’offre pourraient même rapprocher le Brent des 100 dollars le baril.
Le scénario baissier de la banque suppose un impact négatif plus important sur la demande de pétrole en raison d’un ralentissement de l’économie mondiale, de l’ordre de 1,0 Mb/j par rapport à ses prévisions. Cela, combiné à une prime de risque géopolitique réduite, pourrait faire chuter les prix du Brent en dessous de son prix du pétrole à long terme de 75 dollars le baril.
Commentaires.
Les Prévisions des Agences de l’Énergie :
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a révisé à la baisse ses prévisions en raison d’une croissance plus faible de la demande, principalement due à l’affaiblissement de l’OCDE et des effets de base.
L’Energy Information Administration (EIA)a relevé ses prévisions de demande en raison de l’augmentation de la demande de combustibles de soute causée par les perturbations de la mer Rouge, malgré une faible demande de l’OCDE.
L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP)a maintenu ses prévisions inchangées.
Les Prévisions des analystes d’UBS :
Au niveau de la demande, UBS prévoit une croissance de la demande légèrement réduite à 1,1 Mb/j en 2024 et à 1,0 Mb/j en 2025.
– À court terme, un rebond du prix du Brent est attendu, soutenu par l’extension des réductions de l’OPEP+ et un rebond saisonnier de la demande.
– À plus long terme, les analystes d’UBS anticipent une croissance de la demande jusqu’à la fin des années 2020, malgré un ralentissement prévu en raison de l’augmentation de l’efficacité et de l’impact croissant des véhicules électriques. La croissance de la demande devrait ralentir à environ 0,5 Mb/j d’ici 3 à 4 ans, avec un pic pétrolier prévu d’ici 2029.
Au niveau de l’Offre :
– Les prévisions d’offre hors OPEP+ sont globalement inchangées, sauf pour l’EIA qui a augmenté ses estimations de croissance en raison d’une offre américaine supérieure aux prévisions pour le premier semestre 2024.
– L’OPEP+ prévoit de supprimer progressivement ses réductions volontaires potentiellement dès octobre 2024, mais UBS modélise le retour des barils OPEP+ pour le deuxième trimestre 2025.
Au niveau des Prix les analystes d’UBS s’attendent à ce que le Brent atteigne 80 dollars le baril l’année prochaine lorsque l’OPEP+ commencera à réduire progressivement sa production à partir du deuxième trimestre.
– À court terme, les principaux risques de hausse des prix proviennent d’une offre plus restreinte, potentiellement due à des réductions prolongées de l’OPEP+ et à une baisse plus importante de la production russe. Une nouvelle escalade au Moyen-Orient pourrait également faire grimper les prix jusqu’à 100 dollars le baril.
Pour autant, les Risques et Scénarios restent immuables dans la mesure où le scénario baissier suppose un impact négatif plus important sur la demande en raison d’un ralentissement de l’économie mondiale, avec une baisse de la demande de l’ordre de 1,0 Mb/j par rapport aux prévisions. Cela pourrait faire chuter les prix du Brent en dessous du prix à long terme de 75 dollars le baril.
En somme, UBS prévoit un resserrement du marché pétrolier au second semestre 2024 avec des fluctuations de prix influencées par la demande, l’offre et des facteurs géopolitiques. Les prévisions de demande et d’offre varient selon les agences, mais une tendance générale de tension sur le marché persiste.
Implications potentielles pour la Tunisie
Les prévisions du marché pétrolier pour le second semestre 2024, telles que décrites par UBS et les principales agences de l’énergie, ont plusieurs implications potentielles pour la Tunisie.
En premier lieu, au niveau du coût de l’importation de pétrole :
La Tunisie est un importateur net de pétrole, ce qui signifie que toute augmentation des prix du pétrole Brent aura un impact direct sur les coûts d’importation. Selon les prévisions, les prix du Brent pourraient rebondir vers les 80 dollars le baril, voire atteindre 90 dollars le baril à court terme. Cela entraînerait une augmentation des coûts d’importation, exacerbant le déficit commercial et pesant sur les réserves de devises du pays.
En deuxième lieu, au niveau de l’Inflation :
L’augmentation des prix du pétrole se répercutera probablement sur les prix des carburants et des produits dérivés, conduisant à une hausse de l’inflation. Les coûts de transport et de production augmenteront, affectant les prix des biens et services à travers l’économie. Cela pourrait réduire le pouvoir d’achat des consommateurs tunisiens et augmenter le coût de la vie.
En troisième lieu, au niveau des dépenses publiques :
La Tunisie subventionne les carburants pour maintenir les prix bas pour les consommateurs. Avec des prix du pétrole plus élevés, le gouvernement devra soit augmenter les subventions, augmentant ainsi les dépenses publiques et le déficit budgétaire, soit réduire les subventions, ce qui pourrait provoquer un mécontentement social et des manifestations.
En quatrième lieu, au niveau dusecteur énergétique :
Des prix du pétrole plus élevés pourraient stimuler les investissements dans le secteur énergétique tunisien, notamment dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz domestiques. Cependant, l’impact de tels investissements ne se ferait sentir qu’à moyen et long terme.
En cinquième lieu, au niveau Économie mondiale et demande de produits tunisiens :
Si le ralentissement économique mondial, anticipé dans le scénario baissier d’UBS, se concrétise, cela pourrait réduire la demande mondiale pour les exportations tunisiennes, notamment dans les secteurs du textile, de l’agriculture et du tourisme. Une baisse de la demande mondiale pourrait aggraver les problèmes économiques de la Tunisie.
En sixième lieu, au niveau de la transition énergétique :
La prévision à long terme de ralentissement de la demande de pétrole en raison de l’augmentation de l’efficacité énergétique et de l’essor des véhicules électriques souligne l’importance pour la Tunisie de diversifier son bouquet énergétique. Investir dans les énergies renouvelables et améliorer l’efficacité énergétique pourrait atténuer les impacts des fluctuations des prix du pétrole.
Enfin, au niveau de la stabilité géopolitique :
Les perturbations potentielles dans la production de pétrole en raison de tensions géopolitiques, notamment au Moyen-Orient, pourraient accentuer la volatilité des prix. La Tunisie devra surveiller de près ces développements et se préparer à des scénarios de hausse rapide des prix du pétrole.
En tout état de cause, les prévisions de resserrement du marché pétrolier pour le second semestre 2024 présentent plusieurs défis pour la Tunisie, notamment en termes de coût des importations, inflation, dépenses publiques et impacts économiques globaux.
Une approche proactive, axée sur la diversification énergétique et la gestion budgétaire prudente, sera essentielle pour atténuer ces impacts.
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* Dr. Tahar EL ALMI,
Economiste-Economètre.
Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,
Psd-Fondateur de l’Institut Africain
D’Economie Financière (IAEF-ONG)