Comme à son habitude, l’Economiste Maghrébin a organisé le match du mois. Cette fois-ci la rencontre oppose Hatem Mliki, expert en gouvernance et développement régional, à Moez Joudi, président de l’Institut Tunisien des Administrateurs (ITA). Le débat porte sur la nécessité de transformer l’administration tunisienne. Et ce, pour répondre aux attentes des citoyens et des opérateurs économiques. Il se concentre sur la nature de l’administration et les réformes nécessaires dans différents secteurs.
Moez Joudi met en avant l’importance de la transformation plutôt que de simples réformes. Il affirme : « Moi, je préfère parler de transformation. La Tunisie a besoin de transformation. Et celaa fait moins peur. » Il souligne dans ce contexte que l’État doit évoluer pour être au diapason des changements mondiaux et répondre aux besoins des jeunes startups et des grandes entreprises.
Moez Joudi insiste sur la nécessité d’une administration moderne et numérique, adaptée aux avancées comme l’IA générative, qui représente une nouvelle révolution industrielle. Il estime que « l’administration a besoin, d’une manière urgente, et c’est une obligation, ce n’est pas un choix, ce n’est plus une option, c’est une obligation, de changer et de se transformer ».
En revanche, Hatem Mliki met l’accent sur l’importance des services sociaux et dédiés à la population. Tout en soulignant les défis rencontrés pour moderniser les services aux opérateurs économiques depuis les années 1990. Il explique : « C’est mieux de se demander pourquoi cela n’a jamais marché, pourquoi la Tunisie n’a jamais réussi depuis les années 90 à moderniser les services dédiés aux opérateurs économiques. » De ce fait, Hatem Mliki pointe également du doigt l’informalité de l’économie tunisienne et l’opposition de certains acteurs à la réforme de l’administration. En particulier ceux qui ne voient pas de bénéfices immédiats pour eux-mêmes.
Avant d’ajouter : « Maintenir l’administration publique avec les salaires aussi bas et demander en même temps à ce qu’elle soit réformée et qu’elle soit soumise à des critères de performance, cela, on a du mal à le faire accepter auprès des travailleurs. » Il met en avant la nécessité de transparence et de dialogue pour convaincre tous les acteurs de l’importance de ces réformes. Car « dans les salons fermés, personne n’est intéressé réellement à voir cette transformation. »
Pour Moez Joudi, la transformation de l’administration doit inclure une rationalisation des effectifs et des coûts. Il relève le problème de la masse salariale : « Il y a un sureffectif dans l’administration tunisienne. Il y a une masse salariale qui est vraiment colossale et qui est en train de plomber les comptes publics. » D’ailleurs, il critique le fait que cette augmentation de la masse salariale ne s’est pas accompagnée d’une amélioration des services administratifs. En outre, il appelle à une révision des effectifs et des salaires pour améliorer l’efficacité de l’administration.
En conclusion, les deux experts conviennent de la nécessité de transformer l’administration tunisienne; mais avec des approches et des priorités légèrement différentes. Ainsi, Moez Joudi note l’importance de se concentrer sur l’adaptation technologique et la réduction des effectifs. Tandis que Hatem Mliki insiste sur la transparence, le dialogue et la nécessité de considérer les intérêts de tous les acteurs; y compris ceux de l’économie informelle et les salariés de l’administration.
En somme, les deux experts s’accordent sur l’importance de réformer l’administration tunisienne pour qu’elle soit plus efficace et réactive. Mais ils reconnaissent les défis politiques et sociaux qui entravent cette transformation.
Cet article n’est qu’un extrait du Match du mois qui sera disponible dans le prochain numéro du Mag de l’Economiste Maghrébin.