Le 9 juin dernier le président de la France, Emmanuel Macron, à la surprise générale et contre toute attente, a dissous l’Assemblée nationale, rendant « la parole au peuple pour qu’il dise son mot ». Le peuple français a dit son mot en deux temps, se régalant visiblement de jouer avec les nerfs de l’ensemble de la classe politique.
Le 30 juin, les électeurs français ont fait miroiter un chamboulement total du paysage français en plaçant l’extrême droite en tête et en infligeant une défaite au parti présidentiel. L’euphorie était telle dans les rangs de l’extrême droite que Marine Le Pen et Jordan Bardella se disaient prêts à gouverner la France et caressaient l’espoir, bien réel au vu des premiers résultats, d’avoir la majorité absolue, c’est-à-dire 287 députés ou plus. Une euphorie qui tranche avec la déception et la panique qui régnaient à l’Elysée en ce soir du 30 juin.
Le 7 juillet, si la surprise est générale, l’euphorie et la déception ont changé de camp. Douche froide au Rassemblement National qui, au lieu de la majorité absolue espérée, se retrouve en troisième position avec 143 sièges, derrière ‘’Ensemble’’, la coalition macroniste (deuxième avec 168 députés) et le Nouveau Front Populaire (premier avec 182 députés).
Jordan Bardella, un jeune de 29 ans, qui se voyait déjà Premier ministre de la France, n’a pas caché son amertume. Fustigeant ainsi « l’Alliance du déshonneur et les arrangements électoraux dangereux passés par Emmanuel Macron et Gabriel Attal avec l’extrême gauche et qui privent les Français d’une politique de redressement. »
L’excès de langage de Bardella exprime la déception et l’amertume, plutôt que la réalité. Car il n’y a rien de déshonorant quand deux groupes politiques s’entendent sur une procédure de désistement en faveur des candidats les mieux placés pour accroitre les chances de l’emporter face aux candidats d’un troisième groupe. Cet accord de désistement entre l’alliance présidentielle et le Nouveau Front populaire a visiblement très bien fonctionné, faisant ainsi un « barrage républicain » qui a permis d’endiguer la déferlante de l’extrême droite qui a jeté la panique le 30 juin au soir au sein du parti de Macron et dans les rangs de la gauche.
Cela dit, Jordan Bardella a bien raison de souligner que « la dynamique qui porte le RN, qui l’a mis en tête du premier tour, lui a permis de doubler son nombre de députés. » En effet, le Rassemblement National, qui avait 88 députés dans l’Assemblée dissoute, se retrouve avec 143 députés, élargissant ainsi sensiblement sa présence au parlement. Très loin de la majorité absolue qu’il convoitait, certes, mais avec un nouveau record historique dans la longue marche de l’extrême droite vers le pouvoir.
Tout porte à croire que les trois premiers groupes parlementaires qui forment le gros des 577 députés vont passer leur temps à se mettre les bâtons dans les roues dans cette nouvelle législature, tant leurs divergences sont grandes. D’ores et déjà, et bien que le Nouveau Front Populaire (La France insoumise, le Parti socialiste, le Parti communiste et les Verts) ait passé un accord de désistement avec ‘’Ensemble’’ (la coalition de Macron), le chef du NFP, Jean Luc-Mélenchon, a exclu toute négociation avec la coalition présidentielle…
Pourtant, le soir du 9 juin, Macron, expliquant sa décision de dissoudre l’Assemblée, a affirmé : « La France a besoin d’une majorité claire pour agir dans la sérénité et la concorde »… En ce 8 juillet, la France s’est réveillée avec un morcellement et une division sans précédent dans l’histoire de la Ve République, où la concorde et la sérénité désirées sont plus loin encore qu’à la veille de la dissolution.
Que fera le président Macron après la démission de son Premier ministre Gabriel Attal qu’il a nommé il y a à peine six mois? On ne prend pas trop de risques en disant que, tout président qu’il est, il n’en a pas la moindre idée. La situation dans laquelle il se trouve, après sa fatale décision de dissoudre l’Assemblée, est cauchemardesque.