« L’essor de l’économie numérique a des répercussions de plus en plus graves sur l’environnement, entre la consommation d’eau et d’électricité des centres de données et l’épuisement des matières premières », avertit l’ONU. Avec plusieurs exemples pour étayer ses dires.
C’est l’idée qui se dégage d’un rapport publié mercredi 10 juillet 2024 par la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED).
De ce fait, l’organisme onusien appelle à « mettre en œuvre des politiques solides pour renforcer la durabilité de la croissance numérique ». Sachant que « les pays en développement supportent une part disproportionnée des dommages environnementaux ».
Cité dans ledit rapport, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a déclaré que « la numérisation continue d’avancer à la vitesse de l’éclair, transformant les vies et moyens de subsistance ». Toutefois, prévient-il en garde, « un essor non régulé de l’économie numérique risque de laisser de côté une partie de la population et d’exacerber les défis environnementaux ». Cela équivaut à dire que l’humanité ou du moins une partie de l’humanité ne doit pas être esclave des innovations technologies, entre autres du numérique.
Selon l’AFP, M. Guterres fait état des risques d’épuisement des matières premières utilisées pour les technologies numériques, de l’augmentation de la consommation d’eau et d’énergie, de la qualité de l’air et des déchets liés à la numérisation. Il considère que « ces risques sont accentués par les technologies émergentes telles que l’intelligence artificielle ».
Cependant, aujourd’hui on ne dispose que des études ou données éparses concernant l’impact de l’intelligence artificielle sur l’environnement. Et compte tenu de l’existence de doutes sérieux sur la question, Rebeca Grynspan, la secrétaire générale de la CNUCED, « appelle les géants de la technologie à montrer l’exemple en produisant des données standardisées sur le sujet », précise encore l’AFP. Ces déclarations avaient lieu lors d’une conférence organisée pour la présentation dudit rapport.
Emissions poussées par l’IA
D’ailleurs, deux grandes entreprises du numérique, en l’occurrence Google et Microsoft, se sont déjà engagées à parvenir à la neutralité carbone d’ici la fin de la décennie, c’est-à-dire 2030. Seulement, problème, « Google a récemment fait état d’une augmentation de 48 % de ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à 2020, attribuant cette hausse aux centres de données nécessaires au développement de l’intelligence artificielle ».
Idem du côté de Microsoft qui, dans son rapport sur la durabilité, indique «… une hausse de 29% de ses émissions de gaz à effet de serre l’année 2023 par rapport à 2020 ».
Et pour ne rien arranger, la banque d’affaires américaine a publié un rapport en juin dernier dans lequel elle affirme que «… l’essor de l’IA générative va pousser les géants de la technologie à investir quelque 1 000 milliards de dollars durant les prochaines, notamment pour les centres de données, microprocesseurs et infrastructures ». Entendre par-là, des machines qui vont émettre encore plus de gaz à effet de serre.
Dans ce cadre, le responsable des questions de technologie et de logistique à la CNUCED, Shamika Sirimanne, assure que la question de savoir à quoi va servir l’IA n’a pas encore trouvé de réponses. Pour autant, il appelle, avant qu’il ne soit trop tard, à engager cette discussion ».
Toujours dans son rapport, la CNUCED donne plusieurs exemples de dégâts qu’engendre l’économie numérique, rapporte toujours l’agence de presse française.
« En 2020, le secteur des technologies de l’information et de la communication a généré entre 0,69 et 1,6 gigatonne de dioxyde de carbone. Soit environ 1,5 % à 3,2 % du total des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial ».
C’est un niveau équivalent à celui émis par l’ensemble du transport aérien ou du fret maritime.
Exemple, il faut 800 kg de matières premières pour fabriquer un ordinateur de deux kilogrammes, souligne le rapport de la CNUCED. Et ce n’est pas tout, puisque « la demande en minéraux nécessaires à la numérisation, tels que le graphite, le lithium et le cobalt, pourrait augmenter de 500 % d’ici à 2050 ».
Autre exemple de consommation d’énergie : « En 2022, les centres de données ont consommé 460 térawattheures (térawatt-heure = 10 puissance 12 wattheures) d’électricité. Et leur consommation devrait encore doubler d’ici 2026 », précise la même source.
En conclusion, Rebeca Grynspan applaudit certes la venue de la numérisation pour la croissance économique; mais elle estime que « son essor doit être inclusif et durable ».