À la fin juillet 2024, l’économie tunisienne continue de faire face à des défis structurels importants tout en enregistrant certaines évolutions notables.
Sur la base des indicateurs monétaires et financiers quotidiens mis à jour le 26 juillet 2024 par la Banque centrale de Tunisie (https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/indicateurs.jsp), nous retenons les points suivants :
- Solde du compte courant du trésor
– Solde au 24/07/2024 : 1 334,5 MDT
– Variation par rapport au jour précédent : +441,7 MDT
– Variation par rapport à la même date en 2023 : +530,9 MDT.
Commentaire :
Le solde du compte courant du trésor a augmenté de manière significative, indiquant une amélioration de la gestion des liquidités de l’État.
- Solde du compte courant ordinaire des banques
– Solde au 24/07/2024 : 295,2 MDT
– Variation par rapport au jour précédent : -82,7 MDT
– Variation par rapport à la même date en 2023 : +7,2 MDT.
Commentaire :
Le solde du compte courant des banques a diminué légèrement, ce qui peut refléter une augmentation des retraits ou des transferts de fonds.
III. Billets et monnaies en circulation
– Solde au 24/07/2024 : 22 164 MDT
– Variation par rapport au jour précédent : +84 MDT
– Variation par rapport à la même date en 2023 : +1 876 MDT.
Commentaire :
L’augmentation des billets et monnaies en circulation reflète une croissance de la demande en liquidités, souvent liée à une activité économique plus soutenue ou à des besoins accrus de transactions en espèces.
Marché monétaire
– Appel d’offres de la BCT : 4 900 MDT (stable par rapport au jour précédent, mais -3 600 MDT par rapport à 2023)
– Opérations de refinancement à plus long terme (1 mois) : 563 MDT (stable, mais -262 MDT par rapport à 2023)
– Opération d’open market : 8 311,9 MDT (+1800,2 MDT par rapport à 2023)
– Facilité permanente de dépôt à 24h : -643 MDT
– Facilité permanente de prêt à 24h : 1 250 MDT (+450 MDT par rapport à 2023)
– Volume global du refinancement : 14 418,9 MDT (stable par rapport au jour précédent, mais -2 255 MDT par rapport à 2023)
– Taux d’intérêt directeur : 8,00%
– Taux du marché monétaire (TM) : 7,98%.
Commentaire :
La Banque centrale de Tunisie maintient une politique monétaire stricte pour contenir l’inflation. La stabilité des taux d’intérêt et des volumes de refinancement indique une approche prudente de la gestion monétaire.
Bons du Trésor
– Encours Bons du Trésor à court terme : 10 529 MDT
– Encours Bons du Trésor Assimilables : 15 904,2 MDT.
Commentaire :
L’augmentation des encours de Bons du Trésor à court terme (+1 977,4 MDT par rapport à 2023) reflète un recours accru au financement à court terme pour gérer les besoins de liquidités.
Recettes touristiques cumulées
– Recettes au 20/07/2024 : 3393,5 MDT
– Variation par rapport à la même date en 2023 : +205,3 MDT.
Commentaire :
La légère augmentation des recettes touristiques indique une reprise progressive du secteur touristique, bien que des défis persistent.
VII. Revenus du travail cumulés (en espèces)
– Revenus au 20/07/2024 : 4 206,4 MDT
– Variation par rapport à la même date en 2023 : +128,4 MDT.
Commentaire :
Les revenus du travail montrent une augmentation, soulignant l’importance des transferts de fonds des Tunisiens résidant à l’étranger.
VIII. Service de la dette extérieure cumulée
– Service de la dette au 20/07/2024 : 9 062 MDT
– Variation par rapport à la même date en 2023 : +3 688,2 MDT.
Commentaire :
Le service de la dette extérieure a considérablement augmenté, ce qui reflète une charge accrue sur les finances publiques.
Avoirs nets en devises de la BCT
– Avoirs au 24/07/2024 : 24 614,4 MDT
– Nombre de jours d’importation : 112 jours.
Commentaire :
Les avoirs nets en devises ont légèrement diminué par rapport au jour précédent, mais restent relativement stables, indiquant une certaine résilience des réserves en devises.
Taux de change du dinar
– 1 dollar US : 3,09777 TND
– 1 euro : 3,36571 TND
– 1000 yens japonais : 19,91090 TND
– 10 dirhams marocains : 3,15680 TND.
Commentaire :
Le dinar tunisien montre une relative stabilité par rapport aux principales devises, bien que des fluctuations mineures soient observées.
De l’analyse des principales évolutions macroéconomiques et financières de la Tunisie à 26 juillet 2024, nous pouvons retenir :
Croissance économique
PIB et croissance :
La croissance économique de la Tunisie reste modérée, avec une prévision de croissance annuelle du PIB autour de 2.5% pour 2024. Cette croissance est freinée par des contraintes structurelles, notamment un secteur public lourd et inefficace, ainsi que des réformes économiques retardées.
Secteurs clés :
Le secteur agricole a montré des signes de reprise grâce à des conditions météorologiques favorables, bien que les défis liés à la gestion de l’eau et à l’infrastructure agricole persistent. L’industrie manufacturière et le secteur des services, en particulier le tourisme, continuent de se redresser après les perturbations causées par la pandémie de COVID-19.
Marché du Travail
Chômage :
Le taux de chômage demeure élevé, oscillant autour de 16%, avec un chômage des jeunes particulièrement préoccupant. Les initiatives pour stimuler l’emploi, notamment à travers des programmes de formation professionnelle et des incitations à l’entrepreneuriat, peinent à produire des résultats tangibles à court terme.
Inflation et politique monétaire
Inflation :
L’inflation reste une préoccupation majeure, avec un taux d’inflation avoisinant les 8%. Cette inflation est en grande partie alimentée par la dépréciation du dinar tunisien et les hausses des prix des produits alimentaires et de l’énergie.
Banque centrale :
La Banque centrale de Tunisie a maintenu une politique monétaire prudente, visant à contrôler l’inflation tout en soutenant la croissance. Cependant, la marge de manœuvre est limitée en raison des pressions inflationnistes et des contraintes budgétaires.
Finances publiques
Déficit budgétaire et dette :
Le déficit budgétaire reste élevé, estimé à environ 6% du PIB pour 2024, aggravé par une dette publique croissante qui approche les 90% du PIB.
Les réformes fiscales et les efforts pour élargir la base fiscale progressent lentement, malgré les pressions de la communauté internationale, notamment du FMI.
Réformes structurelles :
Les réformes structurelles recommandées par le FMI et la Banque mondiale, y compris la réduction des subventions énergétiques, la réforme de la fonction publique et l’amélioration du climat des affaires, sont cruciales pour la stabilité financière à long terme. Cependant, leur mise en œuvre est souvent retardée par des considérations politiques et sociales.
Secteur financier
Système bancaire :
Le système bancaire tunisien reste fragile, avec un taux élevé de créances douteuses. Les efforts de recapitalisation et de réforme du secteur bancaire se poursuivent, mais la confiance dans le secteur financier reste faible.
Investissements étrangers :
Les investissements étrangers directs (IED) montrent une légère augmentation, soutenue par des initiatives gouvernementales visant à améliorer l’environnement des affaires. Toutefois, la perception des risques politiques et économiques continue de freiner les flux d’IDE.
Commerce extérieur
Balance commerciale :
La balance commerciale demeure déficitaire, avec une dépendance significative aux importations de biens de consommation et d’énergie. Les exportations, bien que en croissance, notamment dans les secteurs des textiles et des produits agricoles, ne suffisent pas à combler ce déficit.
Perspectives à court et moyen terme
À court terme :
Les perspectives à court terme restent marquées par des défis liés à la stabilisation macroéconomique et à la gestion de l’inflation. Les mesures de soutien à l’emploi et de stimulation de l’investissement privé seront cruciales pour un redressement économique plus robuste.
À moyen terme :
À moyen terme, la réussite des réformes structurelles sera déterminante pour assurer une croissance durable et inclusive. L’engagement continu avec les institutions internationales et la mise en place de politiques économiques cohérentes et transparentes seront essentiels pour restaurer la confiance des investisseurs et stabiliser l’économie tunisienne.
À la fin juillet 2024, l’économie tunisienne se trouve à un moment décisif. Il est impératif de renforcer les efforts de réforme et de stabilisation pour surmonter les défis actuels et orienter le pays vers une croissance durable.
En somme, bien que la Tunisie montre des signes de stabilité dans certains domaines, tels que la gestion des liquidités et les réserves en devises, elle continue de faire face à des défis majeurs, notamment une inflation élevée, un chômage persistant et une dette publique croissante. Des réformes structurelles et une gestion rigoureuse des finances publiques sont essentielles pour améliorer durablement la situation économique.
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* Dr. Tahar EL ALMI,
Economiste-Economètre.
Ancien Enseignant-Chercheur à l’ISG-TUNIS,
Psd-Fondateur de l’Institut Africain
D’Economie Financière (IAEF-ONG)