Excellente nouvelle pour Addis-Abeba dans sa crise de dettes. Elle pourra bénéficier d’un allègement des remboursements allant jusqu’à 4,9 milliards de dollars si elle mène à bout son plan de restructuration actuel.
Le pays le plus peuplé de l’Afrique de l’Est a remis sur les rails sa restructuration de la dette, longtemps retardée, après avoir obtenu un nouveau programme de financement du Fonds monétaire international (FMI).
Le passage obligatoire par la dévaluation de la monnaie
Des négociations sont en cours avec les différents pays créanciers et seraient finalisées au cours des prochains mois. Ce sont effectivement ces pourparlers qui vont permettre de réaliser les économies envisagées. Le nouveau projet de la loi de finances 2024-2025 comprendrait des économies de 200 millions de dollars, provenant de la restructuration de son eurobond d’un milliard de dollars. La dette extérieure totale de l’Ethiopie totalisait 28,38 milliards de dollars en mars 2024.
Politiquement, il faut donner de l’espoir à une population qui a payé cher le passage, cette semaine, à un taux de change libre. A l’instar de l’Egypte, l’idée est de combler l’écart entre le taux officiel et le taux du marché parallèle.
La Banque centrale d’Ethiopie a autorisé le birr à flotter librement lundi 29 juillet, remplissant ainsi une condition essentielle pour obtenir le soutien financier du Fonds monétaire international (FMI) et d’autres créanciers dont la Banque mondiale.
Conséquence : la monnaie locale a, depuis, perdu 31,5% par rapport au dollar, pour s’échanger à 83,94 pour un dollar.
L’impact inflationniste de cette démarche est indiscutable. Les ménages, majoritairement à faible revenu, ont souffert des hausses des prix et ne voient pas comment la dévaluation déguisée de la monnaie pourrait aider le secteur privé à apporter une plus grande contribution à l’économie et à stimuler la croissance à long terme.
Tunis avait bien raison
Ce que nous sommes en train de voir, un peu partout dans le continent africain, confirme les soucis de la Tunisie quant à cette politique de dépréciation de la monnaie nationale. Bien que nous n’ayons pas de marché noir de devises au vrai sens du terme, et qu’il n’y a quasiment pas d’écart avec le prix officiel, un passage brusque peut secouer le dinar. C’est un effet plus psychologique qu’économique.
L’impact d’une telle politique serait catastrophique sur l’inflation, le budget et la dette. N’oublions pas qu’une dépréciation du dinar de 1% vis-à-vis des devises étrangères augmentera l’encours de la dette publique de 837 MTND.
L’expérience égyptienne a montré que pour un pays qui subventionne les matières de base, passer en un système de change flottant est une erreur, surtout dans un contexte fortement inflationniste. Maintenant, nous allons suivre de près l’expérience éthiopienne qui pourrait être meilleure, mais il faut juste se rappeler qu’une guerre pourrait éclater aux environs, à tout moment, et dont les conséquences seraient lourdes.
De point de vue théorique, rien ne vaut un système économique libre. Toutefois, le poids des variables sociales est plus important lorsqu’on fait de la politique. Qui peut vendre une meilleure croissance dans 5 ans à un chef de famille qui cherche à nourrir, ce soir, ses enfants ? Parfois, il faut être pragmatique même si on est profondément libéral.