Les derniers chiffres de la Banque centrale de Tunisie indiquent que le niveau des réserves en devises se situe à 113 jours d’importations, largement supérieur au seuil des 90 jours. Le suivi du niveau de ces réserves est crucial, car maintenir un niveau confortable est déterminant pour garantir suffisamment de liquidités en monnaie étrangère pour faire face aux paiements extérieurs et à d’éventuels chocs. Certes, les réserves ont toujours été maintenues à un niveau stable, mais cette stabilité demeure précaire en raison des fragilités persistantes de l’économie tunisienne.
La croissance économique reste anémique, avec seulement 0,2% au premier trimestre 2024. Elle reflète l’essoufflement de l’appareil productif et l’attentisme qui pèse sur le monde des affaires. Comme le montre la faiblesse de l’investissement dans les industries énergétiques (une chute des exportations de 30,4%) et les industries manufacturières (une baisse des exportations de 9,2%).
En effet, même si les exportations ont légèrement augmenté cette année (2,2%), soutenues par l’industrie agroalimentaire (huile d’olive), elles sont restées en deçà des résultats enregistrés en 2023 (10% selon l’INS).
Les transferts des Tunisiens résidents à l’étranger (TRE) demeurent résilients. Les TRE ont continué d’alimenter les réserves en devises de la Tunisie. Du potentiel sous-exploité à cause de la rigidité de la réglementation de change et de la tarification exorbitante des transferts. Toutefois, les change- ments observés ces dernières années dans les stratégies de placements des avoirs des TRE dans les pays d’accueil pourraient devenir à terme menaçants pour le niveau des flux.
Le secteur touristique sous la contrainte du dérèglement climatique. La bonne saison touristique a permis de soutenir les réserves. Toutefois, la dégradation de la qualité du service dans les hôtels et l’érosion des plages tunisiennes restent les principales menaces du secteur. En effet, selon le rapport de la Banque mondiale, le taux d’érosion des côtes en Tunisie serait de 0,64 mètre par an, loin du Maroc avec 0,14 mètre et surtout de la moyenne mondiale qui serait de 0,07 mètre.
La compression des importations ces derniers mois a bien permis d’atténuer les pressions sur les réserves de change, mais une telle politique n’est pas soutenable à moyen terme. Bref, sans un assainissement du climat des affaires et sans une stratégie pour une amélioration de la résilience du tourisme, les réserves de change demeureront sous pression.
Par Noura Harboub-Labid
Cet article est disponible dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 900 du 31 juillet au 28 août 2024