La production de films à petit budget, entre contraintes et défis, a été au centre de discussions lors d’un panel organisé au Centre culturel international de Hammamet dans le cadre de la manifestation « Ecrans de Hammamet » qui se tient depuis le 5 août, et se poursuit jusqu’au 11 courant et s’intéressant au cinéma et à l’art vidéo, mettant en lumière la production cinématographique à petit budget et les nouvelles tendances du secteur.
Pour encourager les producteurs et réalisateurs à créer des films auto-produits avec un budget réduit, le panel intitulé « La production cinématographique à petit budget : une contrainte ou une liberté ? » a réuni aussi bien la nouvelle génération que l’ancienne en présence des réalisateurs Habib Mestiri, Abdelhamid Bouchnak, Abdallah Yahia et Ibrahim Letaief.
La rencontre a été l’occasion pour chacun de parler de son expérience face à cet enjeu et débattre à l’unisson des moyens possibles dans le monde du cinéma à petit budget surtout que la plupart des films tunisiens, qui sont considérés comme des références importantes dans l’histoire du cinéma tunisien, ont été produits avec des budgets réduits et que les films les plus réussis ne reposaient pas sur des budgets colossaux mais plutôt sur la pertinence de tout un processus depuis l’idée au scénario en passant par la mise en scène jusqu’au jeu des acteurs qui repose sur la passion à la base.
Créer un film avec des moyens limités se fait souvent dans un contexte où la passion prime sur le budget d’où se révèle la vraie créativité et c’est cette capacité à se débrouiller qui demeure fondamentale pour réussir. De ce fait, les défis liés aux budgets restreints ne sont pas des obstacles, constate la majorité des présents, mais des tremplins pour l’innovation et l’expression créative. C’est une invitation à explorer l’art du possible, à repousser les frontières de la narration cinématographique et à découvrir de nouvelles façons de captiver le public. Cette approche exige des cinéastes une persévérance et une ingéniosité remarquables, les incitant à tirer le meilleur parti de chaque ressource et à trouver des solutions uniques pour chaque défi rencontré.
Cela dit, il est difficile aujourd’hui encore de parler d’une véritable industrie cinématographique tunisienne, notamment à la lumière de la faiblesse des subventions allouées au cinéma par le ministère des affaires culturelles, de la réticence des sponsors et des bailleurs de fonds à financer la production cinématographique et de l’absence de grandes sociétés de production en Tunisie.
Pour Abdelhamid Bouchnaq, bien que le cinéma tunisien soit présent dans les grandes manifestations et festivals de cinéma du monde et largement récompensé de prestigieux prix, l’Etat n’accompagne pas comme il se doit l’évolution de ce cheminement culturel et artistique tunisien et n’accorde pas au cinéma l’importance suffisante qu’il mérite en terme de soutien des réalisateurs pour les aider à réaliser des films à la hauteur de leurs rêves et de leurs ambitions.
C’est pourquoi, a-t-il expliqué, il est temps aujourd’hui de réviser le budget réservé au cinéma tunisien, qui n’a pas été actualisé depuis les années 1990.
Face aux contraintes budgétaires, et pour remédier à ce problème, plusieurs cinéastes aujourd’hui ont tendance à s’orienter vers le cinéma mobile encouragés par le développement des plateformes de diffusion de films et de l’émergence de festivals internationaux de « Mobile Movie ».
De l’avis de la majorité, le réalisateur, le scénariste et le producteur sont aujourd’hui appelés, face au manque des ressources financières, à s’adapter à cette réalité « difficile » et à rechercher des solutions innovantes permettant de réduire le coût de production, notamment en réalisant la difficile équation entre le scénario et le budget surtout que plusieurs expériences ont démontré que c’est pas le budget colossal qui fait des films à succès, et que le succès d’un film même avec des moyens très limités dépend de l’habilité à tisser des histoires fascinantes réussissant à toucher le public avec une authenticité profonde.
De ce fait, les contraintes budgétaires ne doivent pas être un obstacle pour les réalisateurs, en particulier les jeunes cinéastes, appelés plus que d’autres à innover, pour réaliser des films pouvant être diffusés sur de nombreuses plateformes numériques, ce qui peut leur apporter succès et renommée, et leur ouvrir la porte pour obtenir par la suite des financements, prouvant ainsi que grâce à la flamme de la passion dotée d’approches innovantes, il est possible de créer des œuvres cinématographiques remarquables, même avec un budget restreint.
Avec TAP