Au Maghreb, comme pour les pays émergents, les réserves en devises principalement en dollars américains ou en euro- véritables baromètres de la santé économique d’un pays- servent à stabiliser la monnaie nationale, faciliter les échanges internationaux et assurer la liquidité en cas de crise économique. De plus, en cas de dépréciation de la monnaie locale, elles permettent d’intervenir sur le marché pour maintenir sa valeur. Elles jouent également un rôle clé dans la gestion de la dette extérieure. Enfin, de solides réserves en devises sont souvent perçues comme un gage de stabilité financière pour les pays en voie de développement.
Et c’est incontestablement l’Algérie qui se targue de posséder le plus confortable coussin de sécurité en devises, avec des réserves de près du double de celles du Maroc. Notre voisin de l’Ouest est talonné par la Libye, alors que la Tunisie ferme la marche.
L’Algérie distance ses voisins
Ainsi, selon les chiffres de la Banque centrale algérienne (BA) publiés en juin dernier, les réserves de change de l’Algérie ont atteint 68,9 milliards de dollars à la fin de l’année 2023; contre 60,9 milliards de dollars à la fin de 2022. Ce montant exclut les réserves d’or, précise un rapport de la Banque centrale publié en juin dernier.
« Ce niveau de réserves de change, largement supérieur au minimum recommandé par les normes internationales, témoigne de la solidité de la position extérieure de l’Algérie », se réjouit le même rapport.
La BA énumère notamment le « fort ralentissement de l’inflation, le taux de croissance appréciable du PIB, les excédents de la balance des paiements »; ainsi que « l’accumulation accrue des réserves de change ».
Selon les observateurs, cette accumulation de devises s’apparente à un matelas de sécurité financier qui offre au pays une marge de manœuvre appréciable pour financer ses importations et soutenir sa monnaie nationale. Tout en lui conférant une certaine indépendance vis-à-vis des marchés financiers internationaux.
La résilience du Maroc
Avec les actifs de réserve officiels de 359,4 milliards de dirhams, soit environ 36,6 milliards de dollars, une augmentation principalement due à un financement extérieur net du Trésor de 35 milliards de dirhams, le Maroc se hisse en en deuxième position avec une hausse de ses réserves de change de 6,4 % en 2023 par rapport à l’année précédente. C’est ce que révèle le rapport annuel de Bank Al-Maghrib publié le 31 juillet dernier.
Cette progression de 6,4 % s’explique par une gestion prudente des finances publiques et une audacieuse stratégie de diversification économique. Ainsi, grâce à ses atouts touristiques et industriels, le royaume chérifien a réussi à consolider sa position financière et à renforcer sa capacité à attirer les investissements étrangers et à financer ses projets de développement.
Les réserves de change de la Libye portée par le secteur pétrolier
En dépit des défis politiques et sécuritaires auxquels elle fait face, la Libye occupe la troisième place des réserves de change des pays du Maghreb grâce au secteur pétrolier, principale source de devises du pays. Selon le gouverneur de la Banque centrale de Libye (CBL), les réserves de change de la Libye s’élevaient au 1ᵉʳ mars 2024 à environ 29 milliards de dollars. Mais il note que ce chiffre « est inférieur aux besoins de l’économie libyenne ».
Tunisie : une bouffée d’oxygène
Et la Tunisie dans tout cela?
A l’instar de l’Algérie et du Maroc, les réserves de change de la Tunisie en 2024 ont également connu une hausse par rapport à l’année précédente, se hissant à 24,3 milliards de dinars tunisiens soit l’équivalent de 7,8 milliards de dollars. Un montant bien modeste en comparaison avec ses riches voisins mais qui offre quand même une bouffée d’oxygène dans un contexte de pressions financières étouffante.
Le rapport de la BCT publié début juillet 2024, souligne que cette augmentation, d’environ 1,4 milliard de dinars (452 millions de dollars) par rapport à l’année précédente, permet de couvrir 111 jours d’importations, soit un jour de plus que précédemment.
Soulignons enfin que selon les données de la Banque mondiale, les transferts des Tunisiens à l’étranger en devises- la communauté tunisienne à l’étranger est estimée à plus d’un million 800 mille Tunisiens, ce qui représente 15 % de la population totale de la Tunisie- ont atteint 2,7 milliards de dollars en 2023. Ces transferts ont augmenté de 3,5 % en glissement annuel depuis le début de 2024 jusqu’à la fin du 10 juin dernier, selon le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie.
Les recettes touristiques, quant à elles, ont atteint 4,1 milliards de dinars, au 10 août 2024, contre 3,9 milliards de dinars, à la même date de l’année dernière.
A noter également que ces recettes avaient enregistré une hausse significative au cours des cinq premiers mois de 2024, atteignant 2,1 milliards de dinars, soit une augmentation de 7,8 % par rapport à la même période de l’année précédente.
Faut-il interpréter cette progression des réserves comme les prémices d’un frémissement de l’économie tunisienne? Croisons les doigts!