Alors que le conflit israélo-palestinien est devenu l’une des priorités pour les électeurs américains, la candidate démocrate à l’élection présidentielle, Kamala Harris, soucieuse de concilier le vote juif et celui arabe et musulman, joue à l’équilibriste sur une corde raide.
C’est l’heure de vérité pour Kamala Harris. Alors que la convention démocrate à Chicago devrait officialiser, jeudi 22 août, sa candidature à l’élection présidentielle, la vice-présidente de Joe Biden est confrontée à un terrible dilemme : comment concilier d’une part le vote juif – environ 7,5 millions de personnes, soit 2 % de la population – et le vote arabe et musulman – qui représente 3,5 millions de personnes, soit seulement 1 % de la population totale du pays. Et ce, alors que le conflit israélo-palestinien s’invite avec insistance au cœur du débat dans la course à la Maison Blanche, au point de devenir l’une des priorités pour les électeurs américains.
Mea culpa
D’ailleurs, face aux milliers de personnes venues manifester lundi 19 août sur les bords du lac Michigan pour dénoncer le soutien indéfectible de l’actuelle administration américaine à la guerre génocidaire menée par l’Etat hébreu contre le Hamas dans la bande de Gaza, Joe Biden, l’ami de toujours d’Israël, a fini par admettre que « ces manifestants ont des arguments à faire valoir. Beaucoup de personnes innocentes ont été tuées, des deux côtés », a-t-il concédé lorsqu’il est monté sur scène lundi soir pour réitérer son soutien à Kamala Harris, à l’occasion de la tenue de la grande messe de la convention démocrate à Chicago.
Le poids déterminant des votes juifs et arabes
Il convient de rappeler à ce propos que lors du scrutin présidentiel aux Etats-Unis, le poids des minorités arabes et juives prend une place prépondérante.
En effet, le couronnement de Kamala Harris, en quelque sorte, et la suite de sa campagne électorale sont étroitement liés au conflit du Proche-Orient. Et aux votes juif et arabe aux États-Unis.
Ainsi, le système fédéral américain fait de ces communautés un électorat qui fait la différence dans certains États-clés, les « swing states ». Comme dans le Michigan, où la minorité arabo-américaine, forte de quelque 310 000 électeurs, représente environ 5,6 % des personnes appelées aux urnes dans cet État du Midwest.
Et c’est probablement pour ces considérations que Kamala Harris s’est abstenue de prendre le gouverneur de Pennsylvanie Josh Shapiro sur le ticket démocrate, car il est jugé trop proche d’Israël. Il avait finalement été écarté au profit de Tim Walz.
Pour rappel, lors du récent entretien avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, Kamala Harris avait exprimé sa « vive inquiétude » concernant la situation humanitaire à Gaza, et avait fait la promesse de ne pas rester « silencieuse » face aux souffrances des civils dans l’enclave palestinienne en insistant sur la nécessité de conclure un accord de paix sans tarder.
« Des images d’enfants morts et de personnes désespérées et affamées fuyant pour se mettre à l’abri, parfois déplacées pour la deuxième, troisième ou quatrième fois. Nous ne pouvons pas détourner le regard face à ces tragédies. Nous ne pouvons pas nous permettre de devenir insensibles à la souffrance et je ne me tairai pas », s’était- elle écriée.
Le cauchemar de Bibi
Et c’est pour sa supposée « sympathie » pour le drame palestinien que le scénario d’une Kamala Harris, trônant dans le Bureau Ovale, représente un vrai cauchemar pour le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu. Lequel il semble prendre fait et cause pour l’adversaire d’Harris, l’ex-président Donald Trump.
Mais, peut-il se fier au républicain erratique qui déclara, quand le Premier ministre israélien donnait un coup de téléphone de félicitation à Joe Biden pour les dernières élections : « J’aime toujours Bibi (le diminutif de Benjamin Netanyahou, NDLR), mais j’aime surtout la loyauté. Et il a commis une grave erreur ». Ou quand le milliardaire républicain constata que « pratiquement tous les otages sont morts. Il faut arrêter le massacre à Gaza ».
D’ailleurs, plusieurs commentateurs en Israël sont persuadés que si la candidate démocrate était élue en novembre prochain, le cher « Bibi » n’aurait d’autre choix que de quitter la vie politique.
D’autre part, rappelons au final que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, vient de qualifier la situation à Gaza de « désastre total ». Alors que depuis le début de la guerre contre le Hamas, en octobre 2023, plus de 39 000 Palestiniens ont été tués à Gaza.
« Nous sommes dans une situation d’anarchie totale. Une situation où la loi et l’ordre ont complètement disparu. Personne n’est en charge de la sécurité dans la région de Gaza. Nous voyons donc des convois pillés à tout moment », déplorait le diplomate onusien.