Khelil Chaibi ne fait pas mystère de son projet. Il veut faire du partenariat industriel tuniso-français le point focal pour stimuler et entretenir la dynamique des IDE. Vision d’autant plus pertinente que la mondialisation n’est plus ce qu’elle était, qu’elle se régionalise, mettant ainsi en perspective une recomposition des chaînes de valeurs. Tout va donc pour le mieux dans l’univers serein de la CTFCI ? Le bilan est à la hauteur des promesses et de l’engagement. Reste à procéder à des réglages souvent fins pour desserrer le carcan de la bureaucratie, généraliser la digitalisation, faciliter la vie des entreprises et pas que celles affiliées à la Chambre, bref, à lever freins et obstacles qui n’ont plus cours chez nos compétiteurs, à l’heure de la globalisation et de l’IA. La Chambre, très à l’écoute de ses adhérents, est dans son rôle quand elle s’évertue à se faire entendre par les autorités concernées qui, aux dires de Khelil Chaibi, n’en sont pas moins à son écoute. Encore un effort ? Il n’est jamais de trop.
Pouvez-vous nous parler des principaux partenariats et collaborations de votre Chambre ? Comment contribuent-ils au développement économique de la Tunisie ?
Nous entretenons des relations étroites et fructueuses avec les autres Chambres mixtes, qui représentent collectivement plus de 5 000 entreprises adhérentes. Cette synergie s’étend également à des partenaires clés tels que le Conseil International des Femmes Entrepreneures (CIFE), le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), l’Institut Arabe des Chefs d’Entreprises (IACE), l’Association des Tunisiens des Grandes Ecoles (ATUGE), et la Tunisia Africa Business Council (TABC).
À cela s’ajoute notre collaboration avec la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT), et je tiens à saluer en particulier le dynamisme d’Aslan Berjeb et Tarek Cherif. Grâce à leur leadership, ils ont non seulement orchestré une transition démocratique exemplaire au sein de l’organisation, mais mis également un point d’honneur à instaurer et promouvoir la parité au sein de leur comité exécutif. Nous collaborons également avec des institutions stratégiques telles que la Tunisian Investment Authority (TIA), la Foreign Investment Promotion Agency (FIPA), le Centre de Promotion des Exportations (CEPEX), et l’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation (APII). Ces entités sont membres honoraires de notre Chambre et leur présence témoigne de notre volonté de renforcer les liens institutionnels pour promouvoir l’attractivité et la compétitivité de la Tunisie sur la scène internationale.
Quels sont les arguments qui militent en faveur du site Tunisie? Est-il aussi performant et aussi attractif qu’on voudrait qu’il soit? Soutient-il la comparaison avec le site marocain ?
En dépit des défis d’une conjoncture internationale incertaine, la Tunisie demeure un site attractif et compétitif pour les affaires. Sa position stratégique en Méditerranée, conjuguée à des avantages en termes de compétitivité prix et hors prix, continue de séduire les investisseurs étrangers. Le pays se distingue également par la qualité de sa maind’œuvre, en particulier ses diplômés et ingénieurs, très sollicités pour leur haut niveau de compétence et leur formation rigoureuse dans des domaines techniques et technologiques. Ces talents constituent un atout de taille pour les entreprises cherchant à innover et à se développer. Les récentes réalisations en matière d’investissements extérieurs montrent clairement l’intérêt croissant des opérateurs économiques pour la Tunisie, notamment dans des secteurs à forte valeur ajoutée comme le numérique, l’aéronautique, la biotechnologie et les énergies renouvelables. Les entre- prises étrangères présentes en Tunisie réinvestissent et renforcent leur présence, contribuant ainsi à la création de richesses.
Comparée au Maroc, la Tunisie conserve des atouts indéniables, notamment sa compétitivité en termes de coûts, sa proximité culturelle et linguistique avec l’Europe, et la qualité de ses ressources humaines. Cependant, dans un contexte de concurrence internationale de plus en plus vive, ces seuls facteurs ne suffisent plus. Il est crucial d’améliorer l’environnement des affaires, en assouplissant et digitalisant les procédures administratives, en stabilisant le cadre fiscal et en modernisant les infrastructures logistiques. Promouvoir la Tunisie comme un site d’exportation de haute technologie et de relocalisation est également une priorité.
En résumé, la Tunisie reste un choix attractif pour les IDE, mais des efforts constants sont nécessaires pour renforcer son positionnement face à des concurrents régionaux comme le Maroc et pour pérenniser son attractivité dans un monde en constante évolution.
Que diriez-vous aux entreprises, françaises notamment, pour les attirer en Tunisie et venir renforcer vos effectifs ?
Pour attirer les entreprises françaises en Tunisie et renforcer nos effectifs, il est essentiel de présenter une stratégie de communication adaptée qui dissipe toute velléité d’attentisme ou de doute. Au-delà d’un seul argument, il s’agit de diffuser un message de confiance et de rassurer la communauté d’affaires, en France comme ailleurs, sur les nombreux avantages qu’offre une implantation en Tunisie.
La Tunisie dispose d’atouts indéniables: une main-d’œuvre hautement qualifiée, notamment dans les domaines techniques et technologiques, des coûts compétitifs, une position géographique stratégique au carrefour de l’Europe, de l’Afrique et du Moyen-Orient, et un cadre juridique et fiscal favorable aux investissements étrangers. Mais ce sont les success stories qui parlent le mieux pour convaincre : de grands groupes français tels que SAGEMCOM, SAFRAN, Aérolia, ACTIA Engineering et Valéo ont, non seulement trouvé en Tunisie un environnement d’affaires propice, mais gagné également en compétitivité et en performance grâce à leur implantation dans notre pays.
Ces entreprises témoignent de la qualité de l’environnement des affaires en Tunisie et de la valeur ajoutée des ressources humaines locales. Elles ont pu, grâce à leur choix stratégique d’investissement en Tunisie, consolider leurs performances et renforcer leur positionnement sur les marchés mondiaux. Investir en Tunisie, c’est bénéficier d’un écosystème dynamique, de talents reconnus pour leur compétence et d’un cadre économique en pleine transformation, prêt à accueillir et accompagner les entreprises à chaque étape de leur développement : c’est cette réalité concrète qu’il faut mettre en avant. En somme, investir en Tunisie représente une opportunité unique pour les entreprises françaises de renforcer leur compétitivité et de s’implanter durablement dans un marché en croissance, tout en contribuant à un partenariat économique solide et mutuellement bénéfique.
Propos recueillis par Hédi Mechri et Mohamed Ali Ben Rejeb
Cette interview est disponible dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 902 du 11 au 25 septembre 2024