Elyes Kasri, analyste politique et ancien ambassadeur est revenu sur la commémoration du 61 ème anniversaire de l’évacuation en exprimant ses inquiétudes face aux enjeux migratoires contemporains.
Selon Elyes Kasri, cette commémoration retrouve sa signification originelle. Car il est essentiel que la Tunisie trouve un équilibre entre sa souveraineté nationale et les réalités humanitaires auxquelles elle est confrontée.
Vous trouverez ci dessous le post d’Elyes Kasri:
« Il semble difficile pour de nombreux tunisiens de se réjouir de la commémoration de la victoire chèrement acquise en juillet 1961 pour voir le dernier soldat de la puissance coloniale quitter le sol national le 15 octobre 1963 alors que des inquiétudes se font de plus en plus lancinantes au sujet du nombre croissant de subsahariens qui arrivent avec une facilité déconcertante à atteindre la Tunisie et y entrer pour se retrouver dans la quasi impossibilité de poursuivre leur chemin vers leur destination finale en Europe tant par la vigilance de nos gardes côtes qu’en vertu d’accords ou d’ententes avec des parties européennes dont certaines clauses semblent susciter des inquiétudes et des interprétations diverses.
Le sentiment de s’être débarrassé de la présence coloniale française le 15 octobre 1963 a donné lieu depuis plus d’une décennie à l’impression douloureuse d’une colonisation ou pour le moins à une vassalisation rampante avec des séquences de visibilité frôlant l’arrogance et l’insulte à l’image de ce roitelet qui prétendait apprendre au président de la république tunisienne a marcher.
La fête de l’évacuation reprendra son sens et sa saveur lorsqu’une solution juste sera trouvée pour éviter de faire de la Tunisie un terminus ou un centre de rétention de centaines de milliers et peut être bientôt de millions de subsahariens fuyant la misère dans leurs pays d’origine et qu’elle saura se mettre à l’abri de la générosité, pas si désintéressée que certains le prétendent et même possiblement mal intentionnée, de certains “frères” et “amis”.
L’indépendance et la souveraineté nationales aussi imparfaites puissent elles paraître pour certains en raison des vicissitudes de l’histoire et de la géopolitique sont un legs précieux à passer aux prochaines générations.
Honorer la mémoire des martyrs de l’indépendance et de l’évacuation totale du territoire national par les forces coloniales devrait être un serment et un engagement sur l’honneur que la Tunisie restera éternellement indépendante et souveraine, libre de ses choix et de ses décisions et seule maîtresse de son destin. »