Certes, ce mois d’octobre est lié à la lutte contre le cancer du sein mais, hélas, ce fléau touche femme, enfant et homme sans exception et peut se manifester en plusieurs types. Haythem Kilani, avocat livre son témoignage via sa page officielle Fb:
« Personnellement, je suis concerné et par le mois d’octobre et par le cancer puisque ce même 25 octobre de l’année dernière fut l’un des plus importants jours de ma vie dans la pire année de ma vie !!
C’était le jour de ma dernière séance de chimiothérapie qui a duré plusieurs mois suite à la découverte d’un cancer du sang en stade 2 au printemps.
Pour moi et pour mes plus proches, c’était la nouvelle la plus inattendue du monde surtout que je suis sportif depuis mon plus jeune âge avec une carrière d’handballeur de haut niveau dans plusieurs équipes civiles surtout à l’Espérance Sportive de Tunis ainsi qu’au sein des équipes nationales jeunes toutes catégories confondues puis en jouant au Foot avec mes confrères avocats..
Le sport a toujours fait partie de ma vie, de mon quotidien, c’est ma drogue.
C’est pour vous dire que ni le sport en continu ni mon hygiène de vie ne m’ont permis d’éviter cette fâcheuse maladie.
Par contre, ça m’a servi pour l’affronter et la vaincre grâce à Dieu.
Quand on apprend une telle nouvelle on est sous le choc et cet état dure quelques jours puis arrive la phase d’acceptation et de préparation physique et mentale.
Personnellement, étant père de deux jeunes enfants, je ne pouvais guère me permettre de paraître triste ou choqué ou affaibli ou démoralisé car malgré ma souffrance intérieure et le doute permanant dans lequel j’étais, j’ai dû être fort et le montrer.
Ce fut une période difficille puisque je devais passer vite à l’étape suivante ; celle de l’acceptation de la maladie.
Évidemment chacun gère ce genre d’événement à sa manière, personnellement grâce à ma foi en Dieu j’ai pu accepter ce qui m’arrivait assez rapidement, je me suis dit c’est sa décision, c’est mon sort, c’est ma destinée et je ne peux y échapper..
Sincèrement, j’ai utilisé une méthode qui était efficace avec moi, c’est celle de me dire « heureusement que c’est arrivé à moi et non pas à l’un de mes enfants, je préfère de loin souffrir et affronter cette maladie que de voir l’un de mes plus proches en souffrir, ça aurait été insoutenable !! »
D’ailleurs je n’arrêtais pas de penser à mes enfants, c’était obsessionnel, je voulais les préparer à l’étape suivante, à me voir chauve, maigri, pas en forme, eux qui m’ont toujours vu depuis leur naissance en grande forme, très sportif, très actif alors je suis allé me couper les cheveux moi qui aimait les garder un peu longs tout le temps comme ça il n’y aura pas une grande transition suite aux éventuels effets secondaires de la chimiothérapie.
Justement, mon médecin traitant m’avait annoncé que je devais suivre une cure de chimiothérapie pendant quelques mois et voir le résultat après pour décider de la suite.
Inutile de m’attarder sur les difficultés rencontrées pour diagnostiquer parfaitement mon cancer puisqu’à Tunis il n’y a qu’un seul PET SCAN, c’est l’appareil qui donne avec exactitude parfaite où se trouve la maladie dans le corps, et par malchance cet appareil était en panne pendant quelques jours donc j’ai dû partir en catastrophe à l’étranger pour 24 heures afin de pouvoir faire cet examen et commencer la chimiothérapie après quelques jours.
Dans ma vie j’ai dû faire quelques opérations chirurgicales suite à des blessures quand je pratiquais le handball donc je connais le bloc, l’anesthésie générale, les jours passés à l’hôpital, la réeducation, j’étais plus ou moins préparé à affronter cette étape mais loin de moi l’idée de la souffrance vécue suite à la prise de la dose de chimiothérapie !!
La séance en soi n’est pas douloureuse mais les jours qui suivaient étaient vraiment insupportables avec un séjour permanent à la salle de bain ; matin midi et soir, en plus pour moi, c’était doublement douloureux car la tumeur était juste à côté de l’œsophage et ça ne me permettait pas de bien manger et même quand j’arrivais à manger un peu je n’arrivais pas à garder la nourriture à l’intérieur de l’estomac. Au fur et à mesure j’ai perdu 18 de mes 85 kg habituels, tous mes muscles, mes cheveux, mes cils, mes sourcils..
Bref, je suis devenu une autre personne physiquement.
D’ailleurs l’une des plus douloureuses des épreuves morales, c’était les réveils matinaux avec le premier regard dans le miroir en se lavant le visage, je me disais qui est cette personne, je ne me reconnaissais plus.
Ce n’était pas évident car il y avait aussi le regard de mes enfants, de mon épouse, de mes parents, de mon frère, de ma sœur de ma famille et belle famille ainsi que quelques cousins et amis proches.
A vrai dire, beaucoup de mes amis et mes connaissances n’étaient pas au courant car l’information n’est pas sortie par choix de gérer ça dans un cercle très fermé et intime.
Certains amis et confrères n’ont su que j’étais malade qu’après ma rémission et la reprise d’une vie normale qui s’est faite sur plusieurs étapes évidemment.
Cette maladie comme d’autres maladies ou épreuve malheureuse de la vie nous permettent de découvrir beaucoup de vérités ; qui nous aime vraiment, qui on aime vraiment, à qui on tient vraiment, à quoi on tient vraiment.
C’est l’occasion ou jamais d’être avec soi-même isolé du monde entier pendant des mois à cogiter, à se remettre en question, à refaire sa vie, à refaire le monde, à parler à Dieu, à lui promettre des choses en cas de survie, à se rendre compte de notre faiblesse, nous les êtres humains, à vouloir corriger des choses, rectifier le tir sur plusieurs plans, à décider de changer quelques trucs et aspirer à être meilleur..
Je vous promets que malgré ma souffrance physique j’ai profité de cette maladie pour m’apaiser moralement, pour être en paix avec moi-même et avec tout le monde, pour me découvrir davantage, découvrir mon courage, ma volonté, ma foi en Dieu, mon acceptation de ma destinée, de toute façon je ne pouvais pas faire autrement je devais me battre pour moi-même, pour mes enfants, pour ma famille et pour tous ceux qui m’aiment.
Je me parlais tous les jours, je m’encourageais, je m’accrochais et grâce à Dieu ça a marché.
Bon, ce fut un été désagréable cloîtré chez moi avec juste quelques petites sorties pour marcher au parc, moi qui aime tant la mer je n’y suis pas allé car il fallait éviter le soleil et la chaleur, c’était des mois difficiles avec une accalmie les quelques jours qui précédaient la séance de chimiothérapie car le corps avait déjà assimilé la dose précédente dans un cycle d’une séance toutes les trois semaines.
Je vous épargne les détails mais le 25 octobre 2023 arriva finalement, le PET SCAN et les examens qui suivaient cette dernière dose était positifs donc le traitement s’arrêtait là !!
Grâce à Dieu, une rémission totale avec un contrôle semestriel pendant les 5 ans suivants.
Une année s’est déjà écoulée depuis, j’ai repris un peu de force, un peu de poids, tous mes cheveux, une meilleure mine, une activité physique et professionnelle avec une courbe ascendante, j’ai même pu retrouver la mer cet été et comme c’était bon !!
Ce partage en ce mois particulier est en fait un message d’amour, de solidarité, de tendresse, de courage, d’espoir destiné à toutes celles et tous ceux qui souffrent, à leurs familles et proches, c’est également un message de reconnaissance et de remerciement à tous ceux qui étaient là pour moi.
Heureusement, je n’ai pas été déçu, bien au contraire.
Évidemment, je remercie également mon médecin traitant, compétente et sympathique, avec toute son équipe, nous n’avons rien à envier à personne sur ce plan-là, les médecins Tunisiens sont très compétents.
Je veux aussi profiter de cette occasion pour vous inciter à faire du sport quelle que soit la discipline, ça n’empêche pas d’avoir le cancer ou d’autres maladies mais ça contribue clairement à mieux les affronter et les battre.
Loin de moi l’idée de donner des leçons à qui que ce soit, mais ce genre d’expérience nous apprend aussi que ça ne sert absolument à rien de perdre du temps et de l’énergie à se chamailler avec d’autres personnes, zappez les futilités, gardez l’essentiel et débarassez-vous du reste sans regret ni rancune.
Profitez de la vie, de ceux à qui vous tenez vraiment, soyez indulgents avec vous-mêmes et avec les autres, soyez présents aux cotés de toutes les personnes malades, même ceux que vous connaissez peu, un simple coup de fil ou un message leur fera beaucoup de bien et vous fera sentir utiles.
Engagez-vous dans des associations caritatives, faites du bien autour de vous, embellissez votre vie et celles des autres, c’est gratuit, c’est noble, c’est altruiste, c’est Humain !!
Que Dieu nous garde, nous et ceux qu’on aime ainsi que tout le monde en bonne santé.
« Dans la noirceur de l’épreuve, ne laisse pas le désespoir t’arrêter.
Continue avec courage et de l’autre coté du sombre tunnel, tu trouveras la lumière ».