La presse écrite en Tunisie vient de perdre l’hebdomadaire en langue arabe, Al Charaa Al Maghrebi. Une nouvelle perte dans un paysage qui souffre déjà de la rareté des titres. Ces dernières années, le nombre des publications s’est drastiquement rétréci après l’effervescence observée juste après la Révolution en 2011.
La crise ne cesse de s’approfondir dans un secteur qui ne voit pas le bout du tunnel. Elle touche tous les types de médias. Et il suffit de jeter un coup d’œil sur les grilles des télévisions et des radios pour comprendre à quel point l’activité s’enfonce.
Un modèle économique peu flexible
Il faut se mettre d’abord d’accord sur un point : ce qui se passe n’est pas exclusif à la Tunisie. Même dans les pays occidentaux, où la lecture est une habitude, l’industrie souffre mais résiste et s’adapte mieux.
Ici, l’impact de la crise économique, conjugué à un désintérêt grandissant des lecteurs de la presse écrite papier au profit des supports digitaux, a achevé les maisons d’édition. Le business model est quasiment identique : financer l’activité par des publicités et diversifier les canaux de diffusion, en ajoutant au papier des sites Internet. Souvent, le support électronique se transforme en une charge supplémentaire car le coût de maintenance et du personnel dépasse ses rentrées d’argent.
Quelques sociétés de presse ont pu monétiser leurs marques par des événements annuels sponsorisés. Toutefois, cela exige avant tout une forte crédibilité et des années d’existence avant de passer ce cap, tout en sachant que ce n’est pas toujours gagné d’avance.
L’avenir est au mix conventionnel/non conventionnel
Ceux qui ont suivi cette démarche ont pu détecter, tôt, le manque de profondeur du marché publicitaire tunisien qui n’a pas pu retoucher le pic de 2019, qui était de 235 MTND tous médias confondus. La part de la presse écrite est, bien évidemment, parmi les plus faibles et ne dépasse pas les 4 MTND.
L’érosion progressive de l’attractivité de ces supports est expliquée par la montée en flèche d’autres canaux qui s’avèrent parfois plus efficaces en termes de ciblage. Les réseaux sociaux, Facebook, Instagram et TikTok sont plus crédibles et, surtout, divertissants. La spécialisation du contenu peut donc réduire l’impact de la crise, mais ce n’est pas suffisant. Certains médias ont opté pour la publication d’infographies ou de vidéos sur leurs réseaux, qui incitent à continuer la lecture sur le site web, augmentant ainsi le trafic vers leurs propres supports.
Ce qui est sûr, c’est que le sort de tous les opérateurs s’annonce sombre s’ils ne parviennent pas à créer la différence, en combinant les supports conventionnels et non conventionnels. Le lecteur a bien évolué et est devenu exigeant. Il veut consommer l’information sans dépenser de l’énergie ou perdre du temps. Outre le soutien financier inconditionnel d’un bailleur de fonds, c’est l’unique formule de la survie disponible aujourd’hui.