Le docteur Aram Belhadj, économiste et enseignant-chercheur à l’Université de Carthage, a exprimé ses réserves sur la proposition de loi visant à réviser le statut de la Banque Centrale de Tunisie (BCT), soulignant que, bien que l’intention puisse être positive, des consultations avec des experts en économie monétaire et financière auraient été nécessaires avant d’engager une telle réforme.
Selon Aram Belhadj, bien que la proposition de révision du statut de la BCT parte d’une bonne intention, elle aurait gagné à être précédée d’une consultation approfondie des spécialistes. L’expert estime qu’une bonne intention, sans une réflexion approfondie, peut conduire à des conséquences imprévues, voire nuisibles. Il appelle les élus à tenir compte des avis des spécialistes dans le domaine monétaire et financier.
L’indépendance de la BCT : un principe à préserver
L’expert a également rappelé que l’indépendance des banques centrales ne consiste pas simplement à appliquer un modèle d’un autre pays, mais à garantir que l’institution puisse remplir ses objectifs en toute autonomie. Selon Belhadj, une banque centrale doit être en mesure de réaliser les missions qui lui sont confiées avec les moyens nécessaires pour y parvenir.
Le vrai problème : un déficit structurel, pas l’endettement en soi
Belhadj a soulevé un point crucial concernant l’objectif de la loi : maîtriser l’endettement. Il considère que la véritable problématique réside dans le déficit budgétaire structurel de la Tunisie, causé par des dépenses dépassant largement les recettes. Selon lui, la priorité devrait être de rationaliser les dépenses publiques et d’introduire des réformes fiscales pour renforcer les recettes avant d’aborder la question de l’endettement.
Impliquer la BCT dans le développement : une bonne intention, mais…
Concernant l’objectif d’impliquer davantage la BCT dans le développement économique, Belhadj a exprimé un avis favorable, mais avec des réserves. Pour lui, cela ne doit pas passer par une atteinte à l’indépendance de l’institution. Il recommande plutôt de coordonner les actions de la BCT avec celles des autres acteurs économiques, tout en préservant son autonomie, et éventuellement d’amender certains articles du statut de la BCT pour lui permettre de mieux contribuer au développement sans compromettre son indépendance.
Endettement intérieur : une solution erronée ?
Enfin, l’économiste a mis en garde contre la proposition de rationaliser l’endettement en se tournant davantage vers l’endettement intérieur. Selon lui, ce changement ne résoudra pas le problème de fond, mais pourrait simplement modifier la structure de l’endettement, avec des conséquences incertaines. Belhadj plaide pour une réforme de l’économie, notamment par la relance de la production et de la productivité, afin de garantir une véritable souveraineté nationale. Il insiste sur le fait qu’il ne faut pas compter sur les banques ou la BCT pour résoudre les problèmes économiques du pays, mais sur les capacités internes du pays à travers des réformes profondes.