L’Algérie sur le point de rompre ses relations commerciales avec la France en réaction à la reconnaissance par Paris de la « souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental? Alger dément.
Nouveau séisme dans les relations tumultueuses entre Alger et Paris : l’Algérie s’apprêterait à rompre ses relations commerciales avec l’ancienne puissance coloniale en réaction à la reconnaissance par Paris de la « souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental. Un revirement brutal qui a suscité le courroux d’Alger, soutien des indépendantistes du Front Polisario. Et ce, sur fond de vives tensions depuis plusieurs mois entre les deux pays riverains de la Méditerranée sur différents sujets : délivrance de visas; laissez-passer consulaires; ou même plus récemment attribution du prix Goncourt à l’auteur franco-algérien Kamel Daoud.
Panique dans les milieux d’affaires
En effet, dans un article intitulé « Algérie : menace sur les relations commerciales avec la France, panique dans les milieux d’affaires », notre confrère Le Figaro a dégoupillé une bombe hier mercredi 7 novembre en révélant que les opérations d’import et d’export, de et vers la France, pourraient ne plus être traitées. Si les autorités venaient à finalement confirmer cette mesure, « cela équivaudrait à une suspension des relations commerciales entre les deux pays », concluait le quotidien parisien.
Concrètement, selon les informations recueillies par Le Figaro, les autorités algériennes ont fait passer une consigne aux banques locales : il ne faut plus traiter les opérations d’import et d’export avec la France!
Toujours selon la même source, l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers (ABEF), une institution publique algérienne, aurait convoqué lundi 4 novembre les banques locales pour les informer d’une nouvelle mesure. A savoir : les opérations d’import et d’export, de et vers la France, ne pourront plus être traitées. « Bien qu’aucune note officielle n’existe, toutefois un document non authentifié résumant ce qui s’est dit lors de cette réunion a beaucoup circulé dans la communauté française, alimentant les pires craintes ». C’est encore ce qu’affirme le média français qui se réfère à une crise similaire à celle qui a opposé il y a deux ans l’Algérie à l’Espagne. A l’époque, Alger avait gelé ses relations commerciales avec Madrid après sa reconnaissance de la « marocanité » du Sahara occidental.
Signes avant coureurs
Selon les observateurs, et même s’il n’agissait à ce stade que d’une consigne communiquée « à l’oral » par l’ABEF, la réaction des autorités algériennes serait un acte fort lié à une reconfiguration de la diplomatie française au Maghreb. Et ce, depuis que la France a reconnu la « souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental, au détriment de l’Algérie.
S’agit-il d’un signe annonciateur du gel des relations commerciales entre les deux pays? D’autant plus que l’Algérie avait ignoré la France le mois dernier lors de ses appels d’offres pour le blé, en raison des tensions diplomatiques entre les deux pays. Pourtant, l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) assure avoir traité tous les fournisseurs de manière équitable et avoir appliqué des critères techniques pour couvrir ses besoins en importations.
Un enjeu énorme
C’est que l’enjeu est de taille. En 2023, les échanges commerciaux entre la France et l’Algérie ont progressé de 5,3 % pour attendre 11,79 milliards d’euros. Selon le ministère français de l’Économie, cette hausse s’expliquait essentiellement par l’augmentation des importations françaises de biens algériens, portées par les importations de gaz naturel et de pétrole brut. Concernant les exportations françaises vers l’Algérie, il s’agit notamment de véhicules, de médicaments, des appareils électroménagers et des denrées alimentaires, notamment le blé.
D’autre part, les exportations françaises vers l’Algérie se sont établies à 4,49 milliards d’euros 2023. Alors que les importations de biens algériens en France ont atteint 7,3 milliards d’euros. L’Algérie a conservé en 2023 sa place de second marché de destination des ventes françaises en Afrique.
« Nous sommes décidément aveugles »
Rappelons enfin que l’ex-ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, a relayé jeudi 7 novembre une note sur X. « Nous vous informons qu’à compter du 5 novembre 2024, les domiciliations d’importation ayant pour origine et/ou provenance la France ne seront plus traitées par les banques de la place, les opérations d’export vers la France sont également concernées ».
Et d’ajouter : « Pour remercier la France, l’Algérie décide de bloquer toutes les importations françaises et les exportations vers la France. Nous sommes décidément aveugles », conclut l’ex-diplomate.
Réaction immédiate de l’agence de presse officielle APS qui a publi,é hier jeudi vers 16h30, « un démenti catégorique » qui évoque « des informations erronées et totalement infondées ».
Le communiqué dénonce également « les allégations mensongères colportées par l’ancien ambassadeur de France à Alger, dans son délire haineux et coutumier à l’égard de l’Algérie, au sujet de prétendues mesures restrictives au commerce ».
Au final, s’agit-il d’une simple rumeur ayant suscité un vent de panique dans les milieux des affaires aussi bien en France qu’en Algérie? L’avenir nous le dira, mais ne dit-on pas qu’il n’y a pas de fumée sans feu?