Le ministre du Transport vient d’annoncer qu’un projet de loi visant à réglementer la diffusion de prévisions météorologiques non officielles sera prochainement présenté par l’Institut national de météorologie à l’ARP. C’est vrai que dans ce domaine, souffler le chaud et le froid au point de dire tout et son contraire est devenu un sport national. Mais bon, de là à en faire une loi, cela fait froid dans le dos. Il faut dire qu’il se passe tellement de choses incongrues chez nous qu’on finit par s’y habituer et qu’il n’y a pratiquement plus rien à ajouter. Sauf peut-être à en rajouter sur la pluie et le mauvais temps. La météo est capricieuse et il lui arrive rarement de tenir compte des vœux des hommes, même quand ces hommes et ces femmes siègent à l’ARP, haut lieu, comme tout un chacun le sait, des espoirs du peuple et des rêves des plus démunis.
Historiquement, il en a toujours été ainsi et tous les adages populaires à ce sujet tournent autour de l’inconstance, certains disent l’alternance, entre la pluie et le beau temps. L’ennui, c’est que les « actuels » tiennent de plus en plus les « autres » pour des comploteurs ou tout au moins des empêcheurs de tourner en rond. On les voit défendre l’indéfendable, mais ils se mettent, vite, aux abonnés absents quand il s’agit de trouver comment assurer les récoltes ou faire fructifier les richesses du sous-sol, en dépit du populisme qui gagne le monde.
Et c’est là que l’on voit bien pourquoi il est passablement incongru de se chamailler autour des problématiques lois de finances. Pour avoir de quoi payer, il faut encore pouvoir compter sur les recettes. L’actuel chef du gouvernement en sait quelque chose. On peut lui prêter toute la bonne ou mauvaise foi que l’on souhaite, il n’y aurait manifestement rien d’autre à faire que de frapper à la porte de la Banque centrale. On peut toujours s’y opposer, à tort ou à raison, mais la persistance du discours ambiant met toutes les institutions en proie au doutes, pour ce qui reste à perdre, il faut dire. La mode est à celui qui sera le plus fort dans le blocage de tout ce qui ressemble à du travail, et à des travailleurs désireux de gagner leur pitance à la sueur de leur front.
L’habitude a été prise de demander à l’Etat tout et son contraire. Et comme le plus bel Etat ne peut donner que ce qu’il a, en fait pas grand-chose par les temps qui courent. L’abondance de pluie va continuer à boucher les égouts et le manque de pluie à boucher les oreilles. On parle bien d’une « lutte contre la corruption et la spéculation », mais personne n’écoute les économistes qui disent que c’est la rareté qui crée la spéculation et son corthège funèbre, la corruption.
Mais qu’à cela ne tienne, on nous dit qu’on vient d’adopter une nouvelle approche pour lutter contre le phénomène. Il s’agit de privilégier le dialogue et la sensibilisation à la répression. Une nouvelle approche qui semble porter ses fruits. La preuve : plusieurs commerçants spéculateurs ont décidé de leur propre chef, selon un communiqué de la présidence de la République, de ne plus spéculer sur les denrées alimentaires et de baisser les prix de leurs marchandises. Il y a même un commerçant, selon le même communiqué, qui est allé spontanément dans l’arrièreboutique pour ramener les sacs et les caissons de denrées alimentaires cachés, les exposer de nouveau après avoir baissé leurs prix, le tout en scandant « Vive la Tunisie ». Toujours selon le communiqué, cela montre que les Tunisiens, quand ils ont confiance dans leurs dirigeants, retrouvent aisément leur élan de compassion et de solidarité.
Il y a longtemps, un ancien Premier ministre, H. Nouira pour ne pas le nommer, avait expliqué sa réussite en affirmant que « la pluie avait voté pour lui ». On en est toujours là. Signe des temps, Les dirigeants ne sont pas en reste, ils font la pluie et le… mauvais temps. C’est là la volonté des Tunisiens.
Le mot de la fin est disponible dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 907 du 20 novembre au 4 décembre 2024