Depuis les derniers événements en Syrie, on se demande si le spectre d’une troisième guerre mondiale pointe à l’horizon. Beaucoup d’interrogations dont on ignore les réponses actuellement. Aujourd’hui, la question essentielle est de savoir si cette reconfiguration du monde se fera bientôt ou sera plus lointaine.
Elyes Kasri, ancien ambassadeur et analyste politique, dresse un état des lieux. Et il présente comme suit son analyse via son post Fb:
« Pour Alexandre Douguine, philosophe et inspirateur du président russe Poutine, la Syrie a été un piège et une erreur stratégique pour la Turquie.
À la recherche d’une stature régionale, Erdogan a ainsi précipité la chute du régime Assad, pensant se rapprocher des cercles de décision stratégique américains et sionistes avant l’investiture du président américain Donald Trump.
Toutefois, le courroux des autorités russes et iraniennes occupées actuellement par des considérations sécuritaires plus immédiates et qui ne tardera pas à se manifester, sera moindre que le défi que posera une plus grande autonomie et probablement une entité indépendante kurde sur le territoire syrien à proximité des zones kurdes en Turquie.
Après s’être efforcée pendant des décennies de déstabiliser la Syrie par tous les moyens, y compris par des hordes armées islamistes, la Turquie devra faire face à la menace existentielle d’un État kurde sur ses frontières et qui, en tant que membre possible de l’ONU, grâce au soutien fort prévisible israélien et occidental, pourrait saisir la commission onusienne de décolonisation du sort des territoires et populations kurdes sous occupation turque et mettre la Turquie face au risque de devenir un État colonisateur et paria confronté au danger d’effritement.
L’histoire s’accélère en Europe et dans sa périphérie MENA, et la Turquie sera confrontée au choix entre la surenchère par milices interposées notamment islamistes dans la région MENA, y compris en Libye avec la politique de la fuite en avant et de la terre brûlée ou la soumission au diktat israélo-otanien en s’alignant franchement contre la Russie notamment en cédant le passage du détroit du Bosphore et des Dardanelles vers la mer Noire à des bâtiments de guerre otaniens en vue de leur positionnement à Odessa, importante cité-port ukrainienne ou, plus grave, au large de la péninsule de Crimée, pour en faire une ligne rouge pour l’armée russe, quitte à invoquer, en cas d’attaque, l’article 5 de la charte atlantique de défense collective.
Les erreurs d’Erdogan risquent fort de réveiller les vieilles rivalités russo-ottomanes à une époque où la Russie est la première puissance nucléaire et a fait montre d’une résilience remarquable en Ukraine face à une coalition multiforme occidentale qui est désormais sur la défensive avec uniquement l’énergie du désespoir.
Le spectre de la troisième guerre mondiale n’est pas en train de s’éloigner. Au contraire… ».