Il est important de promouvoir la fiscalité environnementale qui reste insuffisante pour la mobilisation de ressources publiques, à même de financer la transition écologique et énergétique en Tunisie, a souligné l’Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives (Itceq), dans un rapport publié en novembre 2024.
Selon ce rapport intitulé «Promouvoir la fiscalité environnementale», les taxes environnementales se sont élevées à 1,4% du PIB en moyenne sur la période 2000-2021. Quant à la part de ces taxes dans le total des recettes fiscales, elle a fléchi durant la même période, avec de légers rattrapages en 2010 et entre 2015 et 2018, qui n’ont pas perduré. Ces taxes n’ont pas dépassé 4,2% en 2021, contre 7,2% en 2000 et une moyenne de 5,2% sur toute la période.
Par ailleurs, les dépenses fiscales en faveur de l’environnement, de la maîtrise de l’énergie et des énergies renouvelables sont demeurés «faibles» en Tunisie, ne dépassant pas les 25,3 millions de dinars en 2022 et ce, malgré l’importance relative des incitations offertes. Cette faiblesse pourrait s’expliquer par l’atonie des investissements à finalité environnementale, estime l’ITCEQ.
En tout état de cause, « le manque d’investissement à vocation environnementale n’a pas favorisé la compétitivité durable de la Tunisie ». Ces facteurs expliquent que la fiscalité environnementale est «encore en quête de maturation». Pour la développer, l’ITCEQ a recommandé d’inscrire dans le projet de code de l’environnement, l’ensemble des textes fiscaux liés à l’environnement dans un chapitre spécifique intitulé « fiscalité environnementale », tout en simplifiant les dispositifs eux-mêmes.
Il a également jugé indispensable de mettre en place un système d’information intégré sur la fiscalité environnementale. L’objectif étant de compléter les données manquantes, d’harmoniser les données existantes et de les structurer selon la méthodologie des instances internationales.
Pour une révision de la mesure de certaines taxes
Il a, par ailleurs, souligné la nécessité de revoir la mesure de certaines taxes, en les liant à la nuisance environnementale, évoquant l’exemple de la taxe due à l’importation de moteurs et de pièces de rechange usagés. La loi de finances de 2014, l’a fixée à 3 D/ kg du poids du moteur ou de la pièce de rechange, puis révisée à la baisse à 1D/ kg, en vertu de la loi de finances complémentaire de la même année, sans justifier, rationnellement, la baisse de cette taxe ainsi que les bases de sa tarification.
L’ITCEQ propose d’indexer cette taxe non seulement sur le poids des moteurs, leur cylindrée et le type de carburant mais, également, sur l’âge du moteur : l’ancienneté du moteur étant corrélée à l’émission de polluants.
Pour ce qui est de la taxe sur les produits énergétiques consommés, « la Tunisie pourrait faire un arbitrage entre deux scénarios exclusifs qui permettraient le double dividende et d’éviter le problème de double imposition liée à la rémanence de taxe à l’export. Le 1e scénario consiste à continuer à appliquer cette taxe à tous les secteurs, mais en basant son assiette sur l’empreinte carbone des produits énergétiques ».
Pour ce qui est du 2e scénario, il prévoit de continuer à appliquer aux entreprises, la taxe sur les produits énergétiques consommés en vigueur, seulement sur leurs ventes sur le marché local. Les entreprises exportant les produits soumis au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières seront exonérés de cette taxe, mais paieront à l’occasion des opérations d’exportation de ces produits vers l’Union européenne, une taxe assise sur l’émission carbone associée à leur production.
La mise en place d’un dispositif de Bonus-Malus écologique, visant à inciter les consommateurs à acheter des véhicules moins polluants, à dissuader l’achat de véhicules très émetteurs de CO2 et à encourager les constructeurs automobiles à développer des technologies plus respectueuses de l’environnement figure aussi parmi les recommandations.
L’Institut a, par ailleurs, mis l’accent sur l’importance de fusionner le fonds de dépollution et le fonds de la protection et de l’esthétique de l’environnement. Cette fusion apporterait plus de transparence au niveau de la gestion des finances publiques et consoliderait, efficacement, les ressources et éviterait le problème de report de solde d’une année à une autre pour un fonds (le fonds de dépollution) alors que l’autre fonds en a besoin. De plus, elle apporterait plus d’efficacité dans l’action publique que ce soit au niveau de la planification du programme qu’au niveau de sa mise en application.
Il est, aussi, important « de promouvoir la communication sur le financement de la transition écologique, notamment la fiscalité ». Ainsi, les campagnes d’information devraient être mises en place, pour expliquer au large public comment ces taxes contribuent à la lutte contre le changement climatique et à la protection de l’environnement en général.
L’Institut conclut que la réussite de la taxation carbone repose sur l’engagement des parties prenantes. Sans leur adhésion, « la mise en œuvre de la taxe peut se heurter à une opposition significative ».
Avec TAP