Treize ans nous séparent du tournant historique qu’a connu notre pays avec la chute du système politique qui l’a gouverné depuis l’Indépendance, avec ses deux étapes, bourguibienne et ben-alienne, basées sur le règne sans partage du parti unique, PSD et RCD avec à la fin, un semblant de multipartisme et surtout d’un Président qui monopolise tous les pouvoirs. Mais ce système tant honni maintenant, car déclaré par les Occidentaux comme dictatorial, autocratique ou tout simplement anti-démocratique, loin d’avoir été un exemple unique, était répandu dans toute la planète surtout chez les peuples qui ont combattu le colonialisme, et aussi une grande partie de l’Europe dite communiste, et était considéré comme le seul système valable, pour bâtir un Etat et une économie, nationales.
Alors que tous les pays de l’ex Europe de l’Est ont plus au moins réussi leurs transitions dites démocratiques avec des alternances au pouvoir des élites politiques de ces pays, tous les pays arabes et aussi africains n’ont pas pu réussir ce passage, dont la Tunisie. L’on sait le sort fait au soi-disant « Printemps arabe », qui a fini par instaurer l’anarchie et les guerres civiles partout là où il est passé. Sans parler de la destruction de l’Etat, comme en Libye et au Yémen ou sa disparition comme actuellement en Syrie.
Révolution, dites-vous ?
Jusqu’au 14 Janvier 2011 au soir, le mot révolution n’a jamais été prononcé par aucun parti politique, aucun analyste et aucun des milliers de manifestants qui ont défilé pendant des jours depuis le fameux suicide du charretier de Sidi Bouzid. Aucun parti d’opposition y compris les islamistes n’avaient de projets de révolution pour le pays et aucun militant ne se déclarait révolutionnaire. Car depuis la fin des années soixante-dix, toutes les formations de l’opposition de jadis, avaient abandonné l’idée, voire même, le projet d’une révolution.
C’est juste après le départ de Ben Ali, qu’une des chaînes privées, crées d’ailleurs par un des laudateurs de ce dernier, que Feu Ahmed Mestiri, que Dieu lui pardonne, un politicien de la vielle garde, prononça le mot « révolution » , pour dire combien il trouvait la chute du régime comme quelque chose d’extrêmement important et historique ce qu’elle était d’ailleurs. Mais jamais dans le sens que lui ont donné par la suite les exégètes révolutionnaires de tout poil, gauchistes intégristes, nationalistes arabes.
Mais le plus grave est que ce mot fût toute suite repris, officialisé et institué comme une évidence par le nouveau président de l’époque fraîchement désigné et qui s’est d’ailleurs attribué le pouvoir de parler au nom de la « Révolution » et aussi du peuple pour donner le coup de départ du processus qui aboutit à la prise du pouvoir par les islamistes d’Ennahdha, à travers des élections dont tout le monde sait qu’elles ont été préparées dans les chambres noires. Cela conduisit à la situation qu’on connait.
Il est bon de rappeler que le chef de la révolution, désigné comme président était l’un des grands barons de l’ancien régime. Qui lui a soufflé ce mot? C’est vrai que l’idée des révolutions de couleur expérimenté par Georges SOROS en Europe de l’Est était encore dans les esprits. Alors on avait remplacé la couleur par la senteur : La révolution du Jasmin ça sonne très tunisien!
Un comité » révolutionnaires » fût même créé, qui rassemblait les plus conservateurs des « élites » et même des nostalgiques du beylicat pour « diriger » cette révolution que les islamistes, au nombre de quatre, qui croupissent en majorité maintenant en prison pour des délits de terrorisme et de corruption, reprirent ensuite à leur charge. Et ce, jusqu’à l’aboutissement de l’élection en apothéose de leur parti et de quelques autres parti-satellites qui ont d’ailleurs disparu complètement maintenant.
L’on sait maintenant que cette supposée révolution et ses analogues dans le monde arabe, ont été longuement préparées et concoctées, dans les laboratoires dépendant des services occidentaux. Et même qu’on s’est payé le luxe de former leurs agitateurs, leurs vedettes et leurs « héros » à l’avance, dans les clubs de l’« Open-society » et autres « Freedom-house ».
La dernière « révolution » en date est celle exécutée en Syrie il y a seulement quelques semaines, par des légions de djihadistes qui ont foncé, baïonnettes au poing sur Damas, sans trouver aucune résistance, puisqu’on avait depuis longtemps travaillé au corps les chefs militaires de l’inqualifiable Bachar al-Asad qui a fui comme un vulgaire déserteur sa patrie après l’avoir ensanglantée pendant des années dans une guerre civile qui a eu pour résultat la disparition d’un Etat et d’une armée en quelques jours de la carte du globe. Maintenant, ce sont des étrangers dits djihadistes, nommés aux plus hautes fonctions du pays par des simples pions des services de renseignements étrangers. Là aussi on parle encore de « révolution », de démocratie » et des « droits de l’homme ».
Heureusement que le peuple tunisien a réussi à contrer ces plans ourdis outre-mer et préserver l’essentiel tout en évitant une guerre civile meurtrière et qui aurait complètement anéanti le pays d’Hannibal et de Bourguiba.
Pour ceux qui s’entêtent à parler encore de révolution, nous leur rappelons que l’histoire plusieurs fois millénaires de la Tunisie a démontré que toutes les révolutions qu’elle a connues se sont soldées par des échecs cinglants de leurs dirigeants. Car le Tunisien a toujours eu le culte de l’Etat, mais aussi de la réforme de l’Etat. Seule la réforme est vraie et peut aboutir à un progrès palpable et à une stabilité et une prospérité certaines.
A propos des mots d’ordre de la « révolution »
Dire que cette « révolution » avait un programme est un mensonge que l’Histoire a fini par divulguer. Prétendre que ce programme était traduit sous forme de « mots d’ordre » et de « slogans » par les manifestants est aussi un mensonge. En exemple : « Pain et eau mais non à Ben Ali « a été déjà lancé contre le gouvernement Nouira dans l’année 1978 et concocté dans les cellules clandestines d’El-Amel Tounsi- Perspectives, mais après les émeutes. L’autre slogan « Pain, liberté et dignité nationale « a été aussi crée par la gauche des années quatre-vingt ». Seul le slogan, « L’emploi est un droit, oh bande de voleurs ! » date des premières manifestations de 2010 à Sidi Bouzid crée certainement par des agitateurs de gauche.
Car jusqu’au 14 Janvier aucun islamiste n’a montré le bout de son nez dans les manifestations et aucun slogan de type religieux n’a été scandé. Un an après, le pays était complétement sous la coupe des islamistes de tout bord. On a failli se muter en Etat religieux en quelques mois seulement. Le rouleau compresseur de l’Islam politique est passé par là, aidé et poussé par les Etats occidentaux qui sont devenus ses principaux alliés.
Jusqu’à maintenant, on continue à nous bassiner avec ce qu’ils appellent « les objectifs de la révolution ». L’Histoire le dira. Une démystification de plus pour gens qui n’ont aucun projet sérieux pour redresser le pays, au moins. Car on a voulu oublier et effacer les fondamentaux de l’Etat et de la République, essentiellement bâtir un Etat souverain et prospère, ce que les premières générations des bâtisseurs ont accompli contre vents et marées, échecs et succès, dérives autoritaires. Mais aussi libération de la femme et émancipation du Tunisien. Et surtout une ambition de rattraper le retard qui nous sépare du monde évolué.
On est allé jusqu’à faire des procès publics au fondateur de la Tunisie moderne et envoyer devant la cour criminelle les hauts dignitaires de l’ancien régime en votant une loi qui remonte jusqu’à 1956. On a voulu consciemment détruire la Tunisie indépendante et mettre à sa place un émirat qui aurait prêté serment d’allégeance peut être à Istambul, comme c’est le cas de la Syrie actuellement. Mais c’est déjà une histoire du passé.