Les villes de Tazarka, El Maamoura et Béni Khiar ont connu, en 1952, les pires exactions de la part du général Pierre Garby et de la Légion étrangère. Avec au menu « pillages, destructions, exécutions sommaires et viols ». Des ratissages qui se sont déroulés au cours de cette année charnière de 1952.
« Les hommes au village, parqués sur la place publique pendant le jour, sont conduits enfermés pendant la nuit, dans une maison où ils sont gardés sous la menace des armes. Jusqu’au matin, ils entendent, sans pouvoir réagir, des cris de leurs femmes restées seules en butte aux attaques des soldats. Ils entendent également les bruits des portes que l’on défonce et le crépitement presque interrompu des armes à feu ».
« On nous signale, ici et là, que des militaires ne se sont pas attaqués aux objets, mais aux personnes. En l’absence du père, parti chercher de l’huile pour la confection du couscous destiné aux troupes, la mère a dû disputer sa fille à un soldat qui tentait de la violer. Tentant de la protéger, elle a été frappée violemment à coups de talons, qui ont laissé des ecchymoses dans la région lombo-sacrée ».
« Les soldats entrés dans la mosquée aussi bien par la porte que par celle de la « Maksoura » (pièce attenante de la salle de prière) ont déchiré et piétiné des volumes du Coran. Les traces de ces piétinements sont encore nettement visibles ».
« Les soldats entrés dans la mosquée aussi bien par la porte que par celle de la « Maksoura » (pièce attenante de la salle de prière) ont déchiré et piétiné des volumes du Coran. Les traces de ces piétinements sont encore nettement visibles ».
Opération Mars
Ces fragments ne racontent pas le vécu d’exactions survenues à Gaza dues aux massacres de l’armée israéliennes après le 7 octobre 2023. Mais bel et bien au Cap Bon tunisien, entre le 28 janvier et le 2 février 1952, une année charnière dans la lutte pour l’indépendance de notre pays. Dans le cadre de ce qu’on a appelé l’“Opération Mars“ (notre photo).

Ces fragments sont rapportés dans un rapport rédigé par les ministres Mahmoud Materi (ministre d’Etat) et Mohamed Ben Salem (ministre de la Santé publique) du gouvernement de M’hamed Chenik rédigé les 8 et 9 février 1952 sur les événements tragiques qui se sont déroulés dans la ville de Tazarka, un des épicentres des exactions de la légion étrangère française conduite par le général Pierre Garby.
Deux autres villes ont connu les affres de ce général et de sa légion étrangère : El Maamoura et Béni Khiar.
200 morts
Georgette Elgey, historienne française, a raconté le détail de ces jours difficiles dans son « Histoire de la IVème République » – Edition Fayard, 1993. Un ouvrage dans lequel elle fait état de quelque 200 morts. En évoquant des opérations faits de « pillages, de destructions, d’exécutions sommaires et de viols ».
Des exactions qu’il faut placer dans leur cadre historique. Celui donc de l’année 1952. Que le président Habib Bourguiba qualifiera du « dernier quart d’heure ». Et qui a abouti à l’annonce par le chef du gouvernement français, Pierre Mendès France, de l’autonomie interne de la Tunisie, en juillet 1954.
A bord d’un croiseur
En cette année 1952, le gouvernement français nomme, comme Résident général en Tunisie, Jean de Hauteclocque. Ce dernier arrive à bord d’un croiseur (le 13 janvier) pour donner toute la mesure, pense-t-il, de sa détermination de mater toute velléité d’indépendance de la Tunisie (notre photo).
Quatre jours plus tard (le 18 janvier), Habib Bourguiba décrète la phase décisive de la libération ; celle de la lutte armée. Autant dire que les évènements du Cap Bon et leurs ratissages n’ont fait que mobiliser les militants nationalistes tunisiens contre l’occupation française.
Quatre jours plus tard (le 18 janvier), Habib Bourguiba décrète la phase décisive de la libération, celle de la lutte armée. Autant dire que les évènements du Cap Bon et leurs ratissages n’ont fait que mobiliser les militants nationalistes tunisiens contre l’occupation française.