A l’ occasion de la Journée internationale de la liberté de la presse, le Courant Démocratique a organisé une conférence sur les décrets 115 et 116, hier le 2 mai. Animé par l’ancien ministre de l’Intérieur et juge Farhat Rajhi, les trois intervenants : Mohamed Abbou, secrétaire général du Courant Démocratique, Lotfi Hajji, journaliste et directeur du bureau d’Aljazeera à Tunis et Zied El-Heni, journaliste tunisien ont été unanimes quant aux menaces qui pèsent sur la liberté de la presse et la nécessité de revoir les décrets.
Les failles juridiques ne manquent pas
Prenant la parole Mohamed Abbou a expliqué que l’histoire a montré qu’il existe des conflits perpétuels entre le pouvoir et ceux/celles qui veulent critiquer le pouvoir. Revenant sur les lois qui régissent la liberté de la presse en Europe, il a indiqué que la France avait attendu l’année 1881 pour instaurer une loi réglementant la liberté de la presse et qui soit garante des libertés. Il a indiqué toutefois, dans le même contexte, que cette loi a subi plusieurs amendements non pas pour ouvrir la voie à une liberté totale mais plutôt pour y mettre des limites.
Analysant la situation en Tunisie, Mohamed Abbou a estimé que le décret 115 ne prévoit pas de mesures répressives à l’encontre des journalistes qui diffusent des informations mensongères. D’après lui, il y avait trop de pressions à l’époque de la préparation du décret , raison pour laquelle il a été préparé à la hâte. De plus, il a rappelé que le décret 115 n’a pas déclaré tous les textes précédents relatifs au domaine de la presse nuls et non avenus. Dans ce contexte, il a rappelé que le ministère public se réfère encore à des articles qui figurent dans le code de communication qui date de l’époque de Ben Ali.
De la nécessité de la mobilisation contre le retour des anciennes pratiques
Pour Zied Héni, quatre ans après la révolution, la liberté de la presse demeure précaire et menacée : le ministère public ordonne encore des mesures coercitives à l’encontre de la diffusion de certains programmes sans se concerter avec la HAICA, comme stipule le décret 116.
S’exprimant sur la problématique de la HAICA, il a affirmé l’existence d’un vide juridique surtout que le quorum légal n’existe plus suite à la démission de quatre membres. Et d’affirmer la nécessité de l’intervention de l’ARP pour résoudre le problème surtout que les membres démissionnaires ne sont pas remplaçables.
Quant à Lotfi Hajji, il a estimé que la liberté de la presse se trouve face à quatre menaces majeures: la loi sur la liberté de la presse qui est, selon lui, une non-loi ; les médias détenus par certains hommes d’affaires, ce qui favorise la circulation de l’argent sans contrôle ; le terrorisme qui ne doit pas servir de prétexte pour museler la presse et pour conclure, l’immixtion de certains hommes politiques qui font fi de la liberté de la presse.