Notre économie n’a pas pu résister au choc de la révolution. Les IDE aussi bien dans l’industrie que dans les services ont enregistré un recul considérable au fil de plus de quatre années de transition démocratique, pour laisser exploser un déficit généralisé jamais atteint par notre pays.
Malgré ce recul des IDE, l’économie tunisienne n’est pas au bord du précipice et la Tunisie offre encore d’énormes potentialités, et à bien des égards, pour les investisseurs étrangers qui souhaitent s’y établir.
Alors, qu’est-ce qui bloque l’investissement en Tunisie ? Pourquoi est-elle, aujourd’hui, moins attractive pour les entreprises étrangères ?
L’expert en économie et professeur à l’Institut supérieur de gestion, Tahar El Almi, a apporté quelques éléments de réponses, lors de son intervention, dernièrement, dans une émission radiophonique.
« Vu la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui, je crois que le problème numéro un du pays est un problème d’investissement. Je voudrais d’abord souligner en premier lieu, que l’objectif final de la politique économique la Tunisie en l’état actuel des choses, c’est l’emploi et la stabilisation macro-économique. Le développement économique en Tunisie signifie que pour qu’il y ait de l’emploi il faut qu’il y ait de l’investissement. Pour qu’il y ait de l’investissement il faut qu’il y ait du financement et le choix de financement en Tunisie c’est un système bancaire qui va impulser et financer les investissements à long terme dans le pays », a-t-il déclaré. Mais, aujourd’hui, les banques qui ont participé à l’effort d’investissement et d’ailleurs l’ont très bien fait, se trouvent «face au mur», a ajouté El Almi.
Ceci dit, l’expert passe au second point. En effet, « toutes les études académiques entre 2004-2015 montrent que la performance des banques tunisiennes est en deçà de ce qui est attendu, et plus spécialement les banques publiques. Donc, a-t-il déduit, il y a certainement un problème de gouvernance.
Quant au troisième point, Tahar El Almi suggère qu’il faut recapitaliser ces banques publiques, développer les fonds propres et le capital des banques pour qu’elles puissent continuer dans la stabilité financière à financer l’activité économique courte et longue, c’est-à-dire l’investissement.
Qu’est-ce qui bloque l’investissement en Tunisie ?
Je crois que le problème numéro un de la Tunisie est un problème d’investissement qui est le principal moteur de la croissance sur lequel il est possible de tabler pour les deux ou trois années à venir ; donc on ne peut pas relancer l’économie par la consommation, la consommation des ménages ayant un pouvoir d’achat de plus en plus limité, l’endettement des ménages est très élevé. On ne peut pas aussi le relancer par la consommation de l’administration pour des raisons de déficit budgétaire et déficits publics.
Le volet exportation et commerce extérieur est également un volet sous contrainte, étant donné non pas la situation économique des entreprises tunisiennes, mais celle de nos partenaires. Nous sommes en train de commercer à hauteur de 80% avec l’Union européenne et la situation en Europe, notamment avec les quatre ou cinq pays qui sont vraiment nos partenaires, en l’occurrence, la France, Italie, l’Allemagne…, n’est pas extraordinaire.
Reste le volet de l’investissement. C’est le volet sur lequel il est possible de jouer, mais à ce niveau-là se pose un problème vraiment sérieux de visibilité. Les investisseurs ont de l’argent et des capacités d’investissement mais n’ont pas de visibilité pour deux raisons : la première est sécuritaire, la seconde raison est le climat social auquel il faut trouver des solutions, en favorisant la négociation sur la confrontation entre patrons et salariés, car on n’a pas le choix. Il faut qui y ait un dialogue social, notamment entre les deux partenaires, à savoir, l’UGTT et l’UTICA et l’Etat pour la fonction publique.
Et enfin cette histoire qui n’en finit pas : le fameux nouveau code des investissements. Personnellement, j’ai adopté une position qui sort du cadre qui a été admis par presque tout le monde : je suis en train de préconiser l’abandon de cette idée de nouveau code des investissements.
Il faut savoir que la promulgation de ce nouveau code va nécessiter au moins six à sept mois de discussions, de palabres à l’Assemblée des représentants du peuple ( ARP ), opposant ceux qui sont pour à ceux qui sont contre, et au cas où ce code serait voté, il faudrait par la suite promulguer des dizaines de décrets d’application et puis après des circulaires. Et cela pourrait prendre deux à trois années, alors qu’il est possible de reprendre le code actuel et d’y porter quelques corrections.
Le chef du gouvernement peut le sortir dans la semaine qui suit et annoncer que cela va contribuer énormément à une meilleure visibilité dans l’environnement économique et à une relance des investissements dans le pays.