Jour J-1 . Demain c’est la rentrée des classes pour près de deux millions d’élèves entre le primaire, le secondaire et le préscolaire. Il reste 24 heures pour la dernière touche. Certains parents stressent plus que leurs enfants, craignant d’avoir omis un ou plusieurs détails. Pour prendre un exemple, celui des fournitures scolaires : rares sont les parents qui ont tout acheté avant le jour J. Et pour cause : l’addition est lourde.
Faten, mère de Hamed qui est en 7 ème année, confie que les prix des cahiers sont excessivement chers. Elle déclare : “ Personnellement, j’ai acheté un tablier pour mon fils qui m’a coûté 25 dinars et 100 dinars rien que pour les livres, imaginez ! Quant au reste de la liste, c’est une mission impossible. Prenant l’exemple du cartable, elle poursuit : “ En fait, j’en ai acheté un à la fripe. Ils sont hors de prix avec pas moins de 150 dinars, qui peut dépenser une somme pareille ? Pour elle, le budget d’un enfant s’élève au minimum à 300 dinars si ce n’est pas plus, déplorant entre autres l’absence de contrôle des prix.
De son côté, Mourad, vendeur de cartables, à la rue de la Commission, a préféré quant à lui vendre les articles aux prix standards, c’est à dire entre 10 et 60 dinars.
“ Pourquoi avoir fait ce choix”, lui demande-t-on. Il a répondu : “ Je n’ai pas voulu vendre les grandes marques, par conviction. A quoi ça servirait de les exposer, les gens qui viennent ici ne dépensent pas quarante dinars pour un cartable. »
Un peu plus loin de la rue de la Commission, de l’autre côté de la rue, Abdelkader, libraire, déclare que la plupart des parents en ont fini avec l’achat des fournitures depuis le mois d’août. Pour d’autres, il leur manque les cahiers subventionnés, soulignant: “ Nous avons du mal à nous en procurer, parce que tout simplement les grossistes sur le marché prennent tout le stock. En d’autres termes, on vous prend en otage, à savoir on vous propose un seul choix, celui des cahiers haut de gamme”.
Il ajoute : “ Pour moi, quand je vends un cahier subventionné ( 350 millimes) que ce soit de 24 pages ou 48 pages, les parents y trouvent leur compte, surtout avec deux ou trois enfants. Personnellement je les comprends, et ils ont parfaitement raison. C’est devenu un trafic au vrai sens du terme, les grossistes stockent les cahiers subventionnés pour qu’ils ne soient pas exposés sur le marché, et au final, le consommateur ( le parent) se retrouve acculé à acheter les cahiers de marque qu’il ne peut pas se permettre.
Il renchérit : “ On n’ a pas besoin des cahiers à spirale, ou haut de gamme, nous voulons des cahiers normaux qui soient à la portée de tout le monde et non le contraire, voilà la réalité. Entre un cahier à 350 millimes ou 2 dinars, bien entendu il optera pour la première proposition, mais quand on ne lui présente que des cahiers extra, malheureusement il se retrouve coincé, bien que ça arrange d’autres commerçants qui préfèrent vendre un produit plus cher pour augmenter leur marge”.
Par ailleurs, une maman de deux garçons âgés de 22 ans et 17 ans et d’ une fille qui a l’âge de 13 ans nous confie : » Pour l’instant je n’ai pas encore acheté les fournitures scolaires, je me suis arrêtée à l’achat des cartables à 45 dinars et le tablier à 25 dinars pour ma fille, tandis que pour le second, il va garder le même sac à dos de l’année dernière ».
Elle ajoute : “ Depuis la révolution, l’achat des fournitures est un parcours du combattant, les prix ne cessent d’augmenter, je n’arrive plus à joindre les deux bouts. Pour cette année, je n’ai aucune intention d’acheter un mouton. L’essentiel pour moi, c’est que mes enfants ne manquent de rien, tout le reste est secondaire, y compris l’Aïd. Vous savez, je suis à la fois la maman et le papa en même temps, c’est moi qui m’occupe de tout”.
Et de conclure : “ Du temps de Ben Ali, la vie était moins compliquée, on terminait le mois sans avoir à recourir à aucun prêt, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Le pire, dans tout cela, dès le cinquième jour du mois, il nous faut emprunter. Le citoyen tunisien n’en peut plus, il stresse, il est à bout de nerfs. Je dirais, nous sommes devenus comme l’Egypte, on n’a plus de classe moyenne, les plus riches sont de plus en plus riches et les pauvres s’appauvrissent de plus en plus.”
Depuis toujours, pour la plupart des parents, l’achat des fournitures scolaires est un véritable casse-tête, la rentrée scolaire est considérée comme une période que l’on redoute le plus, et voilà que la rentrée arrive quelques jours seulement avant l’Aïd el Kébir.