La violence contre les femmes s’intensifie de plus en plus. Elles sont nombreuses à avoir subi des violences sexuelles, d’autres en ont été témoins. Comment font-elles pour dénoncer et briser le tabou au nom des femmes? Voilà que le débat est lancé aujourd’hui au siège de l’Opérateur mobile Orange Tunis, entre plusieurs partenaires des tissus associatif, institutionnel et gouvernemental, en présence de représentantes de l’ONU Femmes.
Dans le monde, une femme sur trois est victime de violence physique et sexuelle, a souligné Emma Hassairi, membre du Bureau directeur de l’ATFD (Association tunisienne des femmes démocrates), rencontrée lors du débat. Elle déclare: « C’est un sujet auquel nous sommes amenés à parler presque tous les jours ». Pour elle, la mobilisation doit se faire avec tous les acteurs de la société, mais aussi le gouvernement.
Il faut qu’il y ait une harmonisation des lois, comme l’annonce clairement l’article 46 de la Constitution, qui stipule que: « L’Etat garantit l’égalité des chances entre la femme et l’homme pour assumer les différentes responsabilités et dans tous les domaines. L’Etat œuvre à réaliser la parité entre la femme et l’homme dans les conseils élus. L’Etat prend les mesures nécessaires afin d’éradiquer la violence contre la femme ».
Et de poursuivre: « D’où l’intérêt à mettre en œuvre des mécanismes. Pour moi, le pari consiste à ce qu’il y ait une loi intégrale contre les violences à l’égard des femmes, avec quatre volets: prévention, protection, sanction des auteurs et réhabilitation ».
Il y a plusieurs formes de violences (physiques, sexuelles, psychologiques et économiques). Dans toutes ces formes, on voit des stéréotypes sexistes. Comment lutter justement contre ces stéréotypes? Cela dit, notre société est parfois plus machiste, en raison du caractère de l’homme.
Emma Hassairi explique, pour sa part : « Pour lutter contre les stéréotypes sexuels, il faut travailler pour l’éducation à l’égalité, à la non-violence et à la non-discrimination, au niveau des programmes scolaires, dans les jardins d’enfants et dans les écoles. Et travailler en ce sens, nous permet d’implanter cette culture de l’égalité et cette culture de la non-discrimination pour une meilleure justice sociale ».
Et d’ajouter: « Certes, il s’agit d’un travail de longue haleine avec une volonté politique, mais il va falloir beaucoup de réformes dans tous les domaines. Je pense qu’il faut examiner l’état de l’harmonisation des lois dans la Constitution tunisienne et leur degré d’application pour en relever les défaillances ».
Dans le même sillage, Héla Skhiri, chargée du Programme National de l’ONU Femmes, a de son côté précisé qu’« il fallait qu’il y ait une mobilisation de toutes les parties prenantes. Il y a une autre agence onusienne qui est en train de préparer une cartographie des services. Il s’agit d’un document qui sera bientôt publié et qui regroupe tous les services offerts aux femmes victimes de violence».
Peu de victimes portent plainte !
La synthèse d’une étude publiée en 2011 montre que seules 17% des femmes portent plainte. Selon Mme Skhiri, les femmes subissent souvent une forte pression sociale, parce qu’on leurs demande de retirer la plainte et quand elles la retirent, malheureusement, l’Etat ne prend pas le relais. Or dans d’autres pays, comme la Belgique, le gouvernement belge se porte partie civile.
Elle poursuit: « Il y a tout un travail sur les changements sociaux et sur les mentalités, et ce, par rapport à l’attitude des femmes. Malheureusement, la stabilité familiale est privilégiée au détriment de l’intérêt de la personne. Les femmes sont victimes de violence et l’intériorisent. Cela a un impact négatif sur la famille. On ne peut pas tolérer la violence et elle n’est pas inévitable. On peut lutter contre la violence et arriver à un monde sans violence ».
Pour Mme Asma Ennaifer, Directeur des Relations Extérieures, RSE et Innovation à Orange Tunisie explique : « Ce débat s’inscrit dans le cadre des stratégies pour aider les femmes tunisiennes et à leur autonomisation. Quand une entreprise comme Orange Tunisie lance des projets pour l’année 2016, c’est dans le but d’ aider les femmes à se maintenir économiquement, à avoir un salaire. Vous savez, on a tous un rôle à jouer sur le plan de la mobilisation, que ce soit les journalistes, la société civile, que d’autres pour faire bouger les choses. En tant que femmes tunisiennes, c’est l’une des causes qui peuvent chambouler le pays. Personnellement, je considère que la femme est la pièce maîtresse du pays ».
Ensemble, agissons pour arrêter les violences à l’encontre des femmes et des filles en Tunisie, le combat est loin d’être terminé. Au nom des femmes, il faut briser le tabou. Telle est la conclusion du débat.