Une attaque de grande ampleur a eu lieu à l’aube du lundi 07 Mars 2016 à Ben Guerdane. Une centaine de terroristes de la mouvance Daech ont tenté de s’emparer de la caserne militaire et des sites des forces de sécurité qui se trouvent en renfort à Ben Guerdane, une ville menacée par l’incursion de terroristes venant de Libye.
L’atmosphère était étouffante, ce lundi 07 Mars 2016 à Ben Guerdane. Les groupes terroristes auraient d’abord investi le centre-ville appelant la population à les soutenir et à se soulever avant de s’attaquer à la caserne et de voler une ambulance à l’hôpital.
Ce jour là , nous étions partagés entre inquiétude et interrogations : comment comptaient-ils occuper Ben Guerdane qui compte environ 60.000 habitants, alors qu’ils étaient, tout au plus, une centaine de terroristes ? Comment espéraient-ils occuper une ville comptant une importante caserne militaire et de nombreuses unités sécuritaires ? Ces terroristes sans foi, ou plutôt animés d’ une fausse foi, pensaient-ils qu’il leur serait facile d’investir la ville, de l’occuper, ou encore la libérer selon leur fausse foi ? Croyaient-ils réellement en faire leur premier Emirat, l’Emirat du Sud, tant espéré et tant attendu sur la terre de Kairouan ? Ces traîtres de Daech ont dû déchanter, car les fiers fils et les patriotes de Ben Guerdane ne se laissent pas embarquer dans des manœuvres visant notre patrie, la Tunisie.
Ben Guerdane ; une ville stratégique pour Daech, … qui chercherait à s’implanter dans cette ville
La ville de Ben Guerdane constitue un objectif des terroristes de Daech qui pourraient répéter leurs attaques et même à une plus grande échelle. Plusieurs questions nous traversent l’esprit : ces infiltrations sont-elles le fait d’éclaireurs ? Ces dernières escarmouches sont-elles le fait d’avant-postes ? … Tout est possible, … que Dieu protège notre pays.
Pour ces terroristes, la ville de Ben Guerdane est une cible, car elle est proche de la frontière tuniso-libyenne et elle pourrait leur être favorable, à cause du travail de sape de leurs cellules dormantes et de leurs liens présumés avec la contrebande. Ils se trompent d’objectif, … nos frères et sœurs de Ben Guerdane ; citoyens de la ville, l’armée républicaine, les forces de l’ordre républicaines, la douane ; les ont vaincus, … nos frères et sœurs de Ben Guerdane ont saccagé ce minuscule groupe de terroristes, … nos frères et sœurs de Ben Guerdane ont lézardé, fissuré et même démoli en parti le mythe de Daech le mensonge de ces mercenaires et de ces traitres, … la ville de Ben Guerdane n’est ni El Moussal, ni Tekrit, ni El Felloja, ni El Remadi, ni El Rekka, ni Dir El Zour, ni Haleb, … ici c’est la ville de Ben Guerdane, … la Tunisie libre vaincra le terrorisme.
Les leçons à tirer de l’attentat de Ben Guerdane
La riposte de l’armée tunisienne et des forces de sécurité a été à la hauteur du défi. Qui plus est, nos frères et sœurs de Ben Guerdane se sont tous mobilisés à leurs côtés pour empêcher les mercenaires de Daech de semer le chaos aussi bien dans la ville de Ben Guerdane que dans ses environs.
La ville de Ben Guerdane a été, ces derniers temps, le théâtre d’une sanglante tentative d’instauration d’un ‘’Emirat’’ de Daech au cœur du Maghreb. Cette paisible ville du sud du pays se trouve depuis quelques mois, confrontée aux infiltrations des groupes terroristes qui tentent d’en faire une plaque tournante à travers des flux et reflux laissant craindre qu’on ne soit en présence d’une sorte de répétition générale, avant une offensive de grande envergure.
Outre les 5000 combattants Tunisiens dénombrés en Irak et en Syrie, dont un grand nombre se serait replié en Libye après le début des frappes russes, il faut compter probablement avec les cellules dormantes dont l’initiation aux techniques de guérilla s’effectue, selon toute vraisemblance, du côté de la zone libyenne contiguë.
Dès lors que Daech a jeté son dévolu sur la Libye où il compte entre 2000 et 5000 mercenaires, notre pays s’est retrouvé en première ligne dans les visées maghrébines de cette organisation terroriste qui sait devoir se renforcer avant de prétendre à l’implantation dans les pays voisins.
Avec le bombardement de Sabratha, où une cinquantaine de terroristes ont été tués dans leur camp d’entraînement, la donne paraît changée. Daech s’étant jusqu’ici contenté d’attentats sanglants comme au Bardo, à Sousse ou d’opération-suicide comme lors de l’attentat contre la garde présidentielle. Daech va au-delà de la médiatisation jusqu’alors recherché et entend prouver que ses appétits n’ont nullement été ébranlés par les affrontements contre les milices de Fadjr Libya et les forces de Khalifa Haftar en Libye.
Certes, quelques jours après le raid américain de Sabratha où il a perdu une cinquantaine de terroristes, Daech a sacrifié 46 autres terroristes à Benniri et à Oued Rbayaa, sans compter les sept faits prisonniers, rien que pour réfuter la thèse de ceux qui le disent affaibli. Malgré tout, la riposte de notre armée républicaine et de nos forces de sécurité était à la hauteur du défi. Qui plus est, la population s’est toute mobilisée à leurs côtés pour empêcher Daech de semer le chaos et ce sont là des indicateurs que les terroristes ne peuvent pas ne pas prendre en considération, tant leur besoin de bases arrière est essentiel.
Par-là même, les dirigeants, l’armée et le peuple tunisien ont remporté une double victoire, malgré l’ampleur des contraintes, et c’est le meilleur argument qu’ils ont réussi à faire valoir en la circonstance, face à un ennemi sans foi.
L’opération était programmée depuis des semaines et elle devait s’achever par la déclaration de Ben Guerdane Emirat du Sud, … Raté pour cette fois-ci, … et pour toujours avec l’aide de dieu!
L’opération contre la ville Ben Guerdane ne ressemble en rien aux actions terroristes précédentes. Il s’agit d’un acte de guerre pour annexer Ben Guerdane au califat dit de « l’Etat islamique ». Ce qui vient de se passer à Ben Guerdane est stratégiquement d’une haute importance. Ce coup ne ressemble en rien à tout ce qu’on a connu jusqu’à aujourd’hui comme attaques terroristes.
A l’aube du Lundi 07 Mars 2016, le terrorisme est passé de l’attaque spectaculaire pour faire sensation, à l’attaque planifiée selon une stratégie d’occupation d’une ville frontière qui s’ouvre directement sur un territoire voisin occupé par ces terroristes, à savoir l’ouest de la Libye. Il s’agissait en fait de recommencer les scénarios de l’occupation des villes en Irak et en Syrie ; l’objectif :
‘’Mettre la main sur une ville frontière pour pouvoir ouvrir cette brèche par laquelle tous les renforts arrivent sans encombres et commencer par-là à s’élargir doucement mais sûrement aux alentours.’’
Mener à Ben Guerdane ; avec un nombre inhabituel de terroristes ; des attaques simultanées contre la caserne de la ville et les districts de la Garde nationale et de la police, en plus de l’attaque de l’hôpital, confirme que le terrorisme qui nous guette vient de monter d’un cran dans sa stratégie.
Face au terrorisme, … au-delà des paroles, …
Le terrorisme en Tunisie est devenu une réalité, presque une banalité. Pendant ce temps, les Tunisiens, que personne n’a considérés utile d’informer et d’éclairer sur la question, s’interrogent. Beaucoup continuent à penser que le terrorisme est un phénomène importé, auquel la nation doit faire face. La Tunisie, terre d’accueil et de tolérance depuis plus de trois mille ans, ne saurait enfanter le monstre qui contredirait son modèle de civilisation et menacerait son existence.
Les gens recourent au terrorisme lorsqu’ils s’inscrivent dans une dynamique de lutte contre ce qu’ils ‘’perçoivent’’ comme injustice socio-économique, politique, idéologique ou historique.
Un terroriste trouve toujours de ‘’bonnes raisons’’ pour effrayer, tuer et mutiler au nom d’un dieu, d’un pays, d’une idéologie ou d’une ethnicité. Peu importent les raisons, les outils ou les acteurs, le résultat final est toujours le même: la mort et la destruction.
De nombreux experts antiterroristes ont échoué à ‘’décortiquer’’ ce phénomène trouver des solutions pour traiter les causes d’ordre micro ou macro, car ils ne se posaient pas les bonnes questions. Ils ne réussissaient pas à identifier et considérer tous les paramètres et variables influant et déterminants, aussi bien internes qu’externes, qui conditionnent ‘’l’équation du terrorisme’’ à solutionner.
On devrait se pencher sur les conditions dans lesquelles le terrorisme prolifère et évolue (conditions socio-économiques, culture, …), pour pouvoir retracer les traits psychologiques des individus cibles.
La Tunisie, après 2011, est devenue un territoire fertile idéal pour le développement et l’expansion du terrorisme. De larges franges de jeunes s’y sentent marginalisés, privés de possibilités d’emploi ou d’un engagement politique et sociétal significatif, et déçus par une pseudo-élite politique froide et déconnectée, ayant échoué à proposer des solutions pour jeunesse frustrée. Les défaillances du système éducatif et l’absence de toutes perspectives d’un ascenseur socio-économique en marche, encouragent ces mêmes jeunes à devenir des proies faciles pour un endoctrinement terroriste aveugle.
Au-delà des postures politiques, nous devons assumer la difficile réalité à laquelle nous sommes confrontés, pour pouvoir la combattre. Le chômage, la pauvreté, l’injustice sociale et la misère ont longtemps servi à expliquer le terrorisme, mais ne peuvent convaincre quand on sait que la radicalisation a pris rendez-vous avec toutes les catégories sociales, médecins et ingénieurs confondus, … là aussi il s’agit d’une défaillance de notre système éducatif : l’absence de la culture.
Surmonter ce fossé ne serait certainement pas une tâche facile, cela nécessiterait de la détermination, de la prévoyance, de l’empathie, une vision claire, un leadership solide, beaucoup de patience, une stratégie, une capacité d’écoute et de compréhension, et surtout la volonté et le sacrifice d’un rassembleur, d’une élite, capable de comprendre les douleurs des classes sociales marginalisées.
Rester dans le déni n’arrangera nullement la situation. Nous devons adopter une approche plus compatible avec notre réalité : rebâtir des liens plus solides entre les citoyens et le gouvernement et regagner la confiance de sa jeunesse oubliée, … le peuple tunisien a toujours tendu la main, … nos frères et sœurs à Ben Guerdane en ont fourni la preuve.