« Connaissance des Hommes et des territoires en Méditerranée » (Côté Med), l’Office de coopération économique pour la Méditerranée et l’Orient (OCEMO) vient de publier le huitième numéro de sa publication bimestrielle « OCEMO-débats ». Cette huitième publication met en avant les difficultés d’insertion des jeunes sur le marché du travail et leur vulnérabilité.
En prenant en compte les emplois précaires ou informels, ce huitième numéro revient également sur les conditions permettant à ces jeunes d’accéder à un emploi formel. Il en est ainsi des jeunes sans diplôme ou sans expérience et qui n’ont pas d’autre choix que d’accepter un emploi informel et précaire, ce qui les prive, de fait, de nombreux droits. Cette étude présente au lecteur les difficultés que rencontrent les jeunes Méditerranéens pour trouver un emploi dans un contexte où ils sont numériquement de plus en plus nombreux, sur une base comparative entre Maroc et Tunisie.
Une majorité de jeunes salariés tunisiens travaille sans contrat écrit
En Tunisie, la fréquence des jeunes salariés sans contrat n’est donc pas directement comparable aux chiffres précédents. Cependant, en Tunisie aussi, les jeunes salariés sous contrat de travail écrit sont légèrement minoritaires : 46 % du total des 15-29 ans, selon l’enquête SWT (Schoolto- Work Transition, en français : entrée dans la vie active) du BIT de 2013.
Comme dans la région marocaine Marrakech-Tensift-Al Haouz (MTH), le contrat de travail écrit est plus répandu dans le secteur tertiaire (58 % des cas) que dans l’industrie ou l’agriculture.
Comme dans le cas marocain en région MTH, le diplôme favorise très nettement l’accès à un emploi formalisé par un contrat écrit : 73 % des jeunes salariés tunisiens ayant quitté l’école au niveau primaire travaillent sans contrat ; ce cas est très minoritaire parmi les sortants de l’enseignement supérieur (17 %).
Enfin, comme dans le cas marocain de la région MTH, en Tunisie la part des emplois salariés assortis d’un contrat augmente lorsque les jeunes ont acquis un début d’expérience sur le marché du travail, pour les jeunes hommes comme pour les jeunes femmes qui ont achevé leurs études supérieures.
Pour les jeunes hommes de niveau d’études secondaires, la part des emplois salariés formels s’accroît lorsqu’ils ont trois ans d’expérience professionnelle ou plus, tandis que cette amélioration est moins nette pour les jeunes femmes.
Pour ceux qui ont arrêté leurs études au niveau primaire, l’accès à l’emploi formel est rare. Il concerne moins de 10 % des salariés de ce niveau, et l’acquisition d’expérience professionnelle n’améliore pas l’accès à un contrat de travail écrit pour cette catégorie de jeunes.
L’enquête a conclu que dans les deux pays et plus généralement dans la zone MENA, pour les jeunes femmes, le point crucial est la participation au marché du travail, très faible en comparaison des autres régions du monde, avec une différence entre les jeunes tunisiennes et les jeunes marocaines ; en Tunisie, toutes choses égales par ailleurs, la propension des jeunes femmes à l’inactivité baisse quand le niveau d’études s’élève, alors que ce n’est pas le cas dans la région marocaine enquêtée.
Et d’ajouter que dans les deux pays, le diplôme est une condition nécessaire d’accès à l’emploi formel, et cet accès s’améliore avec l’expérience acquise sur le marché du travail. De plus, en Tunisie, toutes choses égales, un diplôme professionnel permet un meilleur accès à l’emploi formel qu’un diplôme secondaire général.
L’étude montre que l’emploi salarié informel concerne bien davantage les jeunes hommes. Cette situation tient au moins en partie aux préférences des jeunes femmes et de leurs familles, jugeant ces emplois peu compatibles avec la vie familiale. Une discrimination des employeurs à l’encontre des jeunes femmes pourrait aussi être en cause.
« Les disparités territoriales sont très fortes, au Maroc comme en Tunisie. Les jeunes ruraux et les jeunes urbains n’ont pas les mêmes chances d’accès aux emplois salariés formels », précise l’étude.
De plus, en Tunisie, les opportunités d’emploi formel sont bien plus fréquentes dans la zone littorale du Centre et de l’Est, où le marché du travail est le plus dynamique.
La valeur du diplôme est mise en question, mais il reste le passage quasi obligé pour accéder à un emploi formel. De plus, en Tunisie, la formation professionnelle est un atout pour l’accès aux emplois formels. L’accès aux emplois formels est plus difficile pour les débutants.
C’est le signe probable d’un trop grand éloignement entre la sphère de l’éducation et celle de l’entreprise. D’où l’intérêt de développer des actions qui visent à les rapprocher (stages longs en entreprise, formations en alternance, programmes de seconde chance
visant à doter les jeunes sortants précoces de l’école ou les diplômés chômeurs de compétences certifiées, tels le programme MedNC, …).