Pour le Centre des Jeunes dirigeants (CJD), la situation économique connaît de plus en plus de difficultés. Malgré les quelques réformes engagées par les différents gouvernements, la situation semble ne pas avancer.
Face aux revendications sociales et aux exigences des bailleurs de fonds internationaux, le gouvernement se trouve à la fois en train de gérer l’urgence mais aussi tracer les grandes réformes de fond, avec comme objectif majeur, la relance de l’investissement et de la création d’emplois.
Le climat des affaires a besoin d’une multitude de réformes structurelles qui s’inscrivent dans un programme à long terme donnant lieu à un nouveau modèle économique orienté vers une croissance à deux chiffres et un chômage moins important. Or les fruits de ces réformes ne peuvent être visibles rapidement.
De ce fait, des mesures d’urgence sont indispensables pour pallier les obstacles de la bureaucratie, de la lourdeur des procédures administratives, et ce, afin de contourner les blocages surtout au niveau des grands projets d’infrastructures et des nouveaux investissements.
C’est dans ce que le CJD a lancé aujourd’hui le débat sur la relance économique et les mesures d’urgence. Pour présenter les différentes lois et réformes proposées actuellement au niveau du gouvernement ou de l’ARP, le CJD a invité Eymen Raies, conseiller auprès du ministre du Développement, de l’Investissement et de la Coopération Internationale, Fadhel Ben Ormane, député du bloc Nidaa Tounes et membre de la Commission finance à l’ARP et Hakim Ben Hammouda, économiste et ancien ministre de l’Economie et des Finances, pour présenter les enjeux, les défis et les opportunités de la loi d’urgence économique et échanger sur l’impact de ces mesures.
Témoignant de l’expérience allemande avec la crise qu’a connue son pays en 2003, Holger Dix, représentant résident de la Konrad-Adenauer-Stiftung, a ldéclaré que la volonté politique est décisive dans la relance économique parce qu’il y a aujourd’hui beaucoup de choses à faire.
Loi d’urgence économique : à quoi sert-elle ?
Pour Eymen Raies, il y a deux volets qui justifient cette loi : d’abord, les marchés publics sont considérés comme des projets d’intérêt national. Puis sur le volet des projets privés, la loi d’urgence économique permettra la création, au sein de la présidence du gouvernement, d’un comité spécial pour assurer le suivi des projets. « On est dans l’urgence. On a besoin de cette loi parce qu’on est en crise. Aujourd’hui, il n’y a pas de grands projets dans des secteurs concurrentiels, mais il y a de grands projets d’infrastructure »,
Citant l’exemple de la réforme du secteur bancaire, Hakim Ben Hammouda considère que le problème de la relance économique n’est pas au niveau des lois et de la législation, mais elle est plutôt liée à un déficit d’action. « Il y a un problème d’exécution. Les résultats du sondage du CJD sont très significatifs et confirment le consensus quant à la lenteur du rythme des réformes », a-t-il précisé.
Et d’ajouter qu’une grande partie de la croissance est générée par l’investissement, alors que ces dernières années la croissance est générée par la consommation qui crée d’autres problèmes.
« On n’a pas toujours besoin d’une loi. Il faut avoir de grands projets structurants. Il faut allier les mesures d’urgence en termes d’investissement et des besoins sociaux et les actions structurantes », ajoute Hakim Ben Hammouda.
Interrogé sur le nouveau rôle de l’Etat, l’ancien ministre des Finances préfère un Etat stratège qui ait une vision stratégique et qui définisse les besoins du pays dans les vingt prochaines années.
Interpellé sur le rôle du législatif dans la relance économique, le député Fadhel Ben Omrane a considéré qu’on n’a pas besoin d’une loi d’urgence économique parce qu’il suffit d’accélérer le rythme des appels d’offres et des concessions. Pour lui, la gouvernance pose un grand problème dans la mesure où un comité ou une commission ne doit pas jouer le rôle des ministères. « La création d’un comité pour le suivi des projets dans le cadre d’une loi d’urgence économique est une erreur. Le problème aujourd’hui est que les responsables dans l’administration sont bloqués, ils travaillent dans le risque et ne peuvent rien signer », dit-il.
Et d’ajouter que l’investissement privé n’est pas aujourd’hui dans une phase d’agressivité et son niveau est faible. Pour lui, c’est l’investissement public qui encourage l’investissement privé.
« Il y a trop de lois. Les PME et les jeunes dirigeants en ont marre. On a besoins de travailler. Les jeunes entrepreneurs passent 80% de leur temps dans les administrations. Fini le temps des grandes entreprises », soutient Abdelaziz Darghouth, fondateur du CJD
M. Darghouth considère que le seul moyen de relancer l’économie est d’encourager la création des PME et libérer l’investissement. Pour lui, il est aujourd’hui crucial de donner la possibilité aux jeunes leurs propres entreprises.
Surpris par la teneur de ce qui a étédit, Dhiaa Ben Ltaïfa, membre du CJD, a fait remarquer que les conférenciers n’ont pas réussi à s’entendre ni sur le diagnostic ni sur la vision sans parler des moyens et des modes opérationnels. « Aujourd’hui, les jeunes dirigeants souhaitent voir le gouvernement leur donner des lueurs d’espoir au moins dans les 18 prochains mois. Malheureusement, il y a aujourd’hui un flou sur certains volets économiques ! », a-t-il précisé.