Les alliers d’hier sont-ils devenus les ennemis d’aujourd’hui ? Tout donne à le croire à propos de la tension qui règne depuis quelques semaines, et qui s’est transformée récemment en guerre déclarée entre l’Union patriotique libre (UPL), présidée par Slim Riahi et Machrou3 Tounes par Mohsen Marzouk.
L’adage dit qu’en politique « il n’y a pas d’ami éternel ni d’ennemi éternel, mais des intérêts réciproques ». Ceci est vrai lorsqu’il s’agit de deux factions rivales qui s’unissent pour combattre un ennemi commun. Certains appellent cela de la tactique, d’autres le qualifient de réalisme et d’opportunisme politique. Cependant, devant cette « alliance » entre l’UPL et le Machrou3 qui a mené à la constitution du Front du salut et du progrès (FSP), ces termes de tactique ou de réalisme ne semblent pas capables d’offrir un cadre d’analyse approprié qui permette d’expliquer les causes de l’émergence et du déclin de ce mort-né de la vie politique et partisane tunisienne.
D’ailleurs, depuis l’annonce, en grande pompe, un certain 2 avril 2017, de la création de ce front, il était clair, de l’avis de tous les observateurs, que ce dernier ne ferait pas long feu. Et pour cause, ce ne sont pas les différends d’ordre politique ou idéologique qui laissent présager un rapide déclin du front, mais c’est plutôt les motivations des « leaders » qui le composent, précisément les ambitions politiques de Mohsen Marzouk et de Slim Riahi qui ne vont pas tarder, selon ces observateurs, à se confronter.
Le cours des événements de ces trois mois de vie du FSP semble donner raison à cette analyse. Car non seulement aucune position ou déclaration commune à propos des événements qui ont secoué le pays lors de ces trois derniers mois n’a émané du front, mais aussi, le fait que Machrou3 Tounes ait boudé les différentes activités et apparitions médiatiques du FSP depuis le mois d’avril.
La conséquence logique de cet état de fait est l’indifférence de Machrou3 Tounes vis-à-vis de Slim Riahi qui a vu ces derniers jours ses avoirs et comptes bancaires gelés sur décision de la justice. Comme pour enfoncer, encore plus, le clou et quitter une barque qui coule, le parti de Mohsen Marzouk a vite fait de déclarer qu’il a suspendu sa participation au FSP, et ce, tout en prenant le soin de préciser que cette décision de gel a été prise indépendamment des soucis judiciaires de Slim Riahi.
Les déclarations faites hier, mardi 4 juillet 2017, par l’homme d’affaires, mais aussi par la porte-parole de son parti, Samira Chaouachi, ne peuvent que donner le coup de grâce à un front qui n’a pas su depuis sa création influer sur la scène politique tunisienne. S’exprimant sur les ondes de Mosaïque Fm, Slim Riahi a indiqué qu’un « avocat membre du bureau politique de Machrou3 Tounes était derrière le gel de ses avoirs et comptes bancaires ».
Cette accusation, si elle se vérifie, ne pourrait qu’interpeller, encore une fois, sur la gravité de ce mariage contre nature entre la politique et le monde des affaires. Elle confirme, en outre, l’état de décadence et l’absence d’éthique dont souffre le monde politique en Tunisie depuis déjà quelques années.