La multiplication des chaînes de télévision a-t-elle eu l’effet d’entraînement souhaité sur la production ? N’a-t-on pas dit que la libération du PAVT allait encourager les sociétés de production de l’audiovisuel ? En lieu et place nous avons rediffusion sur rediffusion.
Echos et soirées des festivals d’été, feuilletons largement diffusés, rediffusions de programmes et news. Il ne faut pas faire une analyse de contenu avec tableaux fixant les catégories de programmes et leur pourcentage pour se rendre compte que pour l’essentiel (80% selon un décompte d’une journée du mois de juillet par hasard) c’est ce que nous proposent nos chaînes de télévision en cet été 2017.
Evidemment beaucoup de télévisions étrangères ne font pas bien mieux. La période estivale n’est-elle pas dédiée aux rediffusions ? Les départs en vacances notamment en Europe motivent cette tendance largement connue.
La crise est passée par là
Mais qu’en est-il pour nos chaînes de télévision le reste de l’année ? En clair : font-elles mieux que pendant la saison estivale ? Disons-le tout aussi clairement : si l’on excepte le mois de Ramadan, il n’y a pas de changement notable.
Il faut dire que la crise que connaît le pays est passée par là. La faible croissance de l’économie nationale (il faut bien se faire financer par la publicité), la dégringolade de la parité du dinar (il faut bien acheter des programmes à l’étranger) et les difficultés à recruter et à servir des salaires décents (il faut bien recourir à des compétences) expliquent ce recours –exagéré- au low-cost décrit plus haut en matière de programmation.
Des problèmes structurels
Et comme on ne peut expliquer un vécu par un seul ou deux facteurs, osons dire que le PAVT (Paysage Audiovisuel Tunisien) souffre aussi de problèmes structurels. Comme l’exiguïté de notre marché, les faibles recettes publicitaires ou encore la faible propension à exporter nos programmes.
Autant dire que tous ceux qui nous prédisaient une sorte de libération du champ audiovisuel de la mainmise étouffante de l’Etat ont eu tout faux. Ce dernier aussi bien sous le régime de Bourguiba que celui de Ben Ali était la chasse gardée de l’Etat et de quelques privilégiés.
Et il est à se demander si l’augmentation du nombre de chaînes TV créées après le 14 janvier 2011 a introduit de grands changements. Au moins cinq d’entre elles vivotent lorsqu’elles n’ont pas disparu.
Les faits sont là aussi têtus
La multiplication des chaînes a-t-elle eu l’effet d’entraînement souhaité sur la production audiovisuelle? N’a-t-on pas dit que la libération du PAVT allait encourager les sociétés de production de l’audiovisuel ? Observez bien les génériques des programmes nationaux diffusés par nos chaînes. Combien d’entre ces programmes ont été acquis auprès de ces sociétés qui végètent encore?
On fait dans le cas d’espèce, pour ainsi dire, du surplace : nos chaînes recourent à leurs propres moyens. Certaines d’entre elles ont créé leur propre société de production.
La multiplication des chaînes et avec elle la libération du PAVT a-t-elle produit et en nombre de grands journalistes, de grands animateurs ou encore de grands techniciens comme on nous le prédisait. Ne fait-on pas là aussi du surplace ?
Morale de l’histoire : si la liberté est essentielle pour les médias, elle n’est pas suffisante. Certains l’ont appris à leurs dépens.
Et les faits sont là aussi têtus !