Si on parle de l’identité maghrébine, on parle de lutte et de militantisme. Etre conscient que la société maghrébine n’est plus ce qu’elle était aujourd’hui? Que reste-t-il de cette identité maghrébine?
Mustapha Kamel Nabli, ancien gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, est revenu sur la construction maghrébine qui, selon lui, doit aider à être riche. Il précise dans ce contexte: « Lorsqu’on a des richesses naturelles très différentes d’un pays à un autre, cela rend l’intégration extrêmement difficile. Or avec l’UMA, il y a deux pays énormément riches en ressources naturelles et d’autres non. La Tunisie n’est pas plus pauvre que l’Algérie ou que la Libye. Ce n’est pas la question. Prenons l’exemple du pétrole. Pourquoi les pays du Maghreb ne se mettent pas d’accord sur le prix du pétrole? C’est parce que les Libyens et les Algériens veulent distribuer la rente pétrolière à la population à des prix faibles ». Il ajoute: « Il y a un problème de partage de rente ».
Hassen Zargouni, directeur général de Sigma Conseil, est revenu sur l’avant et l’après-indépendance des élites politiques qui ont contribué à la décolonisation et l’indépendance des pays maghrébins. Il ajoute: « Malheureusement, juste après l’indépendance ces dirigeants indépendantistes nationalistes ont fait prévaloir les identités nationales intrinsèques à chaque pays plutôt qu’une vision maghrébine fédérale, globale ou régionale, parce qu’ils ont trouvé leur intérêt politique ou personnel dans une construction nationale plutôt que maghrébine ».
Identité maghrébine : avant et après les années 70
Et de poursuivre: « Mais il n’en demeure pas moins que dans les années 70, le rêve maghrébin est resté intact dans la population. Et on le voit à travers quelques initiatives dans le domaine sportif par exemple, avec une coupe maghrébine ».
Selon lui, les liens entre les populations existent jusqu’à maintenant, contrairement au niveau économique où la concurrence entre les pays du Maghreb est rude. Prenons le cas de la Tunisie et du Maroc, ces deux pays sont positionnés sur le même créneau, la délocalisation européenne. Il précise: « Le rêve maghrébin s’est affaibli actuellement et on vit dans une nostalgie ».
Interrogé sur le fait de savoir si ce qu’on appelle l’UMA se concrétisera un jour, il a répondu: « Peut-être dans cent ans et non dans l’immédiat ».
Il précise: « S’il y a une intégration, elle ne pourra être forcée que par l’intérêt européen, en mettant en place un marché commun maghrébin ou leurs services et leurs produits circulent rapidement ».
Il conclut: « Ni les pays, ni les nations avec des trajectoires politiques différentes pourront mettre en pratique ce processus de l’union. Pour la simple raison que lorsque certains pratiquent la démocratie, d’autres mettent en oeuvre l’autocratie. C’est un peu plus compliqué ».
Il est clair que la construction maghrébine à l’heure de la mondialisation demeure précaire. N’est-il pas venu le temps de parler d’une identité maghrébine?
A Nedia Dejoui: Ces points de vue ont été exprimés lors de la commémoration du 10ème anniversaire du décès de Mohamed Charfi organisé par la famille et les mis de Mohamed Charfi. Il aurait été plus correct de faire référence à cette rencontre. Faouzia Charfi