Demain, mardi 7 août 2018, serait un jour décisif pour les finances publiques tunisiennes. Le Trésor compte opérer une adjudication d’échange pour la ligne BTA échéance octobre 2018 et ayant pour coupon 5,5%.
En observant le montant à rembourser, nous comprenons cette manœuvre. Il s’agit de payer 700,690 millions de dinars en one shot. En contrepartie, les intéressés auront le choix de souscrire à trois lignes, dont la plus proche est pour juin 2023 à 6%.
Le Trésor et une série d’adjudications infructueuses
Après la dernière sortie infructueuse de BTC du 19 juillet dernier, une deuxième opération a eu le même sort le 2 août. Les banques et le Trésor sont en plein guerre de taux. C’est d’ailleurs de bonne guerre dans laquelle les établissements de crédit et les assureurs jouent la hausse de taux par laquelle le Trésor cherche à optimiser son coût d’endettement.
Ainsi, si l’échange se déroule dans de bonnes conditions, le Trésor pourra éviter une grosse sortie de liquidités qui lui éviterait de recourir à un marché peu généreux.
Pour mieux comprendre le tableau, il faut dresser le bilan de l’année. Selon la Loi de Finances 2018, l’Etat a programmé la levée de 2 milliards de dinars de BTA/BTZc et 100 millions de dinars de BTCT (Bons du Trésor à Court Terme).
Avec la flambée des taux, l’exécution d’un tel plan s’est avérée quasi-impossible. Sur la première moitié de l’année, le Trésor a demandé 1,080 milliards de dinars de BTA/BTZc mais il n’a pu lever que 467,8 millions de dinars. Bien évidemment, il a fait le choix de ne retenir que le minimum nécessaire, sinon les taux aurait pu exploser pour atteindre des niveaux à deux chiffres.
Mais en contrepartie, pour combler le trou budgétaire, il a dû recourir massivement au BTCT. Ainsi, il est sorti 24 fois sur le marché pour chercher 1,230 milliard de dinars et il a eu plus de réussite en obtenant 1,102 milliard de dinars. Ces titres, dont la durée de vie ne peut excéder 52 semaines, sont très rentables pour les banques qui peuvent ainsi garder un portefeuille liquide. En même temps, cette solution est plus coûteuse pour l’Etat mais reste moins onéreuse que les conséquences d’émeutes sociales.
Septembre, le mois de sortie sur les marchés internationaux
Tant retardée, la sortie sur les marchés internationaux pour collecter 1 milliard de dollars ou leur équivalent en Euro est programmée pour la rentrée. Programmée pour le mois de mars dernier, la Tunisie a décidé de reporter cette sortie puisque les marchés étaient tendus. Mais est-ce que les conditions du marché sont actuellement meilleures ? La réponse est malheureusement négative.
Bien que le Fed ait changé de patron au mois de janvier et étant donné les risques de la guerre commerciale avec la Chine, la tendance des taux est haussière. L’institution a l’intention de tenir le cap de sa politique monétaire, en relevant graduellement les taux d’intérêt. Déjà, les taux US 10 ans ont atteint leur plus haut niveau depuis 2011 durant les dernières semaines. Bien que les taux ont légèrement baissé, il serait difficile de les voir passer sous la barre des 2,8%. Si le spread de la dette tunisienne est de 500 points de base, nous serons alors à un taux de 7,8% ! Et c’est quasiment « garanti ». Si nous un prenons un exemple récent, à savoir le Ghana, le pays qui est sur un autre rythme de croissance économique mais ayant la même notation souveraine, a levé au cours du mois de mai dernier 1 milliard de dollar au prix de 7,625% au cours du mois de mai dernier.
Nous comprenons donc l’importance de l’opération d’échange et de l’obtention de la nouvelle tranche du crédit du FMI. Si les deux opérations sont menées parfaitement, et avec un peu de chance au niveau des recettes en devises, le gouvernement pourrait limiter le montant à emprunter et éviter un coût élevé de la sortie.