Il faut avoir la foi du charbonnier pour croire que la Pharmacie centrale de Tunisie (PCT) n’a pas de problèmes structurels et que tous les médicaments en Tunisie sont disponibles. Une nouvelle crise vient de se greffer sur d’autres, à savoir la crise des médicaments. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, l’Institut Tunisien des Etudes Stratégiques (ITES) a organisé une table ronde, hier 8 août à son siège à Carthage, qui porte sur ce thème afin d’éclairer l’opinion publique et tenter de répondre à plusieurs interrogations sur ce sujet, en présence de plusieurs spécialistes.
L’ITES ne manque pas d’argumenter le sujet en débat en pointant plusieurs causes : la crise en Libye, la contrebande, le vol des médicaments des hôpitaux, l’augmentation de la demande, la chute du dinar tunisien face à l’euro et au dollar. Cela est bel et bien contradictoire surtout que la Tunisie est l’un des premiers pays africains à s’être doté d’une industrie pharmaceutique dès la fin des années 80. Rappelons aussi que l’Etat tunisien a mis en place, vers la fin des années 80, un cadre juridique réglementaire afin d’impulser le développement du secteur, à sa privatisation et au développement à l’international.
Médicaments en Tunisie: la crise comporte plusieurs facettes
Aymen Mekki, PDG de la Pharmacie centrale de Tunisie, a indiqué lors de son intervention que le problème de la PCT remonte à 2016 et est le résultat d’une accumulation de problèmes non résolus en amont. Si l’Etat n’était pas intervenu à plusieurs reprises la PCT aurait fait faillite depuis longtemps. En outre, il a tenu à préciser qu’il existe une grande différence entre pénurie de médicaments et médicaments manquants. La crise de la Pharmacie centrale s’est aggravée pendant les trois dernières années suite à la chute du dinar tunisien . Des solutions ? Il n’a pas manqué de proposer la mobilisation mensuelle de 50 millions de dinars en faveur de la Pharmacie centrale, l’ajustement des prix des médicaments et la création d’un fonds national pour l’industrie pharmaceutique qui serait géré par le ministère de la Santé.
De son côté, le PDG de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) Béchir Armani, lors de son intervention, n’a pas manqué d’annoncer son optimisme quant à l’avenir de la CNAM au vu de l’émergence d’un certain nombre de bons signes. Jusqu’au mois de juillet 2018, les dépenses de la Caisse en médicaments, spécifie-t-il, se montent à 700 millions de dinars. Dans le même contexte, il a fait savoir que suite à des concertations entre la CNAM et la PCT, un accord a été trouvé pour éponger les dettes de la Caisse vis à vis de la PCT. A noter que la CNAM verse mensuellement un montant de 23 millions de dinars à la Pharmacie centrale sachant que les dettes de la Caisse au mois de juillet dernier sont de l’ordre de 388 MDT.
Intervenant lors du débat, le président du Conseil national de l’ordre des pharmaciens de Tunisie (Cnopt),Chedly Fendri, s’est insurgé contre la vente des médicaments dans les réseaux parallèles et sur les réseaux sociaux . Il a affirmé que des mesures coercitives seront mises en place pour lutter contre ce phénomène. A propos de la rupture des stocks de certains médicaments, il épingle les laboratoires étrangers les accusant d’user de ce procédé pour acculer la Pharmacie centrale à honorer ses dettes. Par ailleurs, il a affirmé que la crise est en voie de résolution, pour peu que les caisses de la PCT soient adéquatement renflouées. « En définitive, le problème principal de la PCT est le manque de liquidité, la contrebande et les autres problèmes ne sont qu’accessoires », conclut-il.