Alors que la société civile s’est félicitée de l’adoption de la loi sur la déclaration du patrimoine et la lutte contre l’enrichissement illicite, il semble que tout le monde ne soit pas du même avis. L’avocate Donia Ellouze revient sur les imperfections de cette loi, dans une déclaration à leconomistemaghrebin.com. Il s’avère que la déclaration du patrimoine va alimenter des soucis juridiques.
L’avocate Donia Ellouze a souligné la nécessité de la mobilisation contre la corruption en Tunisie. Par ailleurs, un certain nombre de remarques s’impose en ce qui concerne cette loi. Donia Ellouze a indiqué que la loi sur la déclaration du patrimoine s’applique entre autres, aux associations et syndicats et à la société civile, d’une façon générale.
Déclaration du patrimoine contre les associations privées
« On ne comprend pas pourquoi la société civile est concernée par cette loi surtout que la loi prévoit d’autres mécanismes stricts pour le contrôle des associations », lance-t-elle. Par ailleurs, l’avocate a rappelé que le terme association en Tunisie est un terme très large qui englobe plusieurs types d’activités (chambre de commerce, sport et autres).
En cas d’infraction, les associations subissent des sanctions très sévères prévues par la loi sur les associations. Elle rappelle que chaque association qui reçoit un fonds ou des dons est dans l’obligation d’informer la Présidence du gouvernement. De même, les associations sont contrôlées par les commissaires aux comptes. Elles doivent aussi rendre publics leurs rapports financiers. « Il s’agit d’un double mécanisme de contrôle. Qui va l’emporter contre qui ? On ne sait pas », s’interroge-t-elle. Notre interlocutrice a indiqué qu’il est normal que cette loi touche les associations qui ont accès aux fonds publics. Par ailleurs, elle a indiqué qu’il n’est pas normal que cette loi touche les associations à caractère privé.
Quand la déclaration du patrimoine touche les conjoints
Donia Ellouze a indiqué que la loi tunisienne parle de la corruption dans le secteur public, alors que les associations relèvent du privé. Dans le même contexte, elle a indiqué que les conjoints de personnes concernées par cette loi doivent aussi signer la déclaration du patrimoine. Pour elle, obliger un conjoint à signer cette déclaration est un acte qui ne se base sur aucun fondement juridique. Et à cela s’ajoute qu’un conjoint n’est pas forcément au courant de tout le patrimoine de son partenaire.
La loi affirme que les personnes concernées doivent déclarer leurs biens qui dépassent la valeur de 10 mille dinars. « Mais comment évaluer la valeur du patrimoine en question et à travers quel moyen ? » s’interroge-t-elle. L’avocate a appelé à l’amendement de cette loi, en supprimant les associations et les personnes physiques et morales qui ne manipulent pas de fonds publics de la liste des personnes concernées par la déclaration du patrimoine.