La Tunisie sortira de la liste du Groupe d’action financière (GAFI) au mois de juin 2019. Et elle sortira automatiquement de la liste des pays ayant des carences stratégiques qui font peser une menace significative sur le système financier de l’UE. C’est ce qu’a annoncé, récemment, Faycel Derbel, conseiller à la présidence du gouvernement chargé des réformes fiscales. Moez Joudi, président de l’Association tunisienne de gouvernance (ATG) revient sur cette sortie dans une déclaration accordée à leconomistemaghrebin.com.
Dans ce sens, M. Joudi affirme que la dégradation de la Tunisie et ses dernières classifications dans les listes noires de l’UE et dans la liste du GAFI désignant les pays à haut risque en termes de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme de par les failles de leurs législations et de leurs moyens de prévention, est une page noire dans l’histoire de l’économie et des finances nationales qu’il faut savoir tourner vite.
Il précise que certes- depuis ces dernières classifications- des efforts ont été consentis. Et des réformes législatives ont également abouti. Cela contribue ainsi au passage de la Tunisie de la liste noire à la liste grise de l’UE et à une éventuelle sortie des zones sombres du radar du GAFI d’ici le mois de juin prochain.
Cependant, Moez Joudi indique que le mal est fait. Et la Tunisie a pris un coup terrible au niveau de la crédibilité de ses instances de contrôle et de surveillance. Mais également au niveau du climat des affaires et de l’attractivité des financements extérieurs et des IDE.
Que faut-il faire?
Face à cette situation, M. Joudi estime qu’il est important de revenir à la déconfiture qui s’est produite. Et ce, avec un diagnostic profond des failles et des défaillances. Mais aussi des erreurs humaines et de la responsabilité de chaque partie.
Tout ce qui s’est passé n’est, selon ses propos, ni le fruit du hasard ni la résultante d’un manque d’expérience ou de moyens. Rappelant que la Tunisie a toujours respecté les dispositifs internationaux en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Et avant le 14 janvier 2011, la Tunisie a même présidé le GAFI.
En outre, le président de l’ATG recommande d’éviter les précipitations et les lois «fourre-tout» votées à la hâte. Dernier exemple en date, la loi anti-blanchiment et de lutte contre le financement du terrorisme votée à l’ARP en janvier 2019. « Cette loi n’a pas pris le temps nécessaire en termes de débat et de discussion, mais surtout en termes de degré de faisabilité et de son application. Plafonner, par exemple, les transactions en cash à 500DT est une mesure qui aura franchement beaucoup de difficultés à être appliquée et respectée. D’autres aberrations sont à relever dans cette nouvelle loi », a-t-il souligné.
Au final, il préconise de commencer par appliquer les lois existantes et mettre en pratique les dispositifs en vigueur. Et ce, en fournissant toute la volonté politique nécessaire pour agir d’une manière juste et efficiente. Il est aussi important de dénoncer la passivité et les deux poids, deux mesures. Tout en appliquant littéralement la loi sans avoir peur des connivences politiques et des pressions en tout genre.
« La Tunisie doit retrouver sa place au niveau international parmi les nations prospères et respectueuses des règles de transparence et de bonne gouvernance », conclut-il.