« ALECA et agriculture : au-delà des barrières tarifaires », tel est l’intitulé de l’étude réalisée, en avril 2019, par l’Observatoire Tunisien de l’Economie (OTE). Et ce, pour le compte de l’UTAP et la Fondation Rosa Luxemburg.
Cette étude porte sur deux volets:
- « Subventions agricoles européennes : angle mort de la négociation sur la libéralisation des échanges agricoles ».
- « Normes sanitaires et phytosanitaires dans le cadre de l’ALECA et leurs enjeux pour l’agriculture tunisienne ».
Ainsi, les auteurs de cette étude ont affirmé que les normes SPS (mesures sanitaires et phytosanitaires) constituent l’une des principales barrières non tarifaires au commerce utilisées par les pays développés. Et ce, pour protéger leurs producteurs notamment par l’UE.
Ces dernières sont justifiées par un objectif de politique publique. En l’occurrence, la santé humaine et animale. Mais elles représentent, également, un enjeu commercial et peuvent être utilisées à des fins de protectionnisme.
Toutefois, l’accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les normes SPS vise à encadrer la mise en place de ces normes par les Etats. Le but est de prévenir son utilisation à des fins protectionnistes et de promouvoir la coordination des Etats. Et ce, afin d’établir des normes SPS internationales fondées sur des arguments scientifiques au sein des organismes internationaux.
ALECA: proposition du chapitre sur les normes SPS
L’OTE a précisé que la proposition du chapitre sur les normes SPS dans l’ALECA, en cours de négociations avec la Tunisie, s’inscrit dans le cadre de la politique européenne de voisinage. Dont l’un des objectifs est d’intégrer l’acquis communautaire sans perspective d’adhésion.
Ce qui explique les articles exigeant un rapprochement de la législation tunisienne avec l’acquis communautaire dans le chapitre sur les normes SPS de l’ALECA. Ainsi, il n’y a pas lieu de négocier cette concession au sein de l’ALECA dans la mesure où la Tunisie n’est pas concernée par le processus d’adhésion.
Etant donné le coût prohibitif de l’harmonisation avec l’acquis communautaire, la Tunisie devrait, selon la même source, s’en tenir aux normes internationales. L’objectif est de permettre une meilleure facilité de diversification des marchés et de privilégier une approche plus appropriée aux conditions et à la réalité du secteur agricole.
L’étude a, en outre, démontré qu’en parallèle des négociations de l’ALECA, l’UE fait pression via les conditionnalités de prêts. Et ce, afin de faire adopter les dispositions du chapitre de l’ALECA sur les normes SPS. A travers d’une loi sur la sécurité sanitaire via un projet de jumelage avec le ministère de la santé.
Cette loi a été adoptée en février 2019. Elle engage le processus d’harmonisation avec l’acquis communautaire pour les normes SPS européennes. Et elle reprend le règlement de l’UE 78-2002. Ce qui risque d’affaiblir la partie négociatrice tunisienne, selon l’OTE.
Les recommandations de l’OTE
Dans cette étude, l’OTE a dressé une liste de recommandations qui sont comme suit :
- S’en tenir aux normes internationales et au respect de l’accord de l’OMC sur les normes SPS pour le chapitre SPS de l’ALECA. Tout en s’inspirant d’un article similaire à l’accord agricole entre l’UE et le Maroc.
- Mettre en avant et privilégier le système de reconnaissance d’équivalence de normes. Et ce, par le biais d’accords de reconnaissance mutuelle (ARM). D’autant plus que la Tunisie n’a aucune perspective d’adhésion à l’UE.
Sachant que dans le cadre d’un ARM, les producteurs nationaux n’ont pas besoin de modifier leurs procédures et normes comme ils le feraient dans le cadre d’une harmonisation. Mais les normes au niveau national sont acceptées comme équivalentes à celles de leur partenaire commercial.
- Privilégier le choix des normes internationales et non pas européennes lors de la préparation des décrets d’application de la loi sur la sécurité sanitaire et dans les guides de bonnes pratiques. Tout en s’inspirant du Maroc qui s’est tenu à privilégier les normes internationales.
- Exiger la consultation le ministère du Commerce et de l’Agriculture. Et ce, dans le cadre de la préparation des décrets d’application de la loi sur la sécurité sanitaire. En raison de leur expertise sur les enjeux commerciaux des normes SPS et de leur expérience à l’OMC.
- S’assurer que la conformité aux normes SPS européennes soit seulement une obligation pour les exportateurs vers le marché européen, et non pas une obligation pour tous les producteurs nationaux.
A noter que la Fondation Rosa Luxemburg bureau Afrique du Nord a financé cette étude. Et ce, avec les fonds du ministère fédéral de la coopération économique et du développement.