Deux députés français, Jean-Christophe Lagarde et M’jid El Guerrab s’exprimaient hier à l’Assemblée nationale française.
En effet, la situation en Tunisie suscite des inquiétudes à l’étranger, quelques jours de l’élection présidentielle. Car le candidat favori des sondages se trouve actuellement incarcéré.
Ainsi, Jean-Christophe Lagarde souligne : « Je comprends bien que le rôle de la France n’est pas de s’immiscer dans les affaires judiciaires tunisiennes. Cependant, Monsieur le Premier ministre, dans quelle démocratie voit-on, trois semaines avant le premier tour d’une élection présidentielle, le principal candidat incarcéré et accusé d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent ? », s’insurge-t-il.
Il ajoute : « Nous avons vu que les Tunisiens étaient capables de résister aux dérives qu’ils ont connues par le passé. Or, aujourd’hui, nombreux sont les Français et, je crois, les Tunisiens qui s’inquiètent du déroulement d’un processus démocratique que l’on peut pour le moins qualifier de curieux, d’inquiétant, d’unique en son genre. La France, qui entretient des relations anciennes et amicales avec la Tunisie, se doit, me semble-t-il, d’exprimer cette inquiétude et d’exiger que le candidat puisse, le temps de l’élection, présenter son programme, au moins entre les deux tours. »
Il rappelle également que l’incarcération sert à empêcher la fuite. « Or, quand on est candidat à une élection présidentielle, on ne cherche pas à fuir ; c’est plutôt le régime qui connaît une fuite en avant », dit-il.
De son côté, M’jid El Guerrab, député de la 9e circonscription des Français à l’étranger revient sur l’élection présidentielle de 2014 où le peuple tunisien a élu Béji Caïd Essebsi, grand commis de l’État, premier Président de la République d’une élection présidentielle libre.
Le risque de dérive autoritaire de l’exécutif!
Cinq ans plus tard, l’enjeu est crucial pour la Tunisie. Le pays se dirige-t-il vers un processus démocratique ou il s’agirait d’un retour en arrière? Les Tunisiens doivent être responsables pour qui ils vont voter.
Il revient sur l’affaire de Nabil Karoui qui a subi plusieurs manœuvres pour l’empêcher de se présenter. « La première a consisté à s’attaquer à la chaîne Nessma TV. La seconde a été de faire voter une loi électorale rétroactive afin d’éliminer sa candidature. Cette loi électorale n’a pas été promulguée par le Président de la République défunt, qui avait dénoncé le caractère anti-démocratique de ce texte. Son fils, Hafedh Caïd Essebsi, à la tête du premier parti politique tunisien, Nidaa Tounes, que j’ai reçu à Paris, m’a informé du risque de dérive autoritaire de l’exécutif », dit-il.
Il conclut : « Aujourd’hui, sans procès équitable, sans respect de la présomption d’innocence, Nabil Karoui est tout simplement emprisonné. L’Union européenne l’a déploré hier, dans un communiqué de presse. »
Autrement dit, changer les règles du jeu à la veille des élections aura certes un impact. Et comme disait Winston Churchill : « La démocratie est un mauvais système, mais c’est le moins mauvais de tous les systèmes. »