En termes de crise économique, historiens, économistes et étudiants ont toujours eu pour point de repère la fameuse crise de 1929. La plus célèbre journée « colorée » de l’histoire est le « jeudi noir » du 24 octobre 1929, début de la grande dépression. Depuis, le monde n’a pas connu de crise plus profonde que celle provoquée en 2020 par le Covid-19.
Aucun pays, du plus grand au plus petit, du plus puissant au plus faible, n’était préparé à un tel désastre; ni sur le plan sanitaire, ni sur le plan économique. Sur le plan sanitaire, le monde n’a pas connu un tel déferlement de contagion et de mort, depuis la grippe espagnole de 1918. Ce qui obligea pratiquement tous les pays du monde à opter pour le confinement total. Dans une tentative désespérée de ralentir la propagation du virus.
Sur le plan économique, il y a tout lieu de craindre que l’intensité de la crise de 2020 dépassera celle de 1929. En effet, si la grande dépression du début du XXe siècle a mis au chômage des dizaines de millions de travailleurs; les victimes de la grande crise engendrée par la pandémie se comptent par centaines de millions.
Car tous les secteurs économiques dans tous les pays du monde sont durement touchés. De même que des milliards d’êtres humains sont gravement affectés. Les Etats les plus riches ont le plus grand mal à faire face à la crise. Alors, que dire des Etats pauvres et endettés? Que dire de notre pays qui, avant la pandémie, était déjà à genoux par une décennie de gestion politico-économique désastreuse?
Une première dans le monde moderne
Le confinement appliqué par la plupart des pays est une première que le monde moderne n’a jamais expérimentée avant. Nul ne peut donc prévoir l’ampleur de ses effets sur l’économie mondiale et sur la vie de la majeure partie des habitants de la planète. Nul ne sait le nombre d’entreprises qui disparaîtront et le nombre d’emplois qui seront perdus à jamais. Mais une chose est certaine: aucun pays ne peut se permettre de confiner sa population jusqu’à la mise au point d’un vaccin ou d’un médicament qui pourrait prendre un an ou deux.
En termes de contamination et de décès, l’Espagne est le troisième pays le plus affecté au monde, après les Etats-Unis et l’Italie. Mais il est le premier à prendre hardiment des mesures d’allègement du confinement. Les autorités espagnoles ont autorisé lundi 13 avril une partie de la population à reprendre le travail, tout en imposant des mesures de sécurité strictes: masques, distanciation sociale etc. Dans toutes les gares et les stations de métro de Madrid, des milliers de policiers et de volontaires distribuaient des masques à ceux qui se rendaient au travail après une longue « hibernation ».
Avec une économie basée largement sur les services (tourisme, restauration, commerces), l’Espagne est le pays européen le plus affecté économiquement par la pandémie. On peut mesurer l’ampleur des dégâts en ayant en tête un seul chiffre: en 2019, ce pays a accueilli 84 millions de touristes…
Si les hôtels, les restaurants et les cafés restent fermés, les autorités espagnoles ont autorisé au secteur du bâtiment et quelques secteurs industriels à reprendre le travail.
Divergences prononcées
Économiquement, la France semble moins affectée que l’Espagne. C’est peut-être la raison pour laquelle le président Macron a décidé, lundi 13 avril, de prolonger le confinement de la population jusqu’au lundi 11 mai. « Même si l’épidémie commence à marquer le pas », a-t-il dit dans un discours télévisé. « Le confinement le plus strict doit encore se poursuivre. C’est la condition pour ralentir encore davantage la propagation du virus, réussir à retrouver des places disponibles en réanimation et permettre à nos soignants de reconstituer leurs forces. » Il a laissé entrevoir la possibilité pour les Français de « retourner travailler » dès le 11 mai.
Et nous alors? Certes nous avons le privilège si l’on peut dire d’être parmi les derniers pays en termes d’infection et de décès dus au coronavirus. Mais nous sommes aussi parmi les premiers pays dont les économies sont le plus gravement affectées.
La Tunisie n’a jamais connu de dilemme plus terrible. Elle ne peut se permettre ni le confinement prolongé, ni de mettre en danger la santé et la vie des citoyens par une reprise de l’activité économique. Le Conseil ministériel restreint présidé lundi 13 avril par le chef du gouvernement n’a rien décidé concernant un éventuel allègement du confinement. Il semble que dans les sphères du pouvoir, les divergences sont assez prononcées entre ceux qui veulent déconfiner et ceux qui estiment qu’il est encore tôt d’envisager un déconfinement, même progressif.
Tous les pays observeront sans doute les résultats et l’évolution du déconfinement partiel en Espagne. Pour ce qui nous concerne, la question qui obsède gouvernants et gouvernés est la suivante: dans cet état de confinement total, combien de temps une économie à genoux peut-elle résister?