En Tunisie, restaurateurs et cafetiers placés en zones rouges, se sont trouvés dans l’obligation de fermer leurs portes suite à la décision des autorités sanitaires. Avant le confinement, les restaurants et cafés étaient en majorité fréquentés par des entrepreneurs, salariés, cadres, étudiants et autres aujourd’hui placés en confinement.
Certains, habitués à la restauration hors foyers, ont opté à faire la cuisine aux foyers qui est devenu pour eux le moment de plaisir de la journée. D’autres ont eu recours à la livraison de divers produits alimentaires et des plats cuisinés. L’intention d’achat par livraison pendant le confinement reste plus élevée que celle après le confinement.
Cate Tunisie, agence spécialisée dans le marketing et la communication culinaire et Pro-Data cabinet de sondage et d’études de marché se sont associés pour aider les restaurateurs et les métiers de bouche à surmonter la crise et à mieux répondre aux besoins et aux envies des consommateurs, pendant et après le confinement.
C’est dans ce cadre que Cate Tunisie et Pro-Data ont lancé l’étude : »Quel food service pour la Tunisie ? ». L’étude s’est focalisée sur trois volets majeurs à savoir la restauration après le confinement, la livraison de plats cuisinés et produits alimentaires et les recommandations pour mieux envisager l’avenir dans les métiers de bouche.
Cette étude a été réalisée par Rémy Lucas, Expert dans les tendances culinaires et directeur associé Cate Marketing, Emna Megdiche, consultante spécialisé dans les métiers de bouche et Co-Fondatrice de Cate Tunisie et Mohamed Torgeman, Directeur Pro-Data Tunisie.
Elle a été lancée sur Internet avec l’outil Google Forms auprès de 1140 répondants dont 59,2% des femmes avec des questions fermées, des questions à choix multiples ou uniques. Elle a ouvert le choix aux répondants de présenter des suggestions.
Perception
L’étude a évoqué deux grandes thématiques. Il s’agit de la perception de la restauration pendant et après le confinement et la perception de la livraison pendant et après le confinement.
En effet, 97% de l’échantillon ont recours à la restauration hors foyer. 65,5% sont habitués à la restauration de loisir. Notons que l’échantillon n’est pas représentatif par rapport à la population tunisienne, mais il a du sens pour la cible de la restauration.
L’échantillon était composé de 92% d’actifs. 86% la population était 25 et 50 ans. 86% de l’échantillon ont entre 25 et 50 ans, soit une population potentiellement intéressante pour la restauration.
Nous publions en exclusivité, dans cette première partie, les résultats relatifs au changement des habitudes alimentaires lors du confinement.
Dans cette première partie, l’étude a apporté des indicateurs sur la cuisine durant le confinement. Elle a montré que 96 % ont cuisiné durant le confinement. 28 % des répondants ne cuisinaient pas avant. Ils ont appris à cuisiner pendant cette période.
« La cuisine a pris tout son sens lors du confinement. Le fait de faire la cuisine ne remplacera pas la restauration hors foyer mais, vous aurez à faire à des consommateurs plus avertis quant aux Food-Cost des produits et plus exigeants en terme de goût et de qualité pour ceux qui ont découvert et appris à cuisiner ».
Dans ce contexte, certaines enseignes de restauration ou de pâtisserie ont su garder contact avec leurs clients en proposant des recettes. Des lives ont été mis en place. Les réseaux sociaux étaient inondés de recettes lors du confinement. Ce qui fonctionnait le plus c’est la pâtisserie car justement c’est une activité à réaliser avec les enfants. « Des groupes facebook émergent tel que nos plats durant le confinement et la cuisine en période de confinement », ont fait observer les auteurs de cette étude.
La livraison des produits alimentaires et des plats cuisinés : enjeux et perspectives
S’agissant de la livraison des produits alimentaires, 51%, soit la moitié de l’échantillon ont eu recours à la livraison de divers produits alimentaires. Épicerie salée et sucrée, fruits et légumes, fromages, pâtisseries, volailles et viande apparaissent dans le top de la livraison des produits demandés par les consommateurs pendant le confinement.
Les opérateurs ont réagi rapidement pour répondre aux nouvelles manières de faire ses courses. Le premier supermarché en ligne le mieux organisé a été dépassé par la demande. Il a dû renforcer sa capacité. Carrefour propose maintenant un service de livraison. Certaines marques d’agroalimentaire ont mis en place un service livraison.
Selon les auteurs de cette étude, les chiffres réalisés par la livraison auraient pu être plus important si le service livraison ne s’était mis en place dans l’urgence et en réaction à la crise. Des lacunes nécessitent alors des réajustements à faire.
En effet, dans une projection post-confinement, plusieurs consommateurs imaginent poursuivre les achats alimentaires en livraison. Le taux d’achat par livraison exprimé est naturellement moins important qu’en phase de confinement. Pour autant, on observe des attitudes différentes selon la catégorie des produits. Par exemple, les intentions d’achat en livraison de viande et volaille enregistrent une baisse de 40%.
« Le taux d’achat par livraison exprimé est naturellement moins important qu’en phase de confinement »
Généralement les consommateurs préfèrent souvent les choisir eux-mêmes. L’épicerie, les fruits et les légumes et les fromages, régressent moyennement dans les intentions d’achat en mode livraison après le confinement.
Pour certains, cela sera une nouvelle habitude. La pâtisserie enregistre la plus faible baisse du taux d’intention d’achat exprimant l’intérêt récemment découvert par les consommateurs et de la livraison de ces produits.
Les opérateurs de ces secteurs ont intérêt ainsi à investir dans la livraison et à continuer à communiquer autour. En effet, l’étude montre que les restaurateurs doivent être en mesure de satisfaire les nouvelles attentes des consommateurs. Elles seront essentiellement liées à la sécurité, l’hygiène et l’adaptabilité.
Plats cuisinés : l’offre n’est pas en cohérence avec les attentes
A domicile, les nouvelles tendances des consommateurs étaient liées à la praticité avec un retour au cooking et le partager des plats qu’on prépare dans des groupes Facebook et sur Instagram. Des repas sont partagés en famille à distance par visioconférence.
Cela nécessite une meilleure gestion des ruptures, l’accélération de la vente en ligne et faire face à la difficulté pour la livraison et le paiement mobile.
Contrairement à la réussite de la livraison des produits alimentaires, l’étude montre que la livraison de plats cuisinés n’a pas explosé durant la période du confinement. Les consommateurs étaient coincés chez eux donc l’activité principale est devenue la cuisine. En plus, l’offre n’est pas forcément en cohérence avec les attentes des consommateurs qui avaient évolué dans ce contexte.
Les chiffres relatifs à la livraison des plats cuisinés montrent que 32% de l’échantillon ont eu recours à la livraison. 7% ont eu recours à la livraison pour la première fois et 54% d’insatisfaits par rapport au processus de livraison. 68,8% ont trouvé l’offre pendant le confinement pas assez large et pas assez variée.
Les envies durant le confinement
S’agissant des envies durant le confinement, les auteurs de l’étude ont observé que durant cette période de confinement, Facebook et Instagram sont inondés de photos de pizzas, de fricassés, de chappati…
40,4% des répondants déclaraient que : « quel que soit la pizza qu’on va réaliser chez soi, elle ne sera pas comme celle réalisée au restaurant« . 31% ont exprimé l’envie à la cuisine traditionnelle tunisienne, 39% à la cuisine asiatique et 32,4% à la cuisine de rue tunisienne.
Certains consommateurs n’ont pas caché leur mécontentement quant à la livraison en ligne ou à domicile. Ils pensent que cette épidémie a exposé la faiblesse des services en ligne et de livraison. Mais ils pensent qu’elle les a poussé à se remettre en question sur plusieurs sujets, pas seulement ceux qui concernent la bouffe.
D’autres, ont trouvé beaucoup de mal pour passer les commandes, avoir la confirmation, les délais… : « C’était compliqué de passer une livraison, personne pour répondre, certains plats ne sont pas adaptés pour la livraison, les emballages ne sont pas adaptés ça dégoulinait de partout…les livreurs ne portent même pas de masques donc j’ai arrêté les livraisons ! », note l’un des consommateurs.
« Habituellement, il est très simple de se procurer ce genre de plats dans le commerce. Durant le confinement le besoin est là, mais il n’y a pas de réponse en termes d’offre. Ces produits se mangent à la minute sur place, difficile de garder la qualité gustative en mode livraison », explique l’étude dans son volet relatif à la livraison des plats cuisinés.
Pour eux, la réponse adéquate aurait été un kit pizza (Pâte + Mozzarella), un kit Chappati (Pâte), un kit fricassé (vides + garniture) et/ou un kit tacos (pain + sauces + garniture).
Nouveaux systèmes de livraison
On sait l’importance de l’ambiance et de l’image dans le choix d’un restaurant. Ces deux éléments disparaissent dans la vente en mode livraison. L’acte de livraison devient le seul contact physique avec l’enseigne. Le livreur devient l’ambassadeur du restaurant.
En effet, l’opportunité de mettre en place de nouveaux systèmes de livraison plus performants en termes de logistique et d’hygiène devient primordial.
L’étude montre que la livraison doit être réfléchie comme une expérience client à part entière. C’est la traduction de votre établissement chez le client. Certains aspects non maîtrisés aujourd’hui doivent être mieux travaillés.
Pour améliorer la réactivité, il faut avoir des personnes qualifiées qui répondent aux appels et aux messages sur les réseaux sociaux. Des emballages doivent être brandés et adaptés qui permettent de garder la qualité et la fraicheur des produits.
Les livreurs seront dans l’obligation d’être présentables, polis et bien formés pour offrir un service de qualité.
Enfin, il faut des étiquettes qui précisent le mode opératoire pour chauffer le produit et garder ses saveurs.